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1152 – Le divorce d’Eléonore va faire passer la Guyenne sous la domination anglaise

mercredi 5 novembre 2008, par Pierre, 1951 visites.

Un épisode important de l’histoire de France qui ressemble à un roman. Alexandre Dumas semble tout indiqué pour nous le raconter. Nous aimerions toutefois étoffer cette version par quelques archives significatives, comme c’est l’usage sur ce site. En attendant, avec Alexandre Dumas et Eléonore (Aliénor) d’Aquitaine, nous sommes en agréable compagnie.

Sources :
- Gaule et France – Alexandre Dumas – Paris – 1833 – Books Google
- Les Croisades vues par les Arabes - Amin Maalouf - J’ai lu - 2007

Louis-le-Jeune, ayant appris que les Sarrazins avaient repris sur les croisés la ville d’Edesse [1], convoqua à Vézelay une grande assemblée où une nouvelle croisade fut résolue. Il reçut, ainsi que la reine Éléonore, la croix des mains de saint Bernard, et « partit, pompeusement entouré d’un cortège royal, la semaine d’après la Pentecôte de l’an 1147 [2] »

« Rétrospectivement, il semble que les puissants rois qui commandaient à ces armées de Franj aient jugé que seule la conquête d’une ville prestigieuse comme Damas justifiait leur déplacement jusqu’en Orient. Les chroniqueurs arabes parlent essentiellement de Conrad, roi des Allemands, ne faisant jamais la moindre mention de la présence du roi de France, Louis VII, un personnage, il est vrai, sans grande envergure. » (Amin Maalouf)

La tentative de prise de Damas par les croisés en juillet 1148 fut un fiasco.

Le roi, en quittant la France, en avait confié le gouvernement à Suger, qui avait vu avec chagrin cette croisade, et qui ne cessa de rappeler Louis à Paris, où il jugeait sa présence plus nécessaire qu’à Jérusalem. Ce fut surtout lorsque Robert de Dreux, frère du roi, l’eût abandonné en Palestine, et, revenu en France, eût essayé, avec l’aide de plusieurs ecclésiastiques et d’un parti populaire assez nombreux [3], de détrôner son frère, que ses instances devinrent plus pressantes, quoiqu’il eût par sa prudence et par sa fermeté fait échouer cette tentative d’usurpation.

Voici la lettre qu’il lui écrivait à cette occasion : « Les perturbateurs du repos public sont de retour, tandis que vous, obligé à défendre vos sujets, vous demeurez, comme captif, sur une terre étrangère. A quoi pensez-vous, seigneur, de laisser ainsi les brebis qui vous sont confiées à la merci des loups ? Comment pouvez-vous vous dissimuler les périls dont les ravisseurs qui vous ont devancé menacent votre état ? Non : il ne vous est pas permis de vous tenir plus long-temps éloigné de nous. Tout réclame ici votre présence. Nous supplions donc votre altesse, nous exhortons votre pitié, nous interpellons la bonté de votre cœur, enfin nous vous conjurons, par la foi qui lie réciproquement le prince et les sujets, de ne pas prolonger votre séjour en Syrie au-delà des fêtes de Pâques, de peur qu’un plus long délai ne vous rende coupable, aux yeux du Seigneur, d’avoir manqué au serment que vous avez fait en recevant la couronne. Vous aurez lieu, je pense, d’être satisfait de notre conduite ; nous avons remis entre les mains des chevaliers du Temple [4] l’argent que nous avions résolu de vous envoyer ; nous avons de plus remboursé au comte de Vermandois les trois mille livres qu’il nous avait prêtées pour votre service. Votre terre et vos hommes jouissent, quant à présent, d’une heureuse paix. Nous réservons pour votre retour les reliefs des fiefs mouvans de vous, les tailles et les provisions de bouche que nous levons sur vos domaines. Vous trouverez vos maisons et vos palais en bon état par le soin que nous avons pris d’en faire les réparations. Me voilà présentement sur le déclin de l’âge ; mais j’ose dire que les occupations où je me suis engagé pour l’amour de Dieu, et par attachement pour votre personne, ont beaucoup avancé ma vieillesse. A l’égard de la reine votre épouse, je suis d’avis que vous dissimuliez le mécontentement qu’elle vous cause jusqu’à ce que, rendu en vos états, vous puissiez tranquillement délibérer sur cela et sur d’autres objets [5]. »

Nous avons transcrit cette lettre dans tous ses détails, parce que de pareils détails sont de l’histoire. D’ailleurs son dernier paragraphe nous ramène à un événement qui a eu une trop grande influence sur les destinées du royaume pour que nous le passions sous silence : nous voulons parler du divorce de Louis-le-Jeune et d’Eléonore d’Aquitaine. La cause de ce mécontentement, que Suger invitait Louis-le-Jeune à dissimuler, était la conduite de la reine. Elle s’était croisée avec son mari, comme nous l’avons dit, et ses amours avec un jeune Sarrazin étaient devenus un sujet de scandale pour tous ceux qui avaient pris part à la sainte entreprise. Ils pensaient que le commerce adultère de leur reine avec un ennemi de l’église était une mauvaise préparation au succès qu’ils priaient Dieu d’accorder à leurs armes. Aussi, presque aussitôt après son retour, et la reine à peine accouchée d’une fille sur la paternité de laquelle il avait des doutes, Louis allégua entre lui et sa femme un degré de consanguinité assez proche pour amener la rupture de leur mariage, rupture qui eut lieu le 18 mars 1152. Le roi était revenu de la croisade le 20 octobre 1149 [6].

Louis-le-Jeune, en répudiant Éléonore, lui rendit la Guienne et le Poitou, quoique Suger s’opposât à cette restitution, qui, en effet, était d’un honnête homme, mais d’un mauvais politique. A peine maîtresse de ces deux duchés, Eléonore se maria à Henri, comte d’Anjou, duc de Normandie, et les lui apporta en dot ; de sorte que ce même comte, montant sur le trône sous le nom de Henri II, se trouva roi d’Angleterre, duc de Normandie, de Bretagne et d’Aquitaine, comte d’Anjou, de Poitou, de Touraine et du Maine. Ainsi l’ennemi fut introduit non-seulement sur les rivages, mais au cœur même du royaume ; ainsi le roi d’Angleterre put à l’avenir faire la guerre à la France avec des Français.


[1Le 24 décembre 1144

[2Vie de Louis-le-Jeune. L’auteur de « La Vie de Louis-le-Jeune » est complètement inconnu. On l’attribua long-temps, mais à tort, à Suger ; car ce fragment historique s’étend jusqu’en 1165, et Suger mourut le 12 janvier
1151.

[3Vie de Suger, par Guillaume, moine de Saint-Denis.

[4L’ordre du Temple avait été fondé sous Louis-le-Gros, l’an 1118.

[5Guizot, Notice sur Suger.

[6« C’est pourquoi Hugues, archevêque de Sens, les manda tous deux, à savoir le roi Louis et la reine Éléonore, en sa présence, à Beaugency, où, sur son injonction, ils se rendirent le vendredi d’avant le dimanche des Rameaux. Il s’y trouva aussi Samson, évêque de Reims ; Hugues, évêque de Rouen ; l’archevêque de Bordeaux, dont j’ignore le nom [Geoffroy] ; quelques-uns de leurs suffragans, et une grande partie des grands et des barons du royaume de France. Quand ils furent assemblés dans l’endroit ci-dessus désigné, les parens du roi prononcèrent, selon qu’ils l’avaient promis, le serment qu’il existait, comme nous l’avons dit plus haut, un proche degré de parenté entre le roi et la reine Éléonore ; et ainsi fut dissoute entre eux la société matrimoniale. » (Vie de Louis-le-Jeune.)

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