Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

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1683 - Factum contre les Prétendus Réformés de Gémozac

jeudi 29 novembre 2018, par Pierre, 201 visites.

Factum : Récit de l’une des parties, destiné aux juges, exposant sommairement les faits d’un procès. Il s’agit ici d’argumentaires en faveur de la partie catholique (Diocèse de Saintes), contre les Protestants.

Le dé-tricotage de l’Edit de Nantes, pendant les règnes de Louis XIII et de Louis XIV, se fait de différentes manières :
- par l’usage de la justice Royale, ce qui nous donne des dossiers d’argumentaires (factums) pour aider le clergé du diocèse de Saintes à lutter contre les protestants ;
- par l’usage de la force : dragonnades, mises au couvent, envoi aux galères, etc.

L’intérêt de ces "Factums" est la description de la situation locale du protestantisme pendant les règnes de Henri IV, Louis XIII et Louis XIV, avec les noms et les rôles des acteurs locaux, lorsque cela est utile à l’argumentaire..

Source : Factums pour le syndic du clergé du diocèse de Saintes contre les prétendus réformés de Saintonge, sur le sujet des temples et des exercices publics de leur religion qu’ils ont établis dans le diocèse de Saintes, par contravention aux édits. - 1683 - BNF Gallica

Voir ici une page de synthèse sur les 41 factums en cours de publication sur ce site. On y trouve la liste des lieux concernés par un Factum, et les références réglementaires sur lesquelles s’appuie le rédacteur, Monseigneur de Châteauneuf.

GEMOSAC

FACTUM
Pour le Syndic du Clergé du Diocese de Saintes, demandeur.
Contre les Prétendus Reformez de Gemosac, défendeurs,

Le Syndic du Clergé de Saintes demeure d’accord, que les P. R. de Gemosac ont fait exercice public de leur Religion dans leur Bourg, & y ont eu un Ministre residant pendant quelques années, long-temps avant l’Edit de Nantes, & mesme avant celuy de Poitiers. Mais il soutient qu’ils ne sont point aux termes ni de l’Edit de Nantes, ni de celuy de Poitiers, ne donnant point de preuve d’un exercice établi & publiquement fait audit lieu de Gemosac dans le temps requis par l’un & l’autre Edit.

L’Edit de Poitiers donné au mois de Septembre de l’année 1577. permet art. 7 aux Prétendus Reformez de faire & continuer l’exercice de leur Religion en toutes les Villes & Bourgs ou il se trouvera publiquement fait le dix-septieme jour du mois de Septembre. Si ceux de Gemosac veulent maintenir leur exercice en vertu de cet Edit, ils doivent au moins prouver, qu’au mois de Septembre de cette année 77. il y avoit exercice de la R. P. R. établi & publiquement fait dans leur Bourg. Mais c’est ce qu’ils ne prouvent point ; & dans tous leurs titres il n’est point parlé du mois de Septembre de cette année 77.

Dans la pièce produite sous cotte A , ils rapportent deux baptesmes faits en l’année 77. l’un du 1. Janvier, & l’autre du 10. du mesme mois.

Le Syndic répond, que deux baptesmes faits au mois de Janvier de l’année 77. ne sont point des preuves d’un exercice établi & : publiquement fait au mois de Septembre de cette mesme année.

Sous cotte G. ils produisent une quittance du nommé Allais, dans laquelle il se qualifie Ministre du Saint Evangile en l’Eglise de Gemosac, Saint Germain & Saint Fort, & confesse d’avoir reçu des Freres de l’Eglise de Gemosac la somme de cent cinquante livres, tant pour l’année passée 1577. que pour la moitié de la presente 1578. écheue la demie année le premier jour d’Avril : de laquelle quittance les defendeurs veulent que l’on infere, qu’il y a eu exercice à Gemosac en Septembre 1577 puisque ce Ministre a esté payé des gages qui luy estoient deus pour l’année 77.

Mais le Syndic répond,

1. Que cette quittance est une piece informe, estant sans date ni du jour, ni du lieu, auquel elle a esté faite, & par consequent ne peut point faire de foy en Justice.

2. Que ces termes, tant pour l’année passée 1577. ne marquent pas necessairement qu’au mois de Septembre de cette année 77. ce Ministre ait exercé à Gemosac publiquement son ministere : il faudroit apporter quelque acte d’exercice de la R. P. R. fait à Gemosac au mois de Septembre de cette année 77. Mais les défendeurs ne produisent aucun acte semblable ; & de plus, il est aisé au Syndic de faire voir qu’il leur estoit impossible d’avoir au mois de Septembre de l’an 77. exercice public de leur Religion, parce qu’au mois de Février de ladite année il fut interdit dans tout le Royaume. Tous les Ministres furent bannis, & les armées du Roy vinrent fondre en Saintonge aux mois de Juin, Juillet, & Aoust, pour faire exécuter cette interdiction, qui ne fut ostée que par la publication de l’Edit de 1577. laquelle ne fut faite qu’en Octobre de ladite année. De sorte qu’au mois de Septembre de cette année 77. les défendeurs ne pouvoient pas faire exercice public de leur Religion , ils estoient environnez de troupes qui n’auroient pas manqué de donner la chasse à leur Ministre, & qui les auroient bien empesché de s’assembler.

Quant aux années 1596. & 97. jusqu’à la fin d’Aoust, requises par l’Edit de Nantes, les titres produits par les défendeurs & leur inventaire, portent leur condamnation : parce qu’ils font voir que leur exercice cessa au commencement de 1597. & qu’il n’y en eut point, du moins depuis la fin de Février de ladite année, jusqu’en 1603. n’ayant pû durant ces six ans avoir de Ministre, soit à raison de leur pauvreté, soit à raison de la disette des Ministres, & ne s’estant pas mis en peine durant ces six ans d’en avoir. Cela estant, il est clair que leur exercice n’est pas aux termes de l’article 9, de l’Edit de Nantes, lequel demande un exercice établi & fait publiquement par plusieurs & diverses fois en l’année 1596 & en l’année 1597 jusqu’à la fin du mois d’Aoust.

Le Syndic prouve clairement ce qu’il avance,

En effet, le nommé Roberson, leur Ministre, mourut sur la fin du mois de Février 1597. L’inventaire du 8. Mars de ladite année, de ses meubles, fait après son décès, remis par les défendeurs sous la cotte P. ne souffre point que l’on doute de cette vérité.

Or après la mort de Roberson, ils furent sans Ministre jusqu’au premier de May 1603. auquel le nommé Gabard commença d’estre leur Ministre.

C’est eux-mesmes qui avouent cette vérité dans l’inventaire de leurs pièces, où page 15. ils parlent en ces termes : Après le décès dudit sieur Roberson, ladite Eglise de Gemosac fut servie par le sieur Gabard, Minislre en l’année mil six cens trois, & continua jusqu’en mil six cens treize. Ils avouent donc que ce fut seulement en 1603. que Gabard commença à estre leur Ministre, & qu’il fut le premier Ministre qu’ils eurent après la mort de Roberson.

La mesme vérité paroist encore par leurs titres, dans Iesquels l’on voit non seulement qu’ils furent sans Ministre après la mort de Roberson durant six ans, mais encore qu’ils ne se mirent point en peine d’en avoir, ni d’en demander à leurs Synodes.

En 1597. leur Synode Provincial s’assembla à la Rochelle le 7. May. Roberson leur Ministre estant déjà mort, du moins depuis deux mois, bien loin de demander un Ministre au Synode, ils n’y députèrent pas mesme aucun Ancien.

En effet, dans la table dudit Synode par eux remise sous la cotte Q. on lit ces mots, l’Eglise de Gemosac & de Saint Germain absente.

Dans leurs titres il n’est point parlé ni de l’an 1598. ni de l’an 1599. quoi-qu’ils ayent affecté de produire quelque titre, & pour les années qui les precedent, & les autres qui les suivent : d’où il faut inferer, estant d’ailleurs certain que leur Ministre estoit mort en Février 1597. qu’ils furent ces deux années sans Ministre, de par consequent sans exercice.

En 1600. leur Synode s’assemble à Savion [Saujon] le 11. Avril : ils ne luy demandèrent point de Ministre, de mesme n’y députèrent aucune personne. Aussi dans la table dudit Synode par eux remise sous la mesme cotte Q il n’y a ni Ministre, ni Ancien pour Gemozac ; mais seulement ces mots, L’Eglise de Gemozac mise parmi les absences.

Mais dans la Deliberation de ce Synode par eux aussi remise sous la mesme cotte Q l’on voit la véritable raison pour laquelle ils ne députoient aucun aux Synodes. C’eft que la veuve de Roberson s’y rendoit pour les y faire condamner à luy payer les arrerages dus à son mari.

Le Synode neanmoins, sur la plainte quelle fit, ne laissa pas de nommer deux Ministres & deux Anciens, pour voir & : arrester les comptes de ladite veuve avec ceux de Gemozac & S. Germain.

En 1601. leur Synode s’assemble à Jonzac le 28. Février : ils n’y demandent point de Ministre, n’y députent aucun ; & dans la table par eux remise sous cotte Q iI n’y a que ces mots l’Eglise de Gemozac mise parmi les absentes.

En 1603. le 1. de May, le nomme Gabard commence d’estre leur Ministre : c’est luy-mesme qui nous l’apprend dans la quittance qu’il donna le 4. juillet 1606. produite par les défendeurs sous la cotte R. où il dit en termes exprès, que sa première année commença le 1. May 1603.

Il nous l’apprend encore dans une autre quittance du mesme jour remise sous la mesme cotte, où il dit que fa seconde année commença le 1. jour de May 1604.

Il est donc certain que les defendeurs furent sans Ministre & sans exercice, du moins depuis le 1. de Mars 1597. jusques au 1. de May 1603. Ils ne sont pas donc aux termes de l’article 9. de l’Edit de Nantes qui demande un exercice fait jusques à la fin d’Aoust 1597- l’ayant perdu six mois auparavant, & n’ayant pu le rétablir que six ans aprés.

Pour ces raisons, le Syndic espere de la justice de Sa Majesté, & de celle de Nosseigneurs de son Conseil que l’exercice public de la R. P. R. sera interdit à Gemosac, & le Temple où il se fait (basti seulement depuis l’année 1620) condamné à estre démoli jusques aux fondemens.

Monseigneur DE CHASTEAU-NEUF, Rapporteur

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