Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

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1636 - Révolte des Croquants en Saintonge et Angoumois - Doléances et négociations

vendredi 13 avril 2007, par Pierre, 6101 visites.

De nouveaux impôts, le prix du blé qui flambe voir des données chiffrées à ce sujet, "cela a rendu les noms des Parisiens tellement en hayne et horreur a tous les peubles, que seulement se dire tel est assez pour se faire assommer". Les Croquants de Saintonge et d’Angoumois "plus de quarante mil enrollés, qui scavent leur rendes vous au premier signal ou son de cloche" ont pris les armes, bien décidés à faire entendre leur misère à ces Parisiens. "Et, depuis cette révolte, ils en ont fait mourir dix ou douze".

C’est maintenant la phase de négociation pour tenter de sortir de l’impasse.

- Document n° 1 : 23 juin 1636 - Le Cardinal de Richelieu écrit au sénéchal de Barbezieux.
- Document n° 2 : 19 juillet 1636 - Le curé de St Laurent des Combes (33) écrit une lettre à un représentant angoumoisin des Croquants. Une sorte de protocole de sortie de crise
.
- Document n° 3 : Relation du soubslevemens des païsans de Xaintonge : explication des causes du soulèvement des Croquants
- Document n° 4 : Remonstrances faictes par les païsans d’Angoulmois a Messires de Brassac et de Villemontée, au mois d’aoust 1636. Un véritable cahier de doléances. Une partie d’entre elles, toujours sans solution, se retrouveront dans les cahiers de 1789. (150 ans plus tard, soit 5 générations)

Sources : Notes sur la révolte des Croquants par J. George - Bulletins et Mémoires de la Société d’Archéologie et d’Histoire de la Charente - Année 1921 - Les documents originaux sont dits appartenir à M. Favraud, et provenant peut-être de M. Henri de Guénégaud (1609-1676), secrétaire d’État de la Maison du Roi Louis XIV.

 23 juin 1636 - Le Cardinal de Richelieu écrit au sénéchal de Barbezieux.

Messieurs, j’ay esté bien aise de recognoistre, par la lettre que vous m’avés escrite, que ceux qui, au préjudice de leur debvoir, se sont esmeus contre le service du Roy et trouble le repos de ses provinces, commenccants a se repentir de leur faulte, ayment mieux se disposer a recevoir sa clemance, que d’attendre la rigueur de sa Justice.

Si, pour l’esviter, ils quittent promptement les armes, se retirant chascun chez eux, et font leur possible pour se remettre avec sa Majesté aux termes de bons subjects, je m’employeray, tout volontiers, envers elle, affin qu’elle y ait tout lesgard qui luy sera possible, et leur face sentir les effets de sa bonté.

Vous les en asseurerés de ma part ; et, en votre parcitulier, croyes qu’elle vous scaura gré de celle que vous témoignerés, en cette occasion, pour ramener des esprits en l’obéissance qu’ils luy doivent ;.et que je suis, Messieurs,
Votre affectionne amy a vous servir,

Ainsy signé a la minute de lad. lettre : Cardinal de Richelieu.

Addressante a Messieurs le Hanchaud, scenechal, de Termerie près Barbezieux, la grande Gendron.

 19 juillet 1636 - Lettre touchant les paisans du Poictou qui avoint pris les armes

Nota : le titre qui indique Poictou semble être une erreur de copiste, car le document ne traite pas du Poitou, mais de la Saintonge et de l’Angoumois.
Cette lettre, écrite par Galleteau, curé de Saint-Laurent-des-Combes , est adressée à des personnes non dénommées, mais prenant part au mouvement populaire.

Messieurs, ayant esté députtés de. la parroisse de St-Laurens des Combles pour me trouver en l’assemblée des messieurs de la police, indiquée en Baigne, le dix septiesme de ce mois, par la permission de monsieur le comte de Jonzac [1], ou se trouve monsieur de Gaillard [2] et messieurs les scenechaux de Barbezieux et Baigne, députtés vers le Roy, nouvellement venus à Paris, avec la pluspart des députtés des chatellenies de Xaintonge, tous gens de pais, faisans le nombre de cinq cens ou environ, et quelques cent hommes de village qui venoint devers Saint-Jean et Masta ; et ne se trouva de la province d’Angoulmois que trois ou quatre depputés dont j’en estois un, et entre autres celuy de Simers [3]

Et, après quelque dispute sur les plaintes qu’on devoit faire, il feust arresté que la province d’Angoulmois se joindroit avec celle de Xaintonge. C’est pourquoy, je vous ay voulu donner cet advis, comme estant de Messieurs de l’assemblée, affin de vous reiglér suivant l’arresté de laditte Assemblée, dont s’ensuit les articles.

Premièrement, la province d’Angoulmois seroit jointe en plainte a celle de Xaintonge, comme estant toutes deux soubs un mesme Gouvernement, et tombées dans un mesme crime.

Que chascune chastellenie deputtera un homme bien sensé, amateur du bien public, aux fins de prendre jour et lieu de Monsieur Gaillard, pour aller remercier Monsieur de Brassac [4], de la peine qu’il a prinse d’obtenir du Roy l’abolition des crimes qui se sont passés en se soubslevant dernièrement ; de laquelle deputation en donnera advis a Mr de Gaillard, dans le XXX du mois courant, a Barbezieux chez Monsieur le senechal, ou ches Monsieur Meran, pour recevoir l’advertissement du jour et lieu ou les députés s’as sembleront pour aller saluer en corps Monsr de Brassac.

Que pendant led. temps, chascune paroisse, endroit soy, dressera les mémoires de ses plaintes ; et que, par après, toutes les chastellenies contesteront leurs plaintes toutes ensemble ; comme aussy par après, seront toutes les chastellenies de chascune des deux provinces par assemblée, pour recevoir les plaintes de l’Angoulmois en un corps, et celluy de Xaintonge en un autre.

Que par après on [ne] sonnera le tocsin pour assembler le public en arme, ou en quelque mutinerie, sur peyne aux contrevenans destre mis entre les mains de la Justice.
Qu’on ne s’assemblera en armes, pour aller en quelque lieu que ce soit, sans ladmission du Gouverneur, ou de Monsieur le Juge, ou seigneur, ou officiers des lieux, sur peine de punition corporelle aux contrevenans.

Que aucuns ne fera courir de billets portans que tel est gabeleur, ou maltotié, ou qui dira de bouche la semblable chose pour esmouvoir le peuble, sur peyne aux contrevenants d’estre punis de pareille peine qu’ils prétendent faire souffrir aux autres.

Qu’on n’amassera les menus droicts, les cinq escus pour tonneau, taxes ou gabelles, jusques a ce qu’il en soit ordonné par Messieurs de Brassac ou Villemontée [5] ; et que si quelqu’un veut lever lesd. droicts, ordonne qu’on se saisira de sad. personne, et mettra entre les mains de la Justice, pour estre puny.

Qu’on payera les droicts seigneurieaux aux Gentilhommes et seigneurs, et la disme aux gens d’esglise, ainsy qu’on avoit accoustume de tout temps.

Qu’on prendra l’argent des menus droits, s’il y en a d’amassés, pour faire les despens des députés, quand ils seront envoyés en quelque lieu, de la part de l’assemblée et chastellenie ; et, s’il [n’]y en a de cette nature des deniers amasses, on lèvera sur un chascun, au sol la livre sur le pied de la taille, l’argent pour faire lesd. despence.

Il est deffendu aux hosteliers ou cabaretiers de vendre le vin au prix qu’ils faisoint quand ils payent les cinq escus par tonneau, ains le ravaller a moindre prix.

Il est permis aux fermiers des cinq escus pour tonneau, et aux autres amasseurs de daces [6] et de gabelles et imposts de pouvoir retounér librement en leurs familles, sans que aucun les puisse offenser de parolle ou d’effect, aux conditions qu’ils ne se mesleront d’amasser ou faire amasser lesd. imposts, et qu’ils s’adjoignent avec le peuble pour empeschér ceux qui voudront le faire.

Monsieur de Gaillard a donné grande espérance de l’extinction des menus droits ; et qu’on nestabliroit aucun subside nouveau ; et qu’on anéantirait ceux qui sont desja ; et qu’on a proposé de mettre la taille en abany, pour porter l’argent entre les mains d’un receceur en chascune chastellenie, qui les rendra entre les mains des receveurs généraux de la province. Mais il faut prendre advis qu’on ne mesle les menus droits soubs le nom de la taille.

Que led. sieur de Gaillard ne peut donner en cela un arresté, puisque Monsieur de Brassac, Villemontee sont commissaires en cette affaires.

Et, affin qu’on poursuive lad. deputation, je vous envoyé la présente pour vous supplier d’envoyer la copie d’icelle à Bouteville [7], et en chascune paroisse de votre chastellenie, et une a Chasteauneuf, pour faire le semblable ; lesquels aussy sont priés, de Messieurs de l’assemblée générale, d’en donner promptement advis a ceux de Blanzac et autres lieux voisins, pour avoir temps de préparer leurs députés, et dressé leur plainte au temps requis ; indicqué un jour de sedmaine et un lieu, aux fins de faire assembler un homme de chaque paroisse de votre chastellenie pour nommer un deputté, suivant les articles cy dessus, et parler de leurs plaintes.

J’auray l’honneur de vous voir dans mecredy, ou nous vous communiquerons beaucoup d’autres choses importantes au bien public ; vous souhetant bonheur et prospérité, et vous demeurant votre bien humble et affectionne serviteur. Galeteau presfre cure de St-Laurens des Combes, ce + XIX juillet 1636.

 Relation du soubslevemens des païsans de Xaintonge

Les paisans de Xaintonge y continuent en leurs premières resolutions et demandes, sans pourtant faire gros, ny assemblée notable pour, disent-ils, ne se manger les uns les autres. Mais sont plus de quarante mil enrollés, qui scavent leur rendes vous au premier signal ou son de cloche.

Protestent estre bon francois ; et vouloir mourir, plustot que de vivre d’advantage soubs la tirannie des parisiens, ou partisans, qui les ont réduit au desespoir et a une extrême pouvreté, ou nos provinces, sont a présent, par le moyen des grandes impositions et nouvelles charges qu’on nous a mis sus, et inventés depuis ce règne, ce qui a contraint plusieurs d’abandonner leurs propres héritages, pour aller mandiér leur pain, laissant leurs terres incultes, voire celles à safran.

Ne pouvant tenir bestail, habits, ni outils que les sergens ne leur enlevassent tous les jours, sans que cela diminuast la debte principal envers Monsieur le receveur, cela n’estant que pour le frais de l’exécution. Dequoy ayans rendu leurs plaintes a plusieurs et diverses fois, et Messieurs de Paris du Conseil se mocquans de leurs souffrances ; augmentant de nouvelles charges et impositions tous les ans, soubs ce beau prétexte des nécessites de l’Etat, qui n’a esté qu’une couleur aparente pour ruiner le royaume, en tirer l’argent pour gorger de biens quelques particuliers et les créatures de celuy qui gouverne l’Estat ; que n’ayant jamais peu faire entendre leurs doléances à sa Majesté, ils ont esté contraincts d’en venir a ces extrémités, affin qu’on remediast à tous ces desordres, et quelques clameurs peussent parvenir jusques aux oreilles du Roy, et non plus de ses ministres qui le conseillent si mal.

Car si on veut ouir leurs remontrances, ils prétendent de faire voir que Ion a faict vendre au Roy, ou plustot bailler pour un escu, ce dont on a baillé cent escus sur le peuple, qui a payé plus de charges, en deux années de ce règne, que non pas en tout le règne de son père, et plus a celuycy qu’a tous les Roys ses devanciers, depuis le commencement de cette monarchie.

Et que, si Ion faisoit cesser les despences inutiles et superflues, le payement des pensions et des gages des officiers nouveaus, créés depuis ce règne, avec tous les menus droits introduicts, outre et par dessus les tailles, inventées seulement pour la ruine du peuble, que lesd. tailles, taillons, et entiens droicts, estans bien despensés, sont suffisans pour l’entretien des armées nécessaires contre les ennemis et conservation du royaume.

Mais quand cela ne pourroit suffire, voulent y contribuer de tout le reste de leurs moyens, pourvu qu’ils ne soint pas taxes par le ministre de l’estât présent, qui ne doibent plus avoir le pouvoir de faire et a leur fantesie de nouvelles taxes ou impositions sur les peubles ; cela devant être réservé pour de nécessités extrêmes, et par des Estats généraux, comme il se pratiquoit enciénnement.

Que quand bien on feroit cesser le payement des menus droicts et nouveaux gages, on ne taira point de tort aux propriétaires, qui en ayant jouy quatre ou cinq années, ont este, par ce moyen, entièrement rembourcés de leur principal ; et ceux qui en ont jouy plus longtemps, a plus forte raison.

Et au pis aller, quand ils perdroint quelque chose, il n’en seroit pas grand dommage ; et cela servirait d’exemple à ladvenir pour ne se porter pas si facillement a achepter de nouveaux droicts ou impositions sur les peubles.

Car ces Messieurs de Paris, partisans ou autres, qui, dans les provinces, ont débité cette marchandise pour y proufittér, ny scauroint assez perdre, puisqu’ils sont cause de tout notre mal.

Aussy, cela a rendu les noms des Parisiens tellement en hayne et horreur a tous les peubles, que seulement se dire tel est assez pour se faire assommer. Et, depuis cette révolte, ils en ont fait mourir dix ou douze ; et entre autres a St Savenien [8], exercèrent une si horrible rage contre un de ces pouvres commis, natif de Paris, qu’il feust taillé tout vivant en petits morceaus, dont chascun prenoit sa pièce, pour attacher à la porte de sa maison, ou il s’en voit encore. Ils font estât de ne recevoir aucun prince ny seigneur mal content de la Cour.

Le Juge de Montendre [9] et le procureur fiscal de Chasteauneuf sont chef de quelques paroisses ; et ainsy quelques autres principaulx des bourgs, qu’ils contraignent daccepter les charges parmy eux.

Les jours de festes, ils sexercent aux armes, dont ils se pourrvoyent peu à peu, le mieux qu’ils peuvent, et principalement despees, qu’ils portent dordinaire au costé, mesmes a présent en labourant la terre. Font payer exactement la grande taille et taillon ; pour tout le reste il n’en faut point parler.

S’ils se tiennent la, les faudra il prendre comme rebelles.

 Remonstrances faictes par les païsans d’Angoulmois a Messires de Brassac et de Villemontée, au mois d’aoust 1636.

Supplient très humblement les syndics et depputtes du tiers estât de chastellenies de Cougnac et Mespins, Chasteauneuf, Bouteville, la Valette, Ruffec, Jarnac, Montignac, Blanzac, Manle, Verteuil, Confolant, la Rochefoucaud, Aubeterre, Chabannois, subjectes aux tailles et subsides, impost sur la province d’Angoulmois, qu’il vous plaise d’ouyr et juger les raisons et plaintes qu’une extrême nécessité fournist aux supplians, sur et à l’occasion des charges, dont le faix insupportable les a opprimé, jusqu’au dernier denier, et les a reduicts a impuissance et nécessité ; qu’en fin, le desespoir les a précipités dans les esmotions, dont ils se confessent grandement criminels et redevables a sa Maj.

C’est pourquoy, la larme à l’œil, et prosternés en terre, ils implorent, très instamment et en toute humilité de cœur, sa clémence et bonté a ce qu’il luy plaise, par vos prudentes inspections, d’avoir pitié et commisération d’eux, d’abolir leurs crimes en toutes leurs circonstances et les noyer dans leur perpétuel oubly.

D’autant mesme, qu’entre lesd. supplians, l’un a suivi l’autre comme de brebis ; la pluspart a esté forces ; et que, par connexité, quantité d’innocens et de tout aage et sexe s’y trouvent enveloppés. C’est l’estât ou se mettent lesd. supplians pour ouyr droict sur leurs articles de leurs soubmissions et supplications qui s’ensuivent.

Premièrement, que comme les pouvres suppliants et leurs semblables sont comparés au foyer du corps, qui distribue le sang aux autres parties, et ont aussi leurs fortunes conjointes avecque la splendeur de sa Maj, ainsy déclarent n’avoir jamais esté refusans de contribuer au payement de grande taille et du taillon, et gages du vissenechal, ny aussy à la creùe des garnisons, selon toutesfois la taxe et modération portés par les commissions et patentes de lan [mil] six cens dix, que commencca le règne très heureux de sad. Maj. ; mais, a cause leur pouvreté et desordres présent, ils demandent, s’il luy plaist, len descharger des arrérages qui en peuvent estre deubs, jusques au premier jour d’octobre prochain.

Secondement, demandent les supplians la faculté de respirer par l’abolition de tous les menus droicts aliénés, dont les acquéreurs ont été facillement remboursés par la jouissance qu’ils ont faicte, depuis lad. acquisition, eu esgard au prix de finance d’icelle. Ensemble la remission des arrérages, avec la suppression des autres impost nouvellement establis sur le bestaille de pied fourché, pied rond, poisson frais et salle, pellebud, fer, acier, papier et toille ; et du sol pour livre des marchandises qui se vendent en foires, de deux liards pour livre du droict de voiture et chevinage estably à La Rochelle, du droit annuel des bouchons et autres, par ce qu’elle surpasse toute misère. De plus, il se jusfiera par l’estimation des contracts des fermes des dixmes des paroisses desd. chastellenies, qu’elles payent beaucoup plus de tailles et menus droicts qu’elles n’ont de revenu. Par exemple donc, la disme de tous fruicts qui se leivent à Louzin [10] ne vaut que mil livres par an, paient dix mille livres desd. tailles ; a quoy si Ion adjouste les semences, frais et despenses des cultures, labourage et moissons, rentes et terrages des seigneurs. Et qu’on considère aussy que, si lesd. paroisses les ecclésiastiques, gentilhommes et autres privilégiés ont beaucoup de domaine non subjects a la contribution des tailles, bien qu’ils le soint aux dixmes, on verra clairement qu’il ne reste du tout rien aux pouvres supplians ; et que pour se nourrir et fournir au payement desd. tailles, depuis dix ou douze ans en c’a, a fallut emprunter et sendebter et engager leur fonds aux habitans des villes ou autres privilégiés. Joint encore la grande vexation des receveurs, huissiers et sergens des tailles, lesquels pour une première semonce prenent six, sept, huit, quinze et seize livres, selon que les commissaires sont plus ou moins esloignés des élections, bien que lesd. recepveurs prennent soixante dix sols 5 deniers de droict, qui leur est attribué et incorporé dans les commissions pour lesd. semonces ; comme aussy l’oppression des gens de guerre, qui vivent a discrétion sans garder les étapes.

Tiercement, supplient, suivant les enciens reiglemens, qu’il ne soit point levé de contraincte solidaire pour le payement desd. tailles contre les particuliers, lors que l’on aura nommé des assesseurs, collecteurs a esgaller icelles tailles contre de particuliers. D’autant que, par ce moyen, ceux qui ont payé leurs taux sont encore attaqués et vexés, laissant en repos lesd. assesseurs et collecteurs, qui peuvent despenser ou divertir l’argent qu’ils ont amassé à leurs affaires particulières, ou ceux qui se trouveront de mauvaise foy.

Quartement, supplient aussy la modération de l’impost de treize livres dix sols pour tonneau [11] de vin qui se transporte par la rivière de Charente ; et qu’il soit réduict, s’il plaist a sa Majté a six livres dix sols, qui est pareill droict qui se prend sur les rivières de Garonne par le Bourdelais, ou le tonneau est beaucoup plus grand, et se vend d’ordinaire cent et six vingt livres, et celluy de Boutonne pour Saint-Jean-d’Angelly ; veu que par dessus le desprix de la vente, qui par commune année n’excède vingt ou vingt et quatre livres le tonneau, les voisins, qui vendent, a meilleur marché, à cause de leur impost plus tolerable et qu’ils sont plus près de la mer, fournissent et chargent seuls les estrangers. Et par ce moyen, les vins des supplians, ou gist tout leur attente pour retirer les coûts des fustailles et de la culture des vignes, et quelque peu de reste, s’il y en a, pour ayder a payer leurs tailles, rentes et debtes leur demeurant sur les bras, contraincts de les vendre et bailler a vil prix pour les alambiquér, et convertir en vinaigre et eau de vie ; desgarny tout le pais de bois de chauffage pour les brusler ; et de plus les estrangers ont, en ce païs, de commissionaires qui font tout le commerce, au préjudice, non seulement des marchans, mais encore des propriétaires à leur mot.

Cinquiesmement, que le droit de quinze livres aussy pour tonneau de vin, qui se vend en destaill ou par assiete, reprene son ancienne taxe de huictiesme, comme plus supportable, si mieux il ne plaist à sa Majté de faire un abonis dud. droict de huictiesme et XXIIIIe qui se paye aussy, outre les quinze livres, a raison de cent sols par chascun tonneau. D’autant, que led. impost empesche la vente et commerce dud. vin dans le pais et notamment a ceux qui sont esloignés de la rivière de Charente ; led. vin ne vaillant que dix et huict ou vingt livres avec le fust ; dont le peuble se trouve tellement incommode, que la meilleure part des vignes sont délaissées en friche, leur estant plus en charge qu’a proffit.

Sixiesmement, qu’il plaise à sa Majté de supprimer les offices des courtiers crées pour le vin et le bestaill, lesquels prennent et lèvent le droict de dix sols pour tonneau de vin, et pour chascun mullet ou mulle, dont partie de lad. province faict trafficq ; lequel par ce moyen arreste, attendu qu’on n’oserait vendre sans appeler lesd. courtiers, et que faict qu’on perd souvant l’occasion des ventes, ou l’on est travaillé en procès sur le nombre du vin ou bestail qui a este vendu.

Finalement, au regard du sel, par ce que c’est une manne qui plait et se collige sur les sallines ou cour rivière de Charente, se descharge et conflue, que l’achap et l’usage en soit perpétuellement libre, comme est de présent, et l’impost sur chascun grand cent, vallent vingt et cinq muids ou mille boisseaux, mesure de Taillebourg, soit modéré et diminué comme il avoit esté cy devant, et depuis six ou sept ans, par les lettres patentes de sa Majesté et arrest de son conseil, d’autant que, outre le droict des propriétaires desd. salines, et autres impost, la voiture par terre ou il se débite est fort loin et dispendieuse, et en surhausse grandement le prix aussy a la foule, et oppression desd. suppliants.

Et ce considère, nos seigneurs, il vous plaise de vos Grâces départir aux suppliants votre équitable justice, et comme ministre, très dignement choisis de sa Maté, la première et la plus auguste des puissances terriennes, vouloir déclarer ses favorables absolutions, condamnations et jugemens, qui l’approchent de plus prés de Dieu ; conserveront l’amour inviolable et filiale de son peuble plus fecconde, non seulement de gens de guerre, qui le servent sans relasche dans ses armes, mais aussy de ceux qui remplissent les pallais et tribunaulx de sa Majté ; et lequel demeurera aussy plus estroictement obligé a prier Dieu pour la prospérité de sa personne sacrée, et pour l’augmentation de celle de vos grandeurs.

Ajoustent encore les suppliants des grandes vexations qui se commettent par les commissaires généraux establis aux saisies réelles, en ce qu’ils exigent, de chascun bail de ferme, la somme de quarante cinq livres douze sols, pour les baux qui excedoient trente livres, et pour ceux qui sont au dessoubs de vingt et cinq livres, douze sols six deniers pour livre, qu’ils prennent de surplus dud. prix. En quoy, l’oppression est toute notoire, tant a l’esgard du saisissant que de l’exécuté ; lesquels droicts, suivant les arrests du conseil, modères a quarante sols par les saisies faictes sur les maisons des villes, et quatre livres pour les herittages des champs.

Et par mesmes raisons, seront les taxes des greffiers reiglees comme anciennement ; attendu que, a présent, on exige une tierce partie de la grosse des actes de justice pour un prétendu droict de controlle, d’ailleurs douze deniers pour livre, qui se prennent sur les deniers consignés, pour quelque cause que ce soit, bien qu’ils n’y ayent que six deniers pour livre d’ancienne attribution au recepveur des consignations.

Comme aussy, ayant esgard a l’oppression du public sur lequel certains dommages, soubs prétexte de quelque prétendue reformation, lèvent et exigent annuellement des texiers, charpentiers, menuiziers et marchands, qui estallent, la somme de cinq sols, pour droict de visite, et en oultre les constituent le plus en grand frais, a la ruine et oppression du pouvre peuble.


 La flambée des prix du blé et la révolte des Croquants

Le prix moyen annuel du froment, au marché d’Angoulême, ramené à l’hectolitre, s’était maintenu à 5 # environ, de 1600 à 1627.

Il montait successivement, pendant les trois années suivantes, à 7 # 6 s., 7 # 19 s., 10 # 17 s. et atteignait 15 # 12 s. en 1631, prix maximum constaté durant le XVIIe siècle.

II était encore à 6# environ en 1636 et 1637. (Bull. Soc. arch. Charente, 1920, pages 48 et 72.)


[1Léon de Sainte-Maure, comte de Jonzac, fut nomme Gouverneur de Cognac en 1633. (P. de Lacroix, Les Gouverneurs de Cognac, dans Bull. Soc. Arch. Charente, 1875, p. 221).

[2Ce ne peut être M. de Galard, désigné plus loin,

[3Nous ne connaissons pas de localité rappelant ce mot ; il y a une transcription erronée.

[4Jean de Galard de Béarn, comte de Brassac, était gouverneur de la Saintonge et de l’Angoumois. (Moreri, Dictionnaire, v° de Galard.)

[5Villemonlée était « Intendant de la Justice » des provinces de Saintonge ; Angoumois, Poitou. (Girard, Hist. de la vie du duc d’Epernon, Paris, Courbé, 1655, p. 553 ; — Ibid. Amsterdam, 1736, t. IV, p. 295)

[6Synonyme d’impôt (La Curne de Saint-Palaye, Dict. hist. de l’ancien langage françois, v° Dace).

[7Bouteville, canton de Châteauneuf, arrondissement de Cognac.

[8Saint-Savinien, arrondissement de Saint-Jean-d’Angély.

[9Montendre, arrondissement de Jonzac.

[10Probablemenl Lozay, arrondissement de Saint-Jean-d’Angély.

[11Le tonneau contenait 4 barriques de 28 veltes, et celles-ci 7 lit. 4506. (Bull. Soc. arch. Charente, 1920, p. 66).

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