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1784 - Le testament d’Armand Antonin François Frétard de Gadeville

mardi 1er août 2006, par Pierre, 2033 visites.

Au terme d’une longue carrière dans la Marine Royale (voir cette page), avec un épisode difficile aux Indes Françaises en 1766 (voir cette page), Monsieur Frétard de Gadeville rédige son testament. Plusieurs passages de ce document nous interpellent ...

Voir aussi la généalogie de M. Frétard de Gadeville

Source : Archives Départementales 17 - Fonds Frétard-Chesnel (20J) - Transcription : P. Collenot

TexteCommentaires
Au nom de la très Sainte Trinité. Amen

Je soussigné moi Armand Antonin François Frétard seigneur de Fouras [1] demeurant actuellement à Paris rue des Francs Bourgeois Saint-Michel [2] paroisse Saint-Sulpice, considérant que n’étant pas jeune et que ma santé devient plus mauvaise de jour en jour et ne voulant pas mourir sans avoir mis ordre à mes affaires et désirant prévenir toute espèce de discussion entre mes héritiers après ma mort, je me suis déterminé à faire le présent testament dont les clauses seront ci-après expliquées, et je veux et entends que le présent testament qui contient mes dernières volontés soit exécuté dans toutes ses parties après ma mort.

- Je révoque et annule tout testament et codicille ou autres actes de ce genre que j’aurais pu faire jusqu’à ce jour, notamment le testament que j’ai fait à la fin de 1775 qui a été reçu par Rouen et Nau notaires au Châtelet et qui est entre les mains de Me Rouen.

- Je recommande mon âme à Dieu, le priant de me pardonner mes offenses et de recevoir mon âme dans son saint paradis.

- Je désire être enterré sur la paroisse où je décéderai et m’en rapporte pour mes funérailles que je désire être des plus simples à la prudence de mes exécuteurs testamentaires ci-après nommés.

- Je donne et lègue aux pauvres de la paroisse de Fouras afin qu’ils prient Dieu pour moi, la somme de 100 livres une fois payée [3], laquelle aumône leur sera distribuée par le sieur Naud mon régisseur et non par d’autres, et comme il pourroit arriver que le sieur Naud mourroit avant moi, je charge mes héritiers de faire eux-mêmes personnellement et manuellement la distribution suivant leur prudence ou celle du régisseur s’il me survit.

- Je donne et lègue au sieur François Naud mon régisseur une pension viagère de 400 livres sa vie durant pour lui témoigner combien je suis satisfait de son attachement pour moi et des peines qu’il a pris dans la régie de Fouras ainsi que du désintéressement qu’il a toujours montré pendant sa régie, et si après ma mort on vouloit lui ôter la régie de la terre de Fouras et lui substituer un autre régisseur, je veux et j’entends que ladite pension de 400 livres soit augmenté de 200 livres et portée à 600 livres pour en jouir pendant sa vie.

- Je donne et lègue au nommé Millet qui est de la paroisse du Maine, une pension viagère de 200 livres pour en jouir pendant sa vie, je lui donne en outre ma dépouille et garde-robe avec mon linge de corps excepté le linge de coton, à cela près il aura tout ce qui servait à ma personne comme bas, souliers, chapeaux &c ; nous ne serons compris dans le dit legs mes épées, pistolets, montres &c ; le dit legs n’aura cependant lieu que dans le cas où le dit Millet seroit à mon service le jour de mon décès et s’il n’y étoit pas, le legs sera et demeurera nul et caduc.

- Je donne et lègue au nommé Derlia indien mon esclave que j’ai affranchi et qui demeure chez Mme de Vassoigne ma soeur, une pension viagère de 100 livres pour en jouir pendant sa vie.

- Je donne et lègue à chacun des tenanciers de Fouras tous les arrérages échus jusqu’à ma mort des différents articles de cens et rentes qu’ils me devront alors et dont la totalité pour chaque tenancier et chaque année n’excédera pas quatre livres, à l’effet de quoi il leur sera donné quittance sans frais par mes héritiers, mon intention n’étant point de faire pareille remise à ceux de mes tenanciers et censitaires qui doivent au-dessus de quatre livres de cens et rentes par an.

- Je donne et lègue à Marguerite Fabre qui a été ma gouvernante pendant plusieurs années une pension viagère de 800 livres pour en jouir pendant sa vie, laquelle pension de 800 livres sera prise sur une obligation de 24 000 livres que feu Monsieur le Comte d’Hérouville m’a passée sous le nom de ladite Marguerite Fabre, laquelle obligation a été reçue par M . Brichard notaire au Châtelet de Paris et dont l’expédition se trouve entre les mains de M. Parmentier mon procureur au Châtelet chargé pour moi d’en poursuivre le remboursement ; ainsi je veux et entends que ladite pension viagère de 800 livres ne soit prise que sur le produit de cette obligation de 24 000 livres et lorsque ladite obligation sera payée.

- Je nomme et institue mes légataires universelles la dame Marie-Louise-Élisabeth Frétard comtesse du Mesnil Simon et dame Marie-Louise-Anne Frétard épouse de M. François Elie de Vassoigne [4], mes sœurs, en toute propriété de mes biens meubles et effets, acquêts, conquêts et immeubles et propres en telles coutumes qu’ils soient situés et ce jusqu’à la concurrence de ce que chacune desdites coutumes me permet de disposer.

- Je veux et entends que dans le cas ou ma sœur Mme de Vassoigne précéderait son mari, celui-ci prenne et lève sur les biens de sa femme une somme de 1500 livres chaque année pour en jouir sa vie durant et après la mort de M. de Vassoigne j’entends que lesdites 1 500 livres de pension viagère passent à M. de Faye capitaine de vaisseaux pour en jouir à perpétuité.

- Je nomme pour mes exécuteurs testamentaires conjointement monsieur le marquis de Luker mari de ma cousine de Sainte Hermine [5] et M. le marquis de la Faye capitaine de vaisseaux et je prie M. le marquis de Luker d’accepter mes livres, tableaux, estampes, mes pistolets et épées.

- Je prie de même monsieur le marquis de la Faye d’accepter un diamant de la valeur de 6000 livres.

- Je prie M. le chevalier de la Faye d’Amberas de recevoir de mes héritiers un diamant de la somme de 3000 livres.

- Je dois aux héritiers du nommé Dionnet mon domestique mort à Rouen la somme de 360 livres ; il était de la paroisse de saint André en Forest ; je recommande à mes héritiers de les découvrir et les payer.

- Je crois n’avoir pas payé ma portion de quelques petites dettes de feu mon père dont 60 livres à Pons et une robe à Saint-Jean d’Angély ; comme mes sœurs ont je crois payé leur quart, je les prie de vérifier si j’en ai payé et de payer sur-le-champ.

A Paris le 1er juin 1784 signé Armand Antonin François Frétard de Fouras.

Déposé à Me Brichard notaire à Paris.

Par ordonnance de Monsieur le lieutenant civil du 2 mai 1786
Derlia indien mon esclave que j’ai affranchi

La carrière de M. Frétard dans la Marine Royale l’a fait servir au Québec, en Louisiane, aux Antilles, aux Indes Françaises et peut-être en Guyane Française.

Dans le langage du 18ème siècle, on appelait "Indiens" les habitants de plusieurs de ces pays où a navigué M. de Gadeville.

Il n’est pas simple de déterminer de quelle partie du monde Mr de Gadeville a ramené avec lui cet indien Derlia, d’autant qu’au 17ème et 18ème siècle l’esclavage (aboli en 1848) avait déplacé des dizaines milliers d’indiens (de l’Inde), en particulier aux Antilles, pour la culture de la canne à sucre.

L’indien Derlia ramené par M. de Gadeville a vécu chez sa sœur, Marie-Louise-Anne Frétard épouse de M. François Elie de Vassoigne. Elle résidait à cette époque à Saintes (Charente-Maritime), et peut-être occasionnellement dans la propriété de Chatenet à Brie-sous-Matha (Charente-Maritime) dont elle avait hérité.

Les recherches menées pour essayer de préciser l’origine de l’indien Derlia ont abouti, 5 ans plus tard.

L’esclave Derlia - Une énigme résolue grâce à un visiteur du site, 5 ans après.


La bouteille avait été lancée à la mer avec son message le 1er août 2006.

5 ans plus tard, un visiteur du site l’a trouvée et vient de communiquer la réponse. Émouvant ... Merci à Pierre H. Boulle pour cette contribution tout à fait passionnante.

Origine de Derlia, l’esclave indien affranchi d’Armand Antonin François Frétard de Gadeville

29 avril 2011 - 16:56, par Pierre H. Boulle

Dans son commentaire sur le testament de Frétard de Gadeville (1784), l’auteur Pierre note qu’"il n’est pas simple de déterminer de quelle partie du monde Mr de Gadeville a ramené avec lui cet indien Derlia." Les listes de passagers venus de partis vers les colonies (série F/5B, aux ANOM d’Aix-en-Provence ; microfilm aux AN, Fonds des Colonies, à Paris) nous donne une indication précieuse :

Le Prince-de-Conty, venu de l’Ile de France (Ile Maurice) et désarmé à Lorient le 8 sept. 1756, indique parmi les passagers (F/5B/20) : "Derlia, noir maratte, domestique de M. de Gadeville, capitaine de troupes". Ce dernier est indiqué comme ayant débarqué à la Corogne le 12 avril 1756, et l’on peut supposer (bien que ce ne soit pas indiqué) qu’il était accompagné par Derlia.

Derlia est donc un indien maratte (voir ci-dessous) ; il est probable qu’il ait été acheté aux Indes, lieu du service de M. de Gadeville. Toutefois, il se peut qu’il ait été obtenu à l’Ile de France avant le départ du Prince-de-Conty .

Indiens Marattes


Dictionnaire géographique portatif, par M. Vosgien, 1789 :

Marattes, peuple de la presqu’île occidentale du Gange, redoutable aux Anglais et aux Mogols ; ce sont des voleurs, mais qui volent avec modération, afin de pouvoir retrouver quelque chose, lorsqu’ils y reviennent. Aujourd’hui ils ont étendu leur domination sur le bord de la mer, depuis Surate jusqu’à Goa.

Dictionnaire de Géographie Universelle, Boiste, 1806.

Marattes, peuple de la presqu’île de l’Inde, à l’occident du Gange, guerrier et redoutable au milieu du 14e siècle ; restes de la caste militaire des anciens Indiens, formèrent une nation ; furent sujets de l’empire de Décan : empire partagé en 2 parties ; l’O. a pour capitale Poonah, résidence du peishwa, ci-devant ministre militaire du Grand-Mogol, reçoit l’hommage de chefs indépendants ; l’Est ou Berar, a pour capitale Nagpour ; ceux de Poonah sont divisés en 5 gouvernements, 3 au N. et 2 au S. de Poonah : en général tout cet empire de l’Inde forme une confédération ressemblant à l’Empire germanique ; ceux du Bérar ont une partie de la côte d’Orixa : pays très montagneux ; la chaîne de montagnes qui part du Cap Comorin a une pente très rapide jusqu’au sommet qui forme un plateau uni et une plaine immense où les Marattes élèvent et exercent leurs chevaux ; le territoire produit différentes sortes de légumes : riz en abondance dans le Concan, raisin, grenades, melons d’eau, mangues et poires ; commerce de perles venues de Moka et de Jiodah ; tirent leurs soies du Bengale ; manufactures peu perfectionnées de drap blancs, chinets ou toiles peintes et turbans ; les Marattes sont robustes et moins basanés que les Indiens ; ont une nombreuse cavalerie redoutée des Indiens ; préfèrent le butin au fruit du travail, et ravagent les contrées voisines ; les Français et les Anglais les ont souvent employés dans leurs guerres ; les Anglais leur ont cédé les districts de Soouda et d’Arponelly : Holkar, chef maratte, lutte seul et avec avantage contre les Anglais ; il a des Français auxiliaires.


[1Charente-Maritime

[2une partie de l’actuelle rue Monsieur le Prince (6ème arr.), siruée entre le carrefour de l’Odéon et le boulevard Saint-Michel

[3en un seul versement

[4Elie-François de Vassoigne, écuyer, sgr de Beauchamp, chevalier de Saint-Louis, ancien capitaine au régiment de la Sarre - Né 9 septembre, baptisé 7 octobre 1726 à Grassac - A épousé dans l’église des Bénédictines de Cognac (reg. St-Léger), le 2 mai 1770, Marie-Louise-Anne Frétard de Gadeville, dame de Brie, fille de Jean, chevalier, seigneur de Brie, Fouras, Ecoyeux, et Marie-Elisabeth Chesnel.

[5Marie-Angélique de Sainte Hermine, (fille de Louis-Clément de Saint-Hermine, seigneur de Mérignac et de Coulonges. et d’Elisabeth de Maulévrier, dame d’Agonnay), mariée avec Edouard-Jean, marquis de Luker, chevalier de Saint-Louis, ancien colonel du régiment de Bourbon-infanterie.

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