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La fontaine miraculeuse de la Grâce-Dieu à Benon (17) et ses légendes

vendredi 31 août 2007, par Pierre, 6759 visites.

état supposé de l'abbaye de Benon au 18ème siècleOn sait que l’abbaye de la Grâce-Dieu a été fondée vers 1135, par Bernard de Clervaux, au bord d’un ruisseau, dans un terroir donné par un comte de Poitiers, non loin du château comtal de Benon. En amont des bâtiments, sur le ruisseau, la carte de l’I.G.N. au 1/25 000 signale une « fontaine miraculeuse » (Surgères n° 3-4), pour laquelle nous avons des renseignements depuis le début du XVIIIe siècle.

Sources indiquées dans le corps de l’article.

Sur le culte des fontaines en Charente, voir ce document des "Etudes locales" par L. Bertrand (1947)

 Le témoignage de Georges Musset en 1898

Abbaye de Benon - Salle capitulaire - Dessin du portail - Sans date
Crédits : Base Mérimée - Autorisation du 03/09/2007

« Sur la rive droite du cours d’eau qui va du moulin de l’étang à la Grâce-Dieu et dans la partie la plus profonde d’une petite crique, existe une fontaine qui est un lieu de pèlerinage et de dévotion. Son origine remonterait au séjour que, d’après la tradition populaire, saint Bernard aurait fait à l’abbaye. A ce séjour se rattacheraient deux légendes. Saint Bernard, dit-on, se trouvait dans sa cellule. Les moines, qui le croyaient seuls, l’entendirent converser avec quelqu’un. Ils l’interrogèrent à ce sujet. Le saint leur raconta alors que, cherchant en vain la solution d’une question scripturale, la sainte Vierge lui était apparue et la lui avait donnée. De là viendrait la dévotion particulière des populations qui se rendaient à l’abbaye pour les fêtes de Notre-Dame.

La légende raconte en outre que, le domestique de saint Bernard étant malade, celui-ci l’envoie se laver à la fontaine qui se trouvait à l’est du bois, et que le domestique fut guéri ; et l’historien Masse, qui se fait l’écho de cette tradition, ajoute que « plusieurs personnes infirmes vont s’y laver et s’en trouvent bien » (Masse, Bibl. de La Rochelle, mss. 32 (ancien 2927), p. 66).

La fontaine est encore actuellement un lieu de pèlerinage. On s’y rend dans la nuit du 14 au 15 août de chaque année. Il est dans la croyance populaire qu’à minuit l’eau remplit un timbre qui est enfoncé sous la fontaine, et que peu à peu émergeant du timbre, elle se répand dans la crique, puis de là dans le ruisseau qui lui fait suite. Bien entendu, il est de croyance que ce timbre ne peut s’enlever. A plusieurs fois on y attela des paires de boeufs, mais les efforts étaient infructueux et le timbre restait en place. A plusieurs reprises toutefois et à force d’hommes, on l’aurait sorti de la place qu’il occupait et mis sur la berge, mais le lendemain le timbre avait repris sa place (Voir, sur des faits analogues, La Charente-Inférieure avant l’histoire et dans la légende, par G. Musset ; passim).

L’eau de la fontaine ne guérirait pas spécialement, d’après les gens du pays, telle ou telle affection, mais tous les malades sans exception pourraient demander leur guérison.

Le pèlerinage de la fontaine de la Grâce-Dieu serait en outre comme certains lieux de pèlerinage, dans les Pyrénées notamment, le rendez-vous de jeunes couples qui viendraient y faire des « accordailles ».

Il y avait autrefois près de la fontaine une croix qui a disparu ».

(Archives Historiques de la Saintonge et de l’Aunis, tome XXVII, p. 38-39).

 Le témoignage de dom Boyer

Musset ne semble pas avoir eu connaissance d’un autre témoignage, à peu près contemporain de celui de Masse et qui n’en diffère pas sensiblement. En 1710, dom Jacques Boyer, religieux bénédictin de la congrégation de Saint-Maur, chargé de rechercher des documents pour le tome II du Gallia Christiana, passe par la Grâce-Dieu. De son journal de voyage nous extrayons un passage relatif à la fontaine, dont la notoriété a sollicité sa curiosité. Il part de Saint-Jean-d’Angély.

« 25 [avril 1714]. Je partis pour l’abbaye de la Grâce-Dieu. Je m’arrêtai à Surgères, chez un de mes écoliers. Je passai ensuite à Saint-Bibien, où il y a les masures d’un monastère de l’ordre de Fontevraud, et ensuite à Benon, comté du prince de Talmont, qui a 77 paroisses dépendantes, éloigné d’un quart de lieue de la Grâce-Dieu.

26. Je dis la messe pour l’anniversaire de mon père. Après dîner, je fus à une fontaine éloignée d’un demi-quart de lieue de l’abbaye, où il y a un timbre de pierre, où les malades se lavent et sont guéris de leurs infirmités, à ce qu’on m’a dit. On a ajouté que, le jour de la Pentecôte, ceux de la Trinité, de la Fête-Dieu, de l’Assomption et de la Nativité de la Vierge, il vient à cette fontaine, chacune de ces fêtes, cinq ou six mille personnes. On croit que saint Bernard guérit un lépreux en lui ordonnant de se laver dans ladite fontaine ».

(Bulletin de la Société des archives historiques de la Saintonge et de l’Aunis, tome VII, 1887, p. 167).

Les trois légendes concordent au sujet de l’intervention de saint Bernard, mais les deux plus anciennes, qui relatent la découverte des vertus de la source, peuvent seules avoir un caractère populaire. Le témoignage de dom Boyer montre que le timbre existait au début du XVIIIe siècle et qu’à cette époque il y avait plusieurs pèlerinages dans l’année. Au temps de Musset, il n’y a qu’un pèlerinage, le jour de l’Assomption, et une nouvelle légende en est issue, qui met la Vierge en scène. La conversation entre celle-ci et saint Bernard au sujet d’une « question scripturale » est évidemment issue d’une imagination d’intellectuel et avait peu de chances d’être très répandue.


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