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1651 - 1652 - Samuel Robert raconte Saintes dans son Journal

jeudi 14 février 2008, par Pierre, 1613 visites.

Entre 1860 et 1862, en triant le dépôt d’archives de la Mairie et du Greffe du Greffe du Palais de Justice de Saintes, M. de la Morinerie découvrit des documents exceptionnels : les registres de l’état civil protestant de Saintonge des 16e et 17e siècles (voir ce document), et le journal de Samuel Robert (1651-1652), présenté ici.

Il décrit ici ce journal, témoignage de tout premier ordre sur la vie en France et à Saintes au XVIIème siècle.

Source : Bulletin de la Société de l’histoire du protestantisme français – Année 1861. - Books Google.

Le Journal de Samuel Robert a été publié dans son intégralité par la Société des Archives Historiques de Saintonge et d’Aunis dans le Tome XI de 1883, par Gaston Tortat. Ce document est accessible en ligne à la BNF. Accès direct d’un clic ici

Après quelques détails préliminaires sur le tribunal financier qu’on appelait Election, et sur la manière dont il était constitué, [M. de la Morinerie] continue en ces termes :

« Les premières charges de cette institution ont été occupées par des hommes de mérite et de savoir. Je me contenterai de citer :
Parmi les présidents : Henri Moyne, mort en 1645 ; - Moyse Marchais, sieur de Boisgiraud, maire de Saintes en 1667 ; - et surtout Pierre Vieuille, auteur d’un livre estimé sur la matière des élections : Nouveau Traité des Elections (Paris, 1739, in 8°)

Parmi les lieutenants criminels : Jean Regnaud, sieur du Peunouveau, maire de Saintes en 1633, beau-père de mon cinquième aïeul et grand-père du célèbre jurisconsulte Jean Dusault

Parmi les lieutenants particuliers, Samuel Robert, dont je vais parler…

La principale curiosité de ce dépôt est assurément un manuscrit in folio relié avec soin, d’une belle écriture du XVIIe siècle. Je m’étendrai sur son compte d’une manière toute particulière, non pas à cause de ce qu’il renferme, mais à cause du personnage dont il émane : c’est tout simplement un registre servant à l’inscription des affaires domestiques de Samuel Robert, lieutenant particulier de l’Election de Saintes en 1650.

Certes, l’intérêt de cette découverte est assez minime en lui-même, et je n’eusse point appelé l’attention sur ce manuscrit si, depuis longtemps, je n’avais vécu en grande communication avec son auteur, qui m’a semblé mériter une étude spéciale. Le premier, j’en ai déjà dit quelques mots dans mon travail sur Lussac (Paris 1858, in 8°) ; aujourd’hui je me propose d’en dire davantage : il ya une mémoire d’homme à retirer de l’oubli.

Samuel Robert était ce qu’on appelle un curieux. Il avait puisé le goût des choses littéraires chez son parrain, Samuel Veyrel. Il aimait à consigner dans sa correspondance, dans ses registres journaliers, les événements politiques de son temps, jusqu’aux circonstances les plus intimes de sa vie. A cette manie heureuse nous devons de précieux renseignements sur l’histoire de la province durant la Fronde pendant les années 1651 et 1652. Voici dans quelles circonstances Robert s’est fait chroniqueur sans y songer.

Le lieutenant particulier en l’Election, Etienne Augier, venait de mourir, laissant pour héritière une fille, Jeanne, mariée à Alexandre de Rabar, conseiller au parlement de Bordeaux. En 1650, Samuel Robert acheta de M. de Rabar l’office de son beau-père, et se mit en mesure de faire procéder à sa réception ; mais il était huguenot, et le clergé combattit son admission de la manière la plus violente. Notre futur lieutenant particulier se rend à Paris ; il sollicite et obtient plusieurs arrêts de la cour des aides qui, nonobstant les oppositions du clergé, prescrivent à la chambre de l’Election de le recevoir en son office. Les arrêts de la cour n’arrêtent point les difficultés. Il faut porter l’affaire jusqu’au conseil privé.

Pendant son séjour dans la capitale, Samuel Robert entretient ses ami de Saintonge de toutes ses démarches ; il note les bruits de la cour et de la ville, et ses remarques nous initient à de curieuses révélations sur ces temps de troubles.

Revenu au pays, il continue de tenir au courant le brouillon de sa correspondance, qui devient de plus en plus abondante en détails. Il écrit tout ce qu’il voit, tout ce qu’il entend ; il suit à la piste les marches et les contremarches des armées du Roi et de la Fronde. Il a l’œil ouvert sur les préparatifs du comte du Daugnon, et tout ce qu’il rapporte peint à merveille le caractère à double face de ce personnage. Il nous montre en scène le prince de Condé, le comte d’Harcourt, le duc de Tarente, La Rochefoucauld, Saint-Simon, Richelieu, Bellière, du Vigean, Matha, Jonzac et Balthazar. Les événements se pressent sous sa plume : il nous fait assister aux deux capitulations de Saintes, à l’arrivée des Espagnols en cette ville, à l’horrible saccagement de Pons, à la destruction de Moëze, aux sièges de Cognac, de Saint-Jean d’Angély, de Tonnay-Charente, de Brouage et d’autres lieux de la province, au combat de Montanceys, en Périgord.

Puis au milieu de ces grandes figures et de ces actions mémorables se détachent le caractère impassible de Samuel Robert, ses querelles de ménage, ses débats avec sa femme, - Xantippe, comme il la surnomme dans son langage de mari, - Mademoiselle Merlat, comme je l appelle en historien désintéressé.

Cette correspondance que je me suis proposé bien souvent de faire connaître aux amis de notre histoire provinciale est l’un des plus curieux manuscrits de la bibliothèque de mon ami Eschassériaux. Si mon cher confrère en bibliographie saintongeaise se décide un jour à la publier, je lui offre de placer au frontispice l’étude que j’ai faite sur notre lieutenant particulier.

Je reviens maintenant au manuscrit du greffe. Il se divise en deux parties. Voici le titre de la première :

Au nom de Dieu soyt. Ce second papier et journal contient toutes les affaires, tant généralles que particulières, qui concernent nostre maison, et qui sont mantionnées dans mon premier, commancé le 1er de novembre 1639, ayant pour celuy-cy un mesme zelle, et invoqué le Sainct-Esprit pour la conduite d’icelles, que je prie Dieu qu’elles finissent avec son assistance, auxquelz papiers je désire et entandz qu’il soyt adjousté foy en tout et partout, comme estant le contenu en iceux véritable, pour d’autant plus l’asseurer ainsy à ceux qui y auront intérest que je l’ay de rechef escript et signé de ma main, par justes considérations qui m y ont meu. Ce 1er jour d’octobre 1647

ROBERT

La seconde partie du manuscrit porte

A. N. de D. S. C’est l’estât ou mémoire particulier de toutes les affaires qui nous concernent, suivant les temps qu’elles se sont passées et advenues

L’énoncé de la première partie du manuscrit révèle l’existence d’un précédent volume. J’ignore ce qu’est devenu celui là, mais celui qui nous reste, écrit de la main de Samuel Robert, d’une belle et solide écriture, sans présenter l’intérêt soutenu de son journal épistolaire, n’est pas dénué de valeur historique. Les affaires particulières ne lui ont pas entièrement fait oublier les affaires générales. Sa généalogie, sa descendance, l’administration de sa fortune, son voyage à Paris, ses querelles avec « Xantippe » coudoient les nouvelles et les événements du jour. Je retrouve consignés sur les feuillets de cet agenda bon nombre de faits détaillés dans sa correspondance et qui les éclairent.

Après avoir donné quelques détails sur les neuf autres divisions formées par lui, M. de la Morinerie conclut son rapport en exprimant le vœu que le nouveau Palais de Justice de Saintes offre une hospitalité convenable à ces archives de l’ancienne sénéchaussée, et il rappelle à qui de droit combien il importe de veiller à la conservation de ces précieux témoins du passé.

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