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Benon (17) et son Comté, par Louis-Etienne Arcère (1698-1782)

vendredi 6 février 2009, par Pierre, 2068 visites.

Un château et une abbaye (la Grâce-Dieu) ruinés, une forêt (la sylve d’Argenson) en voie de disparition : l’histoire du comté de Benon est un peu déprimante. Mais Arcère est une mine de références. Heureusement, car il est probable que la plupart de ces sources ont également disparu, depuis 1754.

Voir : Carte satellite des lieux décrits par Louis-Etienne Arcère

Source : Histoire de la ville de la Rochelle et du Pays d’Aulnis - Louis-Etienne Arcère - La Rochelle - 1756 - Books Google

Le Comté de Benon

Benon est un Bourg situé dans une plaine, ayant des prairies au Sud & à l’Oues. On compte 220 feux dans l’étendue de la Paroisse dont le fond est assez ingrat. Benon s’appelloit autrefois Benao, Benaon, Banaum, Bennon. Il y avoit un Château qui a soutenu plusieurs sieges. Ce Château actuellement ruiné, étoit de figure ovale. Le corps de la place n’étoit flanqué que par une tour ronde qui subsiste encore : il avoit deux enveloppes & trois fossés.

Le Château de Benon fut bâti dans l’onzième siecle par un Duc d’Aquitaine. Anno 1096, Gulielmus Aquitanorum Dux apud Castellum novum meum Banaum [1]. Il fut assiégé pour la première fois, par le Connétable du Guesclin qui l’enleva aux Anglois. En 1569, il fut pillé entièrement [2]. « Monsieur de Rohan, pere de celui qui est de présent dit M. de la Rochelle », s’en empara. Enfin en 1593, il fut réduit en cendres, avec les meubles des habitans de la Paroisse & des lieux circonvoisins.

Il y avoit autrefois à Benon une Léproserie, comme il appert par un titre [3] de 1264. Quiqtavimus in perpetuum dicta Abbatiae duos solidos censuales quos debent Leprosi de Beneone... prope domum Leprosorum praedictorum. Dans la Paroisse de Benon les impositions se payent difficilement, ce qui vient en partie des droits d’inspection sur les boissons, auxquels cette Paroisse est sujette. Elle renferme une vaste étendue de marais nommés Marais-le-Roi, lesquels sont la partie la plus orientale des marais de l’Aulnis.

Benon étoit autrefois enveloppé dans une grande forêt qui subsiste encore en partie. Une portion de cette forêt (Bois-l’abbé) fut donnée à Saint Bernard, pour y fonder un Monastere (la Grace-Dieu). Une Charte [4] nous en désigne la position, entre les deux chemins de Mauzé à Cramahé, & de la Leigne à Benon. La forêt de Benon étoit-elle cette forêt connue dans les anciens titres, sous le nom de Argenchum, de Argenconio, de Argentonio, ou la forêt de Chizé, près de Beauvais-sur-Niort, comme quelques-uns le prétendent ?

1°. Richard, Duc d’Aquitaine, fils d’Eleonor, confirme les dons faits par ses ancêtres à l’Aumônerie de Surgeres. Cette Maison Religieuse pouvoit prendre dans la forêt, Argenconio, le chauffage & le bois nécessaire pour les réparations des bâtimens. Or dans les Lettres rovaux de Charles VII. en 1447 au sujet de ce droit qu’on disputoit à l’Aumônerie de Surgeres [5], il est dit que le droit de prendre dans la forêt du Comté de Benon, la provision de bois nécessaire, est un droit bien acquis à cette Aumônerie. La même année il fut rendu un Arrêt en faveur de l’Aumônerie de Surgeres, lequel adjugea par provision de droit & d’usage, le chauffage en la forêt de Benon : cette forêt par conséquent devoit être la foret de Argenconio [6], puisque c’étoit dans cette ancienne forêt que les Frères de l’Aumônerie étoient usagers, in bosco Argentonio, dicti actores, inter caetera jura ad eos pertinientia jus habebant in foesta dicti Comitatus de Benon.

2°. Eleonor, mere de Richard concéda en 1200 aux Religieuses de S. Bibien d’Argenconio leur chauffage dans la même forêt. Mais ce Monastere étoit situé au midi de la forêt de Benon : on en trouve les ruines dans la Paroisse de Vouhé. Cette forêt d’Argenconio est identifiée avec la forêt de Benon dans un aveu & dénombrement [7]. « Ce sont les chouses que les Religieuses, Abbesse & Convent de Fontevrault & le Prieuré de S. Bibien du boys d’Argencon, tiennent en la Jurisdiction de Benon, à cause du Prieuré dudit lieu de S. Bibien. »

3°. Les Titres de l’Abbaye de la Grace-Dieu nous en fournissent encore des preuves. Il est dit dans une Charte d’Othon : concedimus atque confirmamus quod Fratres de Gracia Dei accipiant in perpetuum de lignis in foresta de Argencum etiam in defensis quae dicuntur Epaux, & ces Epaux sont dans la forêt de Benon. Et dans une autre Charte de Philippe le Bel [8] : Religiosi viri Abbas & Conventus Monasterii Gratia Dei, Cisterciensis ordinis Xantonensis Dicecesis, usagio quo ipsi ratione dicti Monasterii habebant & habent in foresta nostra de Benaon. Il est donc certain en rapprochant ces deux Chartes qu’Argenchum & la forêt de Benon n’étoient qu’une même forêt.

La Terre de Benon a titre de Comté & non de Baronnie, c’est une faute à corriger dans l’Etat de la France, tom. 4, pag. 195 [9]. Ce Comté comprend les quatre Baronnies de Nuaillé , de Mauzé , de Pauleon, de Surgeres, & un très-grand nombre de Paroisses, plusieurs desquelles ne sont qu’en partie dans sa mouvance. La Terre de Benon étoit autrefois du ressort de Saint-Jean-d’Angély ; elle en fut détachée par Charles V. & enclavée dans le Gouvernement de la Rochelle [10], le 24 Novembre 1374. Benon appartenoit anciennement aux Ducs d’Aquitaine. La Reine Eleonor dont le pere avoit usurpé la Rochelle sur Isambert, proposa un échange à ses héritiers , échange qui fut accepté par Rodolphe de Mauleon , parent d Isambert & qui devint ainsi propriétaire du Château de Benon avec ses dépendances, comme on l’a déjà observé.

Dans la fuite, la Seigneurie de Benon fut annexée à la Couronne. La cause de cette mutation n’est pas bien connue. On croit cependant l’entrevoir dans le préjugé qui fit regarder en 1253, Raoul de Mauleon, comme un enfant illégitime. Ce Raoul de Mauleon , Seigneur de Benon, étant mort sans postérité, en 1253 [11], Aimeri Vicomte de Thouars, Aimeri de Rochechouard du chef de sa femme, & Geofroi de Tonnai, au nom de ses filles voulurent se mettre en possession de ses biens. Alphonse, frère de Louis IX. Comte de Poitiers, s’y opposa prétendant que Raoul étoit bâtard, & qu’en cette qualité il n’avoit pu avoir d’autre héritier que le Seigneur féodal.

Il y eut à ce sujet des débats assez vifs ; mais enfin le Comte de Poitiers se relâcha de ses droits & donna main levée des biens de Raoul, à condition toutefois que le Vicomte de Thouars lui céderoit Benon. Cette Terre, par la mort d’Alphonse, revint à la Couronne avec le Comté de Poitiers. [12]

En 1335, il se fit une Transaction entre le Roi Philippe VI. dit de Valois & Philippe Roi de Navarre & Jeanne sa femme. Le Roi de Navarre abandonna au Roi le Comté de Champagne [13], & le Roi de son côté lui céda 5000 l. de rente sur le trésor & 3000 l. de rente en assiete, lesquelles furent assignées sur les Terres de Frontenai-l’Abbatu, du grand Fief d’Aulnis & de Benon. Aussi trouve-t-on dans un acte de 1541, le nom « de très-excellent Comte le Roi de Navarre Comte de Benon. » [14] Ce Roi de Navarre étoit Phillippe III. du nom, Comte d’Evreux , fils de Louis Comte d’Evreux, frère de Philippe le Bel. Il ne paroît pas que les descendans du Roi de Navarre ayent hérité de Benon. Il faut donc supposer que cette terre revint au Roi qui la donna à Charles de Castille dit d’Espagne, Connétable de France. Après la mort du Connétable tué en 1354, Benon retomba au Domaine de la Couronne, soit par droit de retour, soit par droit de succession, Charles d’Espagne ayant institué le Roi son héritier. [15]

Le 2 Septembre 1375 [16], le Roi en fit don à la veuve de Guillaume de Sens. Edouard Prince de Galles en avoit déjà joui après le traité de Bretigni, comme il paroît par un dénombrement du Prieuré de Saint Sauveur, par l’Abbé de Nouaillé, 2 Décembre 1363 [17].

En 1378, le 19 Septembre, Charles V. en fit un échange contre les deux tiers du comté de Dreux [18], avec Tristan Rouhaut & Peronelle de Thouars sa femme. Ce fut en leur faveur que ce Prince érigea Benon en Comté [19], mais il ne le céda qu’à faculté de rachat perpétuel « en baillant récompense ailleurs en Saintonge & en Poitou [20].

En 1383, Rouhaut & Peronelle plaidoient contre les habitans de la Rochelle. Il s’agissoit de savoir si le Comté de Benon étoit du ressort du Siège Royal de cette Ville. Le Vicomte & la Vicomtesse de Thouars prétendoient que Benon étoit de l’ancien Domaine de la Couronne & qu’il y avoit eu un Siège Royal qui ressortissoit au Parlement nuement & sans moyen. L’Arrêt prononcé le 26 Mars 1383, décida la question en faveur du Juge de la Rochelle.

En 1394, Peronelle Comtesse de Benon vivoit encore, pro nobili & potentissima Domina Vice-Çomitissa de Thoarcio & Domina dicti loci de Benone [21].

Isabeau de Thouars ayant reçu le Comté de Benon par succession de Peronelle sa soeur, le laissa à Ingerger son fils de la Maison d’Amboise. [22]

On voit enfin Louis de la Tremouille, qui avoit épousé Marguerite d’Amboise, se qualifier de Comte de Benon, dans un acte de cession & transport de la Seigneurie de Marans, fait par Marguerite sa femme en faveur de Louis XI. le 8 Décembre 1470.

Le Comté de Benon appartient encore à l’illustre Maison de la Tremouille. Anne-Charles-Frederic de la Tremouille, Prince de Talmond, est actuellement Seigneur du Comté de Benon.


[1Besly, pag. 413

[2Mém de 1602, conservés au trésor de Benon,

[3Arch. de l’Abb. de la Grace-Dieu.

[4Gall. Christ.tom. 2 pag. 387.

[5Arch. de Benon.

[6Titr. origin.

[7Ibid.

[8Arch. de la Grâce-Dieu.

[9Mém. de M. Begon.

[10Ordonn. tom. 5. p. 573. Secousse.

[11Chart. d’Alph.

[12Ms. Dupuy. Tit. anc. Mélanges.

[13Droits du Roi. Dupuy, pag. 722.

[14Généal. de la Maison de Surgeres, pag. 112

[15Ch. des Comp. 1 liv. des Chart fol. 88.

[16Mém. de la Ch. des Comp. Collec. de M. Lenain, 1 vol. pag. 160

[17Arch. de Benon.

[18Hist. de Dreux, par Duchesne, p. 227.

[19Dupuy, p. 722.

[20Ch. des Compt. Collect. de M. Lenain, I vol. p. 164.

[21Archiv. de la Grace-Dieu.

[22Mém. ms. de M. J. de F. anc. P. G.

Messages

  • Bonjour,

    Ma grand-mère écossaise disait que nous étions apparentés au Comte de Benon. Elle ne parlait pas français donc sa prononciation n’était pas très authentique. Jusqu’à présent, ce n’était qu’une histoire de famille. Je me suis récemment inscrit sur Ancestry.com et je suis très surpris de voir que mon 5ème arrière-grand-père était enregistré comme :

    Jean-Louis Bonong
    1780–1865
    NAISSANCE APRÈS. 1780 • France
    MORT AVANT. 1865 • Édimbourg, Écosse

    Je suppose que l’orthographe aurait pu être changée en une version phonétique de "Benon". Sa tentative pour que les Britanniques disent son nom comme il se doit. Il semble trop proche du nom de famille Benon en France pour être autre chose.

    J’aimerais savoir pourquoi il a déménagé au Royaume-Uni. Le site indique qu’avant de déménager à Édimbourg, il a vécu à Tonbridge dans le Kent pendant un certain temps et a épousé Maria Eliza O laughlain (1785–1834).

    Cordialement,
    Alan Anderson

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