Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

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1607 - Henri IV précise les règles applicables au dessèchement des marais

Edit de janvier 1607, enregistré en Parlement le 26 août 1613

mardi 16 octobre 2018, par Pierre, 563 visites.

L’Edit inaugural d’Henri IV (8 avril 1599) a rapidement besoin d’être précisé, les premières difficultés apparues.

Ce nouvel Edit comporte 27 articles avec des précisions sur une grande variété de sujets : ouverture au public du capital de l’entreprise de dessèchement des marais, contrats de gré à gré avec des particuliers, franchise des péages pour le transport des matériaux, autorisation d’importer du bétail des autres provinces, limitation des droits féodaux (retrait lignager), autorisation de construire des villages et églises sur les terres desséchées, naturalisation des étrangers qui viennent y travailler et habiter, exemptions d’impôts royaux, seigneuriaux et ecclésiastiques pendant vingt ans, statut foncier dérogatoire, droit de créer des péages sur les nouveaux canaux navigables, droit de passage pour faire arpentages, plans, travaux, droit de travailler les jours fériés, droit de détruire les installations gênantes, prise en compte de l’augmentation de la valeur foncière des terres, interdiction de débaucher le personnel employé aux dessèchements, statut de noblesse accordé à 12 entrepreneurs, autorisation pour 20 ans de produire du fromage, droit de port d’armes exceptionnel pendant 6 ans.

On observera que cet Edit, donné en 1607, n’est enregistré au Parlement de Paris qu’en 1613, 6 ans après sa publication et 3 ans après la mort du roi.

Ce dispositif exceptionnel, dérogatoire du droit commun, qui va nécessairement faire naître des oppositions et des jalousies, va-t-il permettre de faire avancer cet énorme projet ? Nous le saurons bientôt.

Une affaire à suivre sur Histoire Passion, avec d’autres textes réglementaires et des informations spécifiques aux marais de Saintonge et d’Aunis.

Source : Recueil des édits, déclarations, arrets et reglemens concernant les desseichemens des marais - Bordeaux - 1681 - Université Bordeaux-Montaigne via BNF Gallica.

Edit du roy, pour le desseichement des marais - Paris - Janvier 1607

HENRY, par la grâce de Dieu Roy de France & de Navarre : A tous presens & à venir, Salut. Entre tous les moyens licites, que nous avons recherchez pour soulager & enrichir nos sujets ; depuis notre avenement à cette Couronne, ayant reconnu que le revenu de la terre étoit le plus utile & asseuré, comme étant celle qui produit les fruits & les matières propres pour toutes sortes de nourritures, d’ouvrages & manufactures qui sont au commerce des hommes ; Nous avons a cette occasion désiré & fait rechercher les moyens de faire desseicher un grand nombre de Marais, palus & terres inondées, en plusieurs endroits de nôtre Royaume, desquels le fonds est bon & fertile, s’il étoit en l’état d’être cultivé ;

Marais à Saint-Symphorien (17) - Photo : Pierre Collenot - 2010

Pour lequel nôtre dessein effectuer, Nous avons mandé & fait venir des Païs-bas le sieur Humfroy Bradleij, Gentil-homme du Païs de Brabant natif de Bergues sur le Zoom, nôtre Maître des digues, personnage fort expérimenté & entendu aux desseichemens & diguages des terres inondées. Sur les ouvertures duquel nous aurions fait nôtre Edit du mois d’Avril 1599. Mais ledit Bradleij s’étant mis en devoir de faire travailler au desseichement de plusieurs Marais de notre Royaume, il y auroit été interrompu par les traverses, procez, oppositions & autres procedures ; par la longueur desquelles ses ouvrages étant demeurez en aucuns lieux, les eaux ont regagné les terres, & rendu la plupart de son travail quasi inutile.

Comme aussi cette entreprise étant de grand soin, & ne se pouvant execucer sans une grande avance de deniers, à quoy ledit Bradleij ne pouvoit pas seul suffire, il se seroit associé avec des personnages de qualité, de mérite, d’industrie & de grands moyens ; entre lesquels sont les sieurs Hierôme de Comans, nôtre Conseiller & Maître d’Hôtel ordinaire : Marc de Comans : les enfans de deffunct Gaspard de Comans, Gentil-hommes du Païs de Brabant ; François de la Planche Gentil-homme Flamand, & Hierôme Vanufle Gentil-homme dudit pais de Brabant ; tant pour eux que respectivement chacun d’eux pour leurs associez, : pour lesquels ils se font & portent forts : Tous lesquels nous ont fait entendre qu’ils étoient resolus de poursuivre cetre entreprise, & rendre leidits marais & palus desseichez en nature de terres labourables, prez & pastis, y faire bâtir des maisons, & des bourgs & villages, pour y retirer & faire habiter plusieurs familles de Flamands, Hollandois, & autres Etrangers, qu’ils y feront venir pour faire valoir lesdites terres, & en retirer la plupart des commoditez requises pour la vie humaine, pourveu qu’il nous pleût avoir leur entreprise agreable, & pourvoir aux difficultez & inconveniens par lesquels les ouvrages dudit desseichement ont été cy-devant arrêtez & interrompus, & leur acorder les privilège & immunités portées par les articles qu’ils nous ont presentez, pour jouir librement du fruit de leurs labeurs, grandes risques & avances qui sont à faire en cette entreprise : Nous après avoir veu leurs articles & demandes, & icelles fait voir aux Princes, Prélats, Seigneurs & notables personnages de nôtre Conseil, Sçavoir faisons, que de I‘avis d’iceluy, de nôtre certaine science, pleine puissance & autorité Royale : Avons dit, statuè & ordonné ; disons, statuons & ordonnons par ces Presentes, voulons & nous plaît ce qui s’ensuit.

PREMIEREMENT.
Que l’Edit fait au mois d’Avril 1599 pour ledit desseichement vérifié au Parlement de Paris le 15. Novembre suivant, ait lieu & sorte son plein & entier effet, pour tous les susdits Associez & entrepreneurs, suivant leur Contract d’association, tout ainsi que s’ils étoient denommez en iceluy, selon les ampliations, modifications & interprétations contenues en nôtre presente Déclaration, & ce pour vingt ans, à commencer du jour que cette dite Déclaration aura été vérifiée en chacun Parlement.

II

Et pour autant que pour l’execution de cette entreprise profitable au public , nous reconnoissons qu’il faut un grand fond de deniers, & une continuelle assistance de personnes experimentées aux affaires : Nous avons déclaré & déclarons avoir ladite association pour agréable ; & permis & permettons à toutes personnes tant Ecclesiastiques, Nobles, Officiers que du tiers Estat, de quelque qualité qu’ils soient ou puissent être, d’être & entrer en ladite locieté, sans pour ce préjudicier ne déroger à leurs charges, dignitez , privilèges, exemptions, immunitez & autres prérogatives.

III.

Avons aussi permis & permettons ausdits entrepreneurs, de faire travailler audit desseichement & canaux navigables qui se feront esdits Marais, non seulement en vertu dud. Edit fait en leur faveur, mais aussi en vertu des contrats qu’ils ont faits ou pourront faire de gré à gré, avec tous Princes, Seigneurs Ecclesiastiques, Communautez, ou particuliers.- auquel cas les clauses & conventions portées & contenues par leurs Contracts seront entretenues, encore qu’elles ne fussent conformes au contenu dudit Edit, ains plus ou moins avantageuses pour eux , pourveu qu’il n’y ait rien esdits Contrats qui soit contre le droit public & les coutumes des lieux, que les particuliers sont tenus de suivre & garder.

IV.

Et d’autant que lesdits entrepreneurs associez nous ont fait entendre, qu’encore que leur intention soit de traiter de gré a gré avec tous les proprietaires & usagers desdits Marais pour l’achapt d’iceux, tant particuliers que communautez, il pourroit neanmoins avenir qu’eux ayans acquis en une même étendue & contenence la plus grande part du territoire, ceux à qui la moindre part appartiendroit, y feroient difficulté ou refus de traiter avec eux aux mèmes conditions des autres, qui y auroient le plus grand intérêt, ce qu’arrivant, ils seroient contraints de cesser leurs ouvrages, & quitter leurs marchez, pour ne travailler & faire de grands frais au profit d’autrui. Pour a quoi remédier, Nous avons ordonné & ordonnons, Que les proprietaires, usagers & autres pretendans droit ou intérêt esdits marais qui ne voudront s’accorder avec lesdits entrepreneurs, seront contraints par nos Juges des Sieges plus prochains, ou par les Commissaires qui a ce seront députez , de faire vente de leurs parts desdits marais, aux mêmes prix & conditions des autres qui y en auroient la plus grande part : si mieux ils n’aimoient laisser & quitter leursd. terres & marais pour leur juste prix & selon l’estimation qui en sera faite par lesdits Juges ou Commissaires par l’advis d’Experts.
Et ce qu’aura été ordonné par lesdits Juges ou Commissaires, tiendra & sera exécuté par provision, nonobstant prpositions ou appellations quelconques, sans que par dénonciation de nouvel oeuvre, complainte ou autrement, lesdits proprietaires ou usagers qui auront fait ledit refus, puissent empêcher ou retarder l’ouvrage entrepris ; pourveu que si lesdits proprietaires ou usagers choisirent de recevoir le prix, ils en soient payez & satisfaits par lesdits entrepreneurs, ou bien qu’ils ayent consigné deuement à leur refus, selon & ainsi qu’il sera ordonné par les Juges ou Commissaires.

V.

Et pour leur donner plus de courage d’entreprendre & de facilité d’executer ce dessein ; Avons encore ordonné, que tous materiaux comme briques, pierres, chaux, bois & autres semblables ; ensemble toutes sortes d’outils qui peuvent servir tant au desseichement des marais & terres inondées, qu’à la construction des échenaux, canaux navigables, ponts, escluses, & tous autres édifices & batimens qu’ils voudront faire esdits marais, concernans le desseichement d’iceux, seront & passeront libres & exempts du payement de tous péages, pontages, & toutes autres charges & contributions qui se payent aux passages, de quelque part que leur commodité soit, de les avoir & tirer, soit par eau, soit par terre ; de-quoi nous les avons exemptez & déchargez, exemptons & déchargeons par ces presentes ;& faisons tres-expresses inhibitions & deffenses à toutes personnes, d’exiger & prendre aucune chose d’eux pour ce regard.

VI.

Comm’aussi nous leur avons permis & permettons de faire venir toutes sortes de bestiaux, soit des autres Provinces de ce Royaume, ou pays etrangers, pour en peupler lesdits marais qui seront par eux desseichez, en payant neanmoins par eux les droits qui nous seront dûs és lieux & passages où ils sont établis, tout ainsi que tous nos autres sujets.

VII.

Et afin que lesdits entrepreneurs ne soient divertis de faire travailler au desseichement des marais & terres inondées, qu’ils auront acquises a quelque titre que ce soit, de crainte qu’elles soient retirées par les lignagers ou Seigneurs feodaux, aprés qu’ils les auroient mis en bonne nature avec beaucoup de peine & frais ; Ordonnons que le retrait lignager & seigneurial, n’aura point de lieu, pour les premieres ventes & aliénations qui seront faites ausdits entrepreneurs, sans préjudicier pour ce en autres cas aux droits desdits lignagers & seigneurs féodaux.

VIII.

Tous les marais, palus & terres inondées qui sont de nôtre Domaine, & seront desseichez par lesd. entrepreneurs en vertu dud. Edit, seront nobles & les déclarons dés à present de lad. nature & qualité pour joüir par lesd. entrepreneurs & ceux qui auront droit d’eux noblement en fief,& en toute Justice haute, moyene & basse, à la charge de les relever de nous & des droits qui nous devront appartenir à cause de ce, selon les coutumes des lieux où lesdites terres seront assises. Permettons neanmoins à chacun desdits entrepreneurs associez en particulier, de disposer de sa part, & la mettre en censive & roture si bon lui semble. Et pour le regard des terres qui sont en la Seigneurie, censive ou directe des communautez & seigneuries particulières, n’entendons y toucher ; mais voulons que ce qui aura été stipulé & convenu, par les contrats & traitez faits de gré à gré soit suivi & gardé.

IX.

Et afin que lesdits entrepreneurs puissent faire habiter & cultiver lesdits marais & terres inondées, qui seront par eux desseichées, leur permettons aussi d’y faire bâtir & construire des bourgs & villages, és lieux & endroits qu ils jugeront les plus commodes, & en iceux des Eglises parrochiales, & y établir des foires & marchez, pourvû qu’és jours ausquels se tiendront lesdites foires & marchez, il n‘y en ait à quatre lieues à la ronde.

X.

Dans lesquels bourgs, villages & terres desseichées, tous étrangers seront reçus, & y pourront habiter & construire maisons, cultiver les terres pour les rendre fertiles & en bon état, & y travailler, faire toutes sortes d’ouvrages, manufactures & trafic, ce que faisant ils seront tenus & réputez pour vrais & naturels François, pour jouir des memes droits, franchises & privilèges qu’eux ; Apres neanmoins qu’ils auront déclaré pardevanr nos Juges les plus prochains, ou desquels ressortissent lesdits lieux, qu’ils y élisent leur domicile & habitation ordinaire, & qu’ils auront pris un certificat de leur demeure ; qui leur sera délivré par les entrepreneurs, ou l’un d’eux. Lequel acte de leur déclaration susdite & certifi­cat, servira de lettres de naturalité en vertu des presentes, sans qu’il leur soit besoin d’autre expédition.

XI.

Lesquels étrangers naturalisez, après avoir travaillé audit desseichement, ou cultivé partie des terres desseichées trois ans continus, pourront se retirer si bon leur semble en autres lieux de la France, pour s’employer aux manufactures, négociations, trafic & labeur, sans pour ce perdre leurs privileges & naturalité.

XII.

Et pour inciter encore d’avantage lesdits étrangers à venir habiter & cultiver lesdits marais, terres desseichées, bourgs ou villages, construits par lesdits entrepreneurs : Voulons qu’ils demeurent exempts pendant vingt années de toutes tailles, pour les biens qu ils tiendront esdits lieux, non toutefois pour ceux qu’ils pourront acquérir és autres endroits du Royaume ; pour le regard desquels ils contribueront tout ainsi que nos autres sujets. Le semblable sera observé pour les naturels François, qui acquerront des biens & possessions esdits marais desseichez & réduits en culture & prairies. Et quant à la traite foraine, Nous les en avons aussi exemptez à perpétuité, pour toutes sortes de choses & denrées, tant grosses que menues, qui ne sont à present comprises en nos Fermes.

XIII.

Voulons en outre que ceux qui resideront esdits lieux soient exempts de toutes charges personnelles, comme Commissions de Justiice, Assiette & Collecte des Tailles, Charges des de Villes & Communautez, Guét & Garde des portes & places fortes, tutelles & curatelles, & autres semblables, sinon que ce soit pour & au dedans de l’étenduë desdits marais, terres desseichées, bourgs, & villages, construits par lesdits Entrepreneurs, au profit des personnes qui y demeureront, ou des enfans de ceux qui y seront decedez.

XIV.

Es Provinces & endroits où les Tailles sont réelles, & payées par les possesseurs, de quelque qualité qu’ils soient, pour les héritages tenus en roture, & non pour les héritages nobles, si lesdits Entrepreneurs y acquièrent quelque marais & terres inondées, qui auparavant leur acquisition n’étoient sujettes à aucune contribution, mais exemptées & tenues noblement, ils en joüyront avec la même immunité. Et pour le regard des marais & terres qui étoient roturieres, & n’avoient été exemptées que pour cette seule consideratîon, qu’elles ne rapportoient aucun profit aux possesseurs d’icelles étant mises en valeur ; la moitié sera exempte pour jamais desdites contributions, sans qu’elle puisse être comprise en rolle des tailles & cadastres qui se seront des héritages esdits lieux : Et l’autre moitié joüyra de cette exemption pour vingt ans seulemeut, mais ledit tems passé y sera assujettie, tout ainsi que les autres héritages de meme qualité & nature.

XV.

Avons pareillement ordonné que lesdits marais & terres qui auront été desseichées & mises en culture ne payeront aucunes dîxmes, soit aux Ecclesiastiques, ou autres Seigneurs seculiers qui les pourront prétendre, comme étans au territoire, dans lequel ils ont droit de lever & percevoir dixmes, & ce durant le tems de dix ans, à compter du jour que lesdits marais auront été réduits en culture, Lequel passé seront tenus les possesseurs desdits héritages les payer : mais à raison seulement de cinquante gerbes l’une, ores que les dixmes des Parroisses où lesdites héritages seront assis, ou bien des lieux circonvoisins, ayent accoutumé d’être payées à plus haut compte.

XVI.

Et sur ce que les Entrepreneurs nous ont remontré qu’ils feroient volontiers des canaux assez larges & profonds pour la navigation, és lieux & endroits où la commodité s’en offriroit, encore que cette dépense ne fût necessaire pour la perfection de leurs ouvrages, pour les inciter d’avantage de le faire, comme étant un travail qui doit être utile à tous nos sujets ;
Nous leur avons promis & accordé, apres que Iesdits ouvrages & canaux auront été faits, d’y établir des péages à leur profit & pour leurs successeurs à perpétuité, tels & ainsi que le jugerons raisonnable : ayant égard aux frais que lesdits Entrepreneurs auront fait pour les construire, à la dépense de l’entretenement & utilité publique.

XVII.

Et d’autant qu’ils feront ledit desseichement à leurs dépens, périls & fortunes, tous les comptes qu’ils auront à rendre pour raison de ce, seront rendus & examinez entr’eux memes, comme affaires particulières, sans qu’ils soient sujets à aucune reddition de compte pardevant nos Officiers, quels qu’ils soient, si bon ne leur semble.

XVIII.

Lesdits Entrepreneurs & tous ceux qui auront charge & pouvoir d’eux, soit pour arpenter lesdits marais qu’on voudra desseicher & mettre en culture, dresser les plans & figures, faire les allignemens & toutes autres sortes de marques concernans ledit desseichement & canaux navigables, pourront entrer, passer & repasser par les héritages d’autrui quand il sera necessaire, ou qu’ils ne pourront prendre ledit passage ailleurs qu’avec trop d’incemmodité ; à la charge toutesfois de payer de gré a gré l’intérêt du maître & proprietaire (si aucun intérêt y a eu ) s’ils ne s’en peuvent accorder, selon qu’il sera arbitré & jugé sommairement par le Juge ordinaire du lieu, ou les Commissaires qui seront par Nous à ce ordonnez : sans que pour raison d’esdits différens (s’il y avoit quelque longueur) l’ouvrage puisse être en aucune sorte empêché & retardé.

XIX.

Pourront lesdits Entrepreneurs, pour faire ledit desseichement, & la construction & entretien des canaux navigables & non naviga­bles, & des digues, levées, & escluses, ponts & autres ouvrages, dresser des Reglemens tels que bon leur semblera, pour leur commodité particulière : Mais s’ils en veulent obliger autrui & le public ils les mettront en mains des Commissaires, qui en feront leur rapport au Conseil, pour les y faire voir, considerer & autoriser, & jusques à ce ne pourront servir de loi & Règlement.

XX.

Et d’autant que les ouvrages d*eau, & les saisons de travailler aux marais & terres inondées, pour les desseicher & les garentir contre les inondations & débordemens de la mer & des rivières & des torrens, ne peuvent recevoir aucune demeure ne delai après la besogne commencée : Nous avons permis & permettons ausdits Entrepreneurs, de faire travailler audit desseichement & entretien d’icelui pendant les festes, que besoin sera , sauf & excepté les Dimanches, les quatre fêtes solemnelles, & fêtes de Nôtre-Dame & d’Apôtre ; pendant lesquelles leur travail cessera, selon & ainsi qu’il a ci-devant été ordonné par nos Edits.

XXI.

Sera aussi loisible ausdits Entrepreneurs de faire abbattre & ôter tout ce qui les pourroit empêcher ou retarder de faire ledit desseichement, comme les escluses, glacis, moulins & tous autres obstacles qui arrêteroient le coulement des eaux, & les empêcheroient de passer & continuer leurs tranchées, fossez, canaux, levées, ponts , chemins, & tous autres ouvrages necessaires pour l’execution de leur entreprise, en réparant neanmoins de gré à gré le dommage qu’ils feront à autrui„ & s’ils ne s’en peuvent accorder, en le faisant au préalable visiter par les Juges des lieux, ou Commissaires qui seront par Nous députez, pour connoître la commodité ou incommodité des choses, & en faire estimation, afin que lesdits Entrepreneurs dédommagent les particuliers interessez, selon & ainsi qu’il a été ci-dessus dit en l’Article 18.

XXII.

Et d’autant que par le moyen dudit desseichement, fait aux dépens, périls & fortunes desdits entrepreneurs, tous lesdits marais & terres inondées seront améliorées, & de beaucoup plus grande valeur, en telle sorte que la moindre partie vaudra plus que ne fait le tout à present. Nous avons ordonné & ordonnons qu’aprés qu’ils auront fait ledit desseichement, soit en vertu de l’Edit, ou en vertu des contrats & traitez faits avec les particuliers, la part qui leur appartiendra, sera & demeurera franche, libre & quitte de toutes dettes, douaires, engagemens, hipotecques, & autres charges & prétentions generalement quelconques, dont lesd. terres pourrorent etre auparavant chargées envers qui que ce soit sauf à ceux qui prétendroient droit d’hipotecque, ou autres, d’avoir recours sur la portion qui sera demeurée aux seigneuvs proprietaires, ou sur les cens, rentes & devoirs qu’ils se seront reservez.

XIII.

Et pour le regard des marais, palus & terres inondées, qui seront acquises par lesdits entrepreneurs à prix d’argent ; Avons ordonné pour l’utilité publique, & seureté desdits acquereurs, que l’hipotecque qui étoit sur lesdits marais, sera transmuée & remise sur les deniers en provenans, & à cet effet que les Créanciers seront colloquez sur iceux, suivant l’ordre de leurs hipotecques , & tout ainsi que si c’étoit un immeuble. Et a cette occasion seront tenus ledits acquereurs consigner & deposer le prix de leurs achapts és mains des Receveurs des Consignations, és lieux ou il y en aura : sinon és Greffes de la Jurisdidtion Royale la plus prochaine du marais aliéné : par autorité de laquelle les criées & proclamations seront faites, comme il est accoutumé en aliénations par decret des immeubles ; & ce à la diligence du premier des Creanciers qui en voudra prendre la charge, & si aucun ne le presente, à la diligence desdits entrepreneurs qui en auront fait l’achapt. Les frais desquelles diligences seront pris sur les deniers deposez ; puis au bout d’un an seront lesdits deniers délivrez au proprietaire, auquel ils doivent appartenir, ou distribuez par ordre d’hipotecque aux créanciers, si aucuns surviennent dans ledit tems : lequel tems passé, & lesdites proclamations faites en la forme susdite, lesdits entrepreneurs en demeureront valablement déchargez, sans que sous pretexte de minorité, absence ou autrement, l’on puisse plus s’addresser à eux ni ausdits marais & terres desseichées.

XXIV.

Et afin que ce qui aura été commencé par lesdits entrepreneurs, se puisse parachever selon leur intention, & que nuls autres ne les en divertissent ; Nous avons défendu & défendons à toutes personnes, sous peine de mil livres d’amende, (moitié de laquelle appartiendra audits entrepreneurs, & l’autre moitié à Nous, & de plus grande peine si elle y échet, débaucher ou faire débaucher les gens & ouvriers desdits entrepreneurs. Et avons ordonné & ordonnons, que les Etrangers qu’ils auront fait venir en France, ou auront commencé à travailler pour eux & à leurs attelliers, ne pourront de 3. ans après servir à autres, ne travailler à faire fossez & desseichemens en autres lieux, sinon du consentement desdits entrepreneurs & s’ils le faisoient, les pourront contraindre par Justice, de retourner à leurs attelliers, ou de se retirer hors du Royaume.

XXV.

Et pour donner plus de courage ausdits entrepreneurs de continuer leur dessein, déclarons être nôtre vouloir & intention de gratifier & honorer du tiltre de noblesse douze d’entre eux, choisissant ceux qui ne le sont point par leur naissance, que nous jugerons avoir plus de mérite, & contribuer d’avantage à la perfection desdits ouvrages ; à condition toutesfois que ceux qui auront été décorez de ce tiltre de Noblesse, ne feront après ledit annoblissement aucun acte dérogeant à ladite qualité ; nous reservans en outre d’accroître ci-aprés le nombre de douze, si nous jugeons que faire se doive.

XXVI.

Lesdits entrepreneurs, leurs gens & ceux qu’ils feront venir demeurer és terres qu’ils auront desseichées, & és Bourgs &. Villages qu’ils auront construits, pourront seuls privativement à tous autres par privilège special, pendant vingt-années, faire en iceux des fromages à ia façon de Milan, Turbes & Houilles de terres propres à brûler : comme aussi y faire venir de cannes de sucre, du ris & de la garance.

XXVII.

Comme encore nous avons permis & permettons ausdits entrepreneurs, leurs domestiques & commis, pour travailler audit dessleichement, de porter bâtons à feu au dits marais, proche & au long d’iceux, pour dix ans seulement ; esperant que dedans ledit tems, ils auront par leur soin, travail & advance, rendu lesdits marais peuplez & habitez, & par ce moyen qu’ils n’auront besoin d’autres armes & protection que de celles dont il est permis à nos autres sujets d’user.

Si donnons en Mandement à nos amez & feaux Conseillers les gens tenans nos Cours de Parlement, Chambres des Comptes, Cour des Aydes, Tresoriers generaux de France , Sur-Intendant général & grand maitre réformateur des eaux & forets de France, Sénéchaux, Baillifs , Prévôts, Vicomtes, leurs Lieutenans généraux particuliers, & à tous nos autres Justiciers & Officiers, & à chacun d’eux comme à soi apartiendra : Que le contenu en ces presentes ils fassent lire, publier & enregistrer, & le gardent, observent & fassent garder, observer & entretenir de point en point, selon sa forme & teneur, sans aller ne venir, ne souffrir être allé ne venu directement ou indirectement, au contraire, en quelque-sorte & maniere que ce soit ; Car tel est nôtre plaisir : Nonobstant quelconques Ordonnances, reglemens, restrictions, mandemens, défenses & lettres à ce contraires , ausquelles nous avons dérogé & dérogeons pour ce regard, & à la dérogatoire de la dérogatoire y contenue. Et pour ce que de ces presentes on pourra avoir affaire en plusieurs & divers lieux, Nous voulons qu’au vidimus d’icelles, fait par l’un de nos Secretaires ou par Notaires Royaux, foi soit ajoutée comme au present original ; auquel en témoin de tout ce que dessus, Nous avons fait mettre nôtre scel, sauf en autres choses nôtre droit, & l’autrui en toutes.

Donné à Paris au mois de Janvier, l’an de grâce 1607. Et de notre règne le 18.
Signé, HENRY. Et à côté , Visa. Et plus bas est écrit, par le Roy, De Lomenie. Et scellé sur double queue de cire verte en lacqs de soye rouge & verte. Et au dessous est écrit ce qui s’ensuit.

Registrées à Paris en Parlement, le 23 Août 1613.

Signé Voisin.

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