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839 - 1696 - Chronologie historique des Comtes d’Angoulême

jeudi 7 août 2008, par Pierre, 9554 visites.

De nombreuses chronologies historiques des Comtes d’Angoulême ont été publiées. J’ai retenu celle-ci, écrite en 1818, qui présente une certaine critique des publications antérieures, et des références bibliographiques variées.

Source : L’Art de vérifier les dates - T. X - Paris - 1818 - Books Google

Voir : la chronologie écrite par François de Corlieu, dans son Recueil en forme d’histoire (1576)

 Chronologie historique des Comtes d’Angoulême

Branche des Taillefer

Branche des Lusignan

Branche des Valois

839-863 : Turpion 1208-1249 : Hugues X de Lusignan 1392-1407 : Louis d’Orléans
863-866 : Emenon 1249-1260 : Hugues XI le Brun, de Lusignan 1407-1467 : Jean d’Orléans
866-886 : Wulgrin 1260-1282 : Hugues XII le Brun, de Lusignan 1467-1496 : Charles d’Orléans
886-916 : Alduin 1er 1282-1308 : Hugues XIII de Lusignan 1582-1619 : Diane
916-962 : Guillaume 1er Retour du comté d’Angoulême à la Couronne 1619-1650 : Charles de Valois
962-975 : Arnaud Bouration 1650-1653 : Louis-Emmanuel
975-1001 : Arnaud Manzer 1653-1696 : Marie-Françoise
1001-1028 : Guillaume II Taillefer Retour du comté d’Angoulême à la Couronne
1028-1032 : Alduin II
1032-1048 : Geoffroi Taillefer
1048-1089 : Foulques Taillefer
1089-1120 : Guillaume III Taillefer
1120-1140 : Wulgrin II Taillefer
1140-1178 : Guillaume IV Taillefer
1179-1181 : Wulgrin III Taillefer
1181-1208 : Mathilde, Guillaume et Adémar

La ville d’Angoulême n’est connue que depuis le quatrième siècle. Le poète Ausone, qui mourut vers l’an 394, est le premier qui en ait parlé. Il la nomme Inculisma. Les écrivains postérieurs l’ont appelée Engolisma et Eccolisma. La Notice des Gaules, dressée vers la fin du quatrième siècle, met dans la deuxième Aquitaine Civitas Eccolismensium.

 TURPION

839. Turpion, fils d’Adalelme, et frère de Bernard et d’Eménon, comtes de Poitiers, est le premier comte que l’on connaisse de l’Angoumois. L’historien des évêques et des comtes d’Angoulême, qui écrivait en 1182, dit qu’il fut établi, en 839, par l’empereur Louis le Débonnaire. Turpion fut tué le 4 octobre 863, dans un combat contre les Normands.

 EMENON

863. Eménon ou Imon , dit aussi Iminon, frère de Turpion, auprès duquel il s’était réfugié, après avoir été dépouillé du comté de Poitiers, lui succéda au comté d’Angoulême et devint aussi comte de Périgord. (Acta SS. Ben. Saec. IV, par.2. p. 73.) L’an 866, ayant livré bataille, le 14 juin, à Landri, comte de Saintes, à cause du château de Bouteville, il le tua dans l’action, mais il reçut lui-même une blessure dont il mourut aussi le 22 du même mois. Il fut enterré à l’abbaye de Saint-Cybar. (Adhemar. Caban.). Il avait épousé, suivant D. Bouquet, N. fille de Robert le Fort, dont il laissa Adémar, comte de Poitiers ; Arnaud, duc de Gascogne ; et Adeline ou Adelelrne. (Voy. les comtes du Poitou.)

 WULGRIN, Comte de Périgord et d’Angoulême.

866. Wulgrin fut établi comte de Périgord et d’Angoulême par Charles le Chauve, dont il était parent, après la mort d’Eménon. Il livra plusieurs combats aux Normands, bâtit les châteaux de Marsillac et de Mastas [1], pour arrêter leurs courses, fit relever les murs d’Angoulême, et répara cette ville que ces barbares avaient brûlée. Wulgrin mourut le 3 mai 886. Rogelinde, son épouse, fille de Bernard, duc de Toulouse, dont elle eut l’Agénois pour sa dot, lui donna deux fils, Alduin et Guillaume, qui suivent.

 ALDUIN Ier

886. Alduin succéda, dans le comté d’Angoulême, à Wulgrin, son père. Il prit, ainsi que son frère, le parti du roi Eudes, contre Charles le Simple, et fut en grand crédit auprès du premier. Alduin mourut, suivant la chronique d’Angoulême, le 27 mars 916, laissant un fils, qui suit.

 GUILLAUME Ier

916. Guillaume Ier., fils.et successeur d’Alduin, fut surnommé Taillefer (Sector ferri), parce que, dans une bataille contre les Normands, il fendît d’un coup de sabre, malgré sa cuirasse, leur roi Storis. La postérité de Guillaume a conservé son surnom. Sa mort est placée au 6 août 962, dans la chronique d’Angoulême ; en quoi elle est conforme à d’autres chroniques, et préférable à celle d’Adémar de Chabannais, qui met cet événement après le décès d’Ebles, évêque d’Angoulême, arrivé l’an 964. Guillaume ne laissa que des enfants naturels. La chronique d’Angoulême l’appelle un très-aimable prince.

 ARNAUD BOURATION, comte d’Angoulème et de Périgord.

Arnaud, dit Bouration, fils amé de Bernard, comte de Périgord, lui succéda dans ce comté et se rendit maître de celui d’Angoulême en 962, après .la mort de Guillaume Taillefer. Les bâtards de ce dernier revendiquèrent, les armes à la main, sa succession ; Arnaud Manzer, leur aîné , fut le plus ardent. Leurs efforts furent impuissants pendant la vie de Bouration ; mais lorsqu’il eut cessé de vivre, Arnaud Manzer attaqua Guillaume, Ramnulfe et Richard le Simple, frères de Bouration, tua le second le 27 juillet 975, chassa les deux autres, et demeura possesseur du comté d’Angoulême. Tout ceci est fondé sur le texte d’Adémar de Chabannais, qui nous apprend aussi qu’Arnaud fut surnommé Bouration pour avoir saisi et enveloppé dans ses habits un loup qui désolait le pays.

 ARNAUD MANZER, comte d’Angoulême

975. Arnaud Manzer ou le Bâtard, après s’être mis en possession du comté d’Angoulême, par les victoires qu’il remporta sur les enfants de Bernard, eut un nouveau concurrent dans la personne de Hugues de Jarnac, évêque d’Angoulême. Ce prélat avait formé une ligue avec plusieurs barons pour dépouiller Arnaud. Il échoua dans son entreprise, et fut obligé de céder à ses alliés les plus belles terres de son évêché pour les dédommager des dépenses qu’ils avaient faites pour son service. Arnaud mourut, non l’an 992, comme le marque le P. Anselme, mais l’an 1001 au plutôt, puisqu’il était, suivant Adémar, l’un des quatre comtes qui aidèrent le duc d’Aquitaine, Guillaume le Grand, cette année, à faire le siège du château de Brosse, et qu’après cette expédition, s’étant fait moine a Saint-Cybar, il y mourut le 4 mars. (Voy. Gui, vicomte de Limoges.)

 GUILLAUME II TAILLEFER

1001 au plutôt. Guillaume II, fils d’Arnaud Manzer, lui succéda au comté d’Angoulême vers la fin de l’an 987. Le plus ancien acte qu’on ait de lui est une charte qu’il donna en laveur de l’abbaye de Saint-Amand de Boissac, au diocèse d’Angoulême, laquelle est datée de l’an de l’Incarnation 988, indiction 1. (Gall. Christ., nov. tom. II, col. 1035.), Ce comte accompagna Guillaume le Grand, duc d’Aquitaine, au siège de Rochemeaux, et l’aida à se rendre maître de la place. Le duc lui fut aussi redevable de la prise de Blaye, dont ils firent le siège ensemble, La bravoure, dont le comte d’Angoulême fit preuve en cette expédition, ne fut pas sans récompense ; elle lui valut cette même place dont il avait rendu maître le duc, qui la lui donna en bénéfice, avec d’autres terres situées dans l’Aunis, (Adémar.) Telle était l’opinion de sagesse où il était dans l’esprit de Guillaume le Grand, que ce prince ne faisait aucune entreprise sans le consulter. Il le mettait aussi de la partie dans ses pèlerinages, et surtout dans ceux qu’il faisait fréquemment à Rome. Durant un de ces voyages, Henri, prince de Rancogne, son vassal, profita de son absence pour élever à la bâte, l’an 1024, dans la semaine de Pâques, un château qu’Adémar de Chabannais appelle Fractarbot, dans la Saintonge. C’était, dit ce chroniqueur, fausser la foi qu’il avait faite à Guillaume avec serment prêté sur la chaussure de saint Cybar. Geoffroi, fils du comte, vengea cette félonie en passant son épée au travers du corps à Henri dans une occasion ou » ils se rencontrèrent. Le comte, à son retour, approuva la conduite de son fils, et ayant été faire avec lui le siège du château litigieux, il le prit, le rasa, le rétablit ensuite, et le donna à Geoffroi. Dans la même absence du comte d’Angoulême, Guillaume, vicomte de Martillac, et son frère Odolric, commirent une atrocité détestable envers Alduin, leur frère. Après une querelle qu’ils avaient eue avec lui au sujet du château de Rouffiac, en Saintonge, le comte les avait réconciliés avant son départ, et leur avait fait jurer amitié sur le corps de saint Cybar. Mais lorsqu’il fut parti, ayant invité Alduin chez eux, ils le surprirent dans son lit, lui arrachèrent la langue et lui crevèrent les yeux, après quoi ils allèrent se mettre en possession de Rouffiac. Guillaume Taillefer, à son retour, ne laissa pas ce forfait impuni. Il était en droit d’ôter la vie aux coupables ; mais ils se contenta de les priver de leurs honneurs, et rendit le château de Rouffiac au malheureux Alduin. Celui-ci avait un fils de même nom que lui, à qui le comte, quelques années après, fit présent de la terre de Martillac. (Bouquet, tom. X, pas. 160.) L’an 1026, Guillaume Taillefer entreprit le voyage de la Terre-Sainte, accompagné d’une nombreuse cavalcade, et prit sa route par la Bavière, la Hongrie et l’Esclavonie. De retour l’année suivante, au mois de juin , il tomba dans une maladie de langueur qu’on attribua aux maléfices d’une femme, laquelle, disait-on, avait fait de certaines figures de cire pour l’envoûter. Arrêtée pour ce sujet par les enfants du comte, elle nia le fait. On prît le parti de s’en rapporter au jugement de Dieu. Le champion qu’elle fournit fut battu. Cependant elle persista à se dire innocente, et la question qu’on lui fit subir ensuite ne put lui arracher aucun aveu. Le comte, à l’insu de qui cela s’était fait, ordonna, aussitôt cju’il en fût informé, de la renvoyer, et lui pardonna. Mais son successeur l’ayant depuis fait reprendre, la fit brûler vive avec d’autres personnes qu’on regardait comme ses complices. Guillaume cependant, tout occupé de l’affaire de son salut, reçut de la main de Rohon, son évêque, les derniers sacrements et mourut la veille des Rameaux, 6 avril 1028, laissant de Gerberge, son épouse, fille de Geoffroi Grisegonelle, comte d’Anjou, deux fils, Alduin et Geoffroi. Le comte Guillaume fut enterré à l’abbaye de Saint-Cybar, lieu de la sépulture de sa famille.

 ALDUIN II, ou HILDUIN

1028. Alduin II, fils de Guillaume II, lui succéda au comté d’Angoulême. Le-lendemain de la sépulture de son père, Geoffroi, son frère, lui enleva le, château de Blaye dont Guillaume le Grand avait fait présent à son père qui l’avait aidé à le prendre, mais Alduin y étant accouru avec des troupes, le reprit aussitôt, et revint célébrer les fêtes de Pâques à Angoulême. Geoffroi cependant employa le vendredi-saint et les deux jours suivants à construire un fort, vis-à-vis de Blaye. Alduin, après les fêtes, se mit en marche pour détruire cet ouvrage, et y réussit au bout de huit jours. Son frère, alors étant venu lui demander pardon, Alduin, non-seulement le reçut en grâce, mais il voulut partager avec lui la terre de Blaye. Ce comte, recommandable par sa vertu et son courage, fut empoisonné, l’an 1032, par sa femme ALAUSIE, fille de Sanche, duc de Gascogne, dont il avait deux fils, Guillaume, surnommé Chaussard, comte de Mastas, que Geoffroi, son oncle, priva du comté d’Angoulême, et Arnaud, dont on ne sait que le nom. L’historien des comtes et des évêques d’Angoulême se contredit en disant qu’Alduin survécut quatre ans à son père, et mourut en 1030. Le P. Labbe, éditeur de cet écrivain, soupçonne qu’il y a ici quelque altération dans le texte, et s’en tient, comme nous, à l’an 1032 pour l’époque de la mort d’Alduin,

 GEOFFROI TAILLEFER

1032. Geoffroi, second fils de Guillaume II, s’empara du comté d’Angoulême après la mort d’Alduin, son frère, au Préjudice de Guillaume, son neveu. On prétend que ce fut le duc Guillaume qui le substitua à son frère pour punir les enfants de celui-ci du crime de leur mère. Le surnom de Taillefer, qu’avaient déjà porté deux de ses prédécesseurs, et qu’il transmit à ses descendants, lui fut donné à cause de la force de son bras et de la bonté de ses armes avec lesquelles il fendait casques et cuirasses. Il avait tué de sa main Aimeri, seigneur de Fraimbot, parce qu’il refusait de rendre hommage à son père. On a vu la conduite qu’il tint à l’égard de son frère. Geoffroi mourut en 1048, laissant de sa femme Petronille d’Archiac, fille et héritière de Mornard, surnommé le Riche, seigneur d’Archiac et de Bouteville, Foulques, qui suit ; Geoffroi, vicomte de Blaye ; Arnaud, seigneur de Montausier ; Guillaume, évêque d’Angoulême ; Adémar, abbé de Stirpe, ou de Lesterp, au diocèse de Limoges, et ensuite successeur de Guillaume, son frère. Geoffroi du Vigeois lui donne de plus une fille, nommée Humberge, qu’il dit avoir épousé Adémar II, vicomte de Limoges.

 FOULQUES TAILLEFER

1048. Foulques, fils aîné du comte Geoffroi, lui succéda dans le comté d’Angoulême, et à sa mère, dans les seigneuries d’Archiac et de Bouteville. C’était un homme d’une force et d’un courage extraordinaires, dit un ancien, et très-habile dans l’art militaire. Foulques en donna des preuves en différentes occasions. Les Poitevins étant venus faire le dégât sur ses terres, il alla hardiment les attaquer, les repoussa jusqu’à Cognac, et fit un grand nombre de prisonniers. Le duc d’Aquitaine ayant assiégé le château de Mortagne, en Saintonge, castrum Mauritanie, il le contraignit de se retirer, lorsqu’il était sur le point de se rendre maître de la place. Il eut de grands démêlés avec Guillaume, son frère, évêque d’Angoulême, et ils en vinrent souvent aux armes. Leurs brouilleries commencèrent aussitôt que Guillaume monta sur le siège d’Angoulême. Le comte, son frère, après la mort de l’évêque Girard, prédécesseur de Guillaume, s’était emparé des fruits de l’évêché, prétendant que ceux de la première année lui appartenaient par forme d’annates, et cette prétention ne lui était point particulière. Plusieurs seigneurs étaient comme lui dans le préjugé, que dans le cas de mutation, ils avaient droit de percevoir l’année de relief sur les bénéfices, de même que sur les fiefs situés dans leurs mouvances. Les deux frères terminèrent enfin leurs longs et scandaleux débats par une réconciliation qui fut sincère. Ils assistèrent l’an 1059, l’un et l’autre, au sacre du roi Philippe I. L’ancien historien des évêques et des comtes d’Angoulême, dit que Foulques mourut dans un âge fort avancé, l’an 1087 ; mais il y a faute de copiste dans son texte, quoique trois manuscrits, collationnés par le P. Labbe, confirment cette leçon, ou bien l’auteur s’est trompé lui-même : car Besli rapporte (p. 408) une charte de Jourdain de Chabannais, qui prouve que Foulques vivait encore en 1089. Ce comte avait épousé Condo, fille d’Ounorman Vagena, dont il eut Guillaume, qui suit ; et N. première femme d’Adémar III, vicomte de Limoges.

 GUILLAUME III TAILLEFER

1089 au plutôt. Guillaume, fils de Foulques, lui succéda au comté d’Angoulême et dans ses autres domaines. Il était petit de corps, mais bien pris dans sa taille, et d’une force supérieure à ce que sa figure annonçait. Il a même tué, dit l’ancien auteur déjà cité, quelques chevaliers d’un coup de lance, en la leur enfonçant au travers de leur bouclier et de leur cuirasse, et l’on tient communément que jamais on n’a pu le désarçonner, ni le faire tomber de cheval. Il défendit courageusement, pour la comtesse Almodis, le comté de la Marche, contre Hugues, de Lusignan, qui voulait se l’approprier par droit d’hérédité. Il eut aussi la guerre avec Guillaume IX, duc d’Aquitaine, avec Adémar d’Archiac, avec Bardon de Cognac, et d’autres seigneurs, alliés ou vassaux du duc. Le comte d’Angoulême remporta sur eux quelques victoires ; mais à la fin il fut fait prisonnier dans un combat contre ces mêmes ennemis, et ne recouvra sa liberté qu’en donnant pour sa rançon la baronnie de Mastas [Matha], qu’il vint ensuite à bout de reprendre avec l’aide de son fils aîné, par les conseils de Girard, évêque d’Angoulême, et légat du saint siège, c’est-à-dire après l’an 1106, époque de la légation de Girard. Le comte Guillaume entreprit, sur la fin de ses jours, le pèlerinage de Jérusalem, et mourut à son retour, le 6 avril, veille des Hameaux, suivant son épitaphe qui est à Saint-Cybar, dans la chapelle de Saint-Denis, ce qui se rapporte à l’an 1118, et non 1120, comme le marque Corlieu. (Cart. de S. Cybar.) De Vitapoi, son épouse, fille et héritière d’Amanieu, seigneur de Benauges et de Saint-Macaire, en Gascogne, il laissa Wulgrin, qui suit ; Raymond, sire de Fronsac ; et Foulques, seigneur de Montausier ; avec deux filles, dont l’une, nommée Alix, épousa Eudes, vicomte de Thouars. On ignore le nom et le sort de l’autre.

 WULGRIN II TAILLEFER

1120. Wulgrin II, fils aîné de Guillaume III, et son successeur au comté d’Angoulême, était, suivant le portrait qu’un ancien nous en a laissé, d’une taille avantageuse, d’un port majestueux, prudent, habile au métier de la guerre, patient, à l’épreuve des travaux, la terreur de ses ennemis, le bouclier de ses sujets, vigoureux et robuste ; qualités qui lui procurèrent presque toujours d’heureux succès dans ses expéditions militaires. L’auteur fait ensuite l’éloge de sa chasteté y de sa charité envers les pauvres, de sa libéralité envers les églises, et ne blâme en lui que l’ambition immodérée qu’il eut de s’agrandir. Il avait déjà fait ses preuves de valeur du vivant de son père. Outre le château de Mastas [Matha], qu’il l’avait aidé à reprendre, comme on l’a dit, il avait retiré de force celui d’Archiac, des mains d’Adémar d’’Archiac, qui s’en était emparé par surprise ; devenu comte d’Angoulême, il recouvra et rebâtit le château de Blaye, que le duc d’Aquitaine avait démantelé, après s’en être rendu maître, et en fit une forteresse imprenable. L’an 1126, il fiança Robert le Bourguignon, son parent, à l’Héritière de Chabannais et de Confolens. Mais Adémar de la Rochefoucauld revendiqua cet héritage du chef de sa femme ; et ayant mis dans ses intérêts Guillaume IX, duc d’Aquitaine, il prit les armes pour s’en emparer. Il y réussit moins par sa valeur que par la trahison de ceux à qui la garde des châteaux était confiée. Guillaume IX étant mort l’année suivante, Robert, avec l’aide de Wulgrin, reprit l’une et l’autre terres sous Guillaume X, nouveau duc d’Aquitaine Il les céda ensuite avec sa future épouse, à Guillaume de Mastas, frère de Robert de Montberon. Le duc, menaçant de les reprendre, Wulgrin amena des troupes pour en défendre les châteaux, et y attendit, mais vainement, un mois entier, l’arrivée du duo : Ce prince, voyant la valeur et l’intrépidité de Wulgrin, aima mieux l’avoir pour ami que pour ennemi. Ils firent la paix ensemble, et quelque tems après, ils vinrent de compagnie faire le siège du château de Montignac, que Girard de Blaye avait enlevé à Wulgrin. La plupart des barons de Poitou et de Saintonge, étant accourus au secours de la place, Wulgrin l’emporta malgré leurs efforts, et après en avoir fait hommage à Girard, évêque d’Angoulême, comme d’un fief mouvant de son église, il en fit relever les murs, et bâtit au milieu une grosse tour ou donjon, dont on voit encore les restes. La réconciliation du duc et du comte ne fut pas constante. Le premier ayant rasé une forte place, voisine de Pons, nommée la Tour Geoffroi, le seigneur de Pons, à qui elle appartenait, appela Wulgrin à son secours, et on allait en venir à une bataille, sans l’intervention de Lambert, nouvel évêque d’Angoulême, et d’autres personnes sages, qui vinrent à bout d’accorder les parties. Wulgrin se rendit célèbre par d’autres exploits militaires que nous passons sous silence. Il était occupé à punir la révolte des seigneurs de la Rochefoucauld et de Verteuil, ses vassaux, et s’était même déjà rendu maître d’une partie de leurs terres, lorsqu’étant tombé malade d’une fièvre maligne au château de Bouteville, il y mourut le 16 novembre 1140, a l’âge de cinquante-un ans, entre les bras de l’évêque d’Angoulême, emportant dans le tombeau la réputation de l’un des plus grands capitaines de son temps. Son corps fut inhumé à Saint Cybar, lieu de la sépulture de ses ancêtres. (Labbe, Bibl. mss., t. II, pp. 261-263). Il laissa de Ponce de la Marche, sa première femme, fille de Roger de Montgommeri et d’Almodis de la Marche, Guillaume, qui suit ; et d’Amable, la seconde, fille du vicomte de Chatelleraut, Foulques, seigneur de Mastas, et Geoffroi-Martel, qui fit le voyage de la Terre-Mainte, en 1180, avec Hugues de Luzignan, et mit en fuite l’armée de Noradin devant Tripoli. Nous ne connaissons point Rodelinde, fille de Raymond, comte de Toulouse, que M. Expilli donne pour femme à Wulgrin II, et qui lui apporta, selon cet estimable écrivain, l’Agénois en dot.

 GUILLAUME IV TAILLEFER

1140. Guillaume IV était dans sa première jeunesse lorsqu’il succéda à Wulgrin, son père, au comté d’Angoulême. A peine fut-il en possession de sa dignité, qu’il inquiéta Lambert, son évêque, et voulut lui retrancher certains droits dont il jouissait. Le roi Louis le Jeune, à qui le prélat en porta ses plaintes, écrivit au comte, pour lui ordonner de rendre à l’église d’Angoulême ce qu’il lui avait enlevé. Guillaume, à ce qu’il paraît, obéit. Il se tourna ensuite contre ses barons, qu’il porta à se soulever, par les entreprises qu’il fit sur eux. Ses propres frères, qu’il n’épargnait pas, se joignirent aux mécontents. L’an 1147, s’êtant embarqué avec le comte de Toulouse (Alfonse-Jourdain) pour la croisade, il reçut un accueil distingué a la cour de Constantinople, où il passa ; ce fut un des seigneurs qui perdirent le moins de monde dans cette expédition. L’historien des évêques et des comtes d’Angoulême dit même qu’il parvint sain et sauf à Jérusalem avec toute la division qu’il conduisait, tandis que l’empereur et le roi de France perdirent la plus grande partie des leurs en traversant les déserts de l’Asie ; qu’il soulagea de ses propres fonds la misère de la plupart des chevaliers réduits à la mendicité, et qu’il effaça tous les autres seigneurs et princes, par ses libéralités. De retour en France, il eut une rude guerre avec Ranulfe d’Agernac, son beau-frère, qu’il prit dans une rencontre où Ranulfe venait à lui avec des forces beaucoup supérieures aux siennes. Guillaume Manigot, qui était accouru pour délivrer Ranulfe, eut le même sort. Ce ne furent pas les seuls ennemis que le comte Guillaume eut à combattre. Il semblait que toute la noblesse de l’Angoumois et des environs fût conjurée contre lui. On vit encore ses frères, Foulques et Geoffroi-Martel, lui déclarer la guerre, et ce ne furent pas les moins acharnés de ses ennemis. Mais enfin sa valeur triompha de leurs attaques. S’étant joints à Foucaud d’Archiac, a ltier de Cognac, à Gui de la Rochefoucauld, et à plusieurs autres barons, ils étaient venus à bout de lui enlever la forteresse de Macurie. Mais ils n’en restèrent pas long-tems maîtres, et Guillaume la reprit en moins d’un mois d’intervalle après un siège vigoureusement poussé. Il attaqua ensuite le château de la Rochefoucauld, dont il pilla et livra les dehors aux flammes. C’est tout ce que nous apprend de cette guerre l’ancien historien des évêques et des comtes d’Angoulême, publié par le P. Labbe. (Bibl. no. mss t. II.)

L’an 1168, mécontent de Henri II, roi d’Angleterre, le comte Guillaume forma une ligue contre lui avec le comte de la Marche, et d’autres vassaux du duché d’Aquitaine, sous la protection du roi de France. Henri, apprenant qu’ils dévastent le Poitou, vient sur les lieux avec une armée, poursuit de poste en poste les rebelles, et les oblige, l’année suivante, à venir lui demander pardon à Montmirail. (Robert du Mont.) L’an 1175, nouvelle ligue formée contre le roi d’Angleterre et contre le duc Richard, son fils, par le comte d’Angoulême, le comte de la Marche, et les vicomtes de Limoges, de Ventadour et de Chabannais. Pour appuyer leur révolte, ces seigneurs soudoient les Brabançons, espèce d’aventuriers qui vendaient leurs services au plus offrant. A la téte de ces brigands, les confédérés firent des ravages horribles dans le Poitou. Mais Jean aux belles mains, évêque de Poitiers, ayant rassemblé des troupes à la hâte, et s’étant joint à Thibaut Chabot, chef de la milice d’Aquitaine, tous deux fondirent en même temps sur eux, en tuèrent un grand nombre, en brûlèrent plusieurs dans les maisons où ils s’étaient retranchés, et contraignirent le reste à se réfugier dans une tour, abandonnant leur bagage à ceux qui les poursuivaient. L’année suivante, le duc Richard, revenu d’Angleterre, où il était pendant les derniers ravages, taille en pièces, entre Bouteville et Saint-Mégrin, vers la fin de mai, les nouvelles troupes que les confédérés avaient levées, prend et rase leurs châteaux, et force en dernier lieu celui de Moulin-Neuf, dans lequel il fait prisonnier le comte d’Angoulême avec son fils et les autres chefs de la ligue. Benoit de Peterborough dit que ce fut dans Angoulême qu’ils furent pris. Nous verrons de nouveaux détails de cette affaire sous le successeur de Guillaume. Celui-ci, remis en liberté quelque tems après, entreprit, avec d’autres, une nouvelle expédition à la Terre-Sainte. Ils partirent au mois de juillet 1178 ; mais le comte d’Angoulême ne passa point la Sicile, et mourut le 7 août suivant à Messine, selon Geoffroi du Vigeois. Il avait épousé, 1°. du vivant de son père, Emme fille d’Aimar ou Adémar III, vicomte de Limoges, après l’avoir enlevée, suivant Geoffroi du Vigeois, à Guillaume X, duc d’Aquitaine, pendant son pèlerinage de Saint-Jacques, et cela par le conseilles seigneurs limousins, qui redoutaient la domination des Poitevins ; 2°. L’an 1150, Marguerite, fille de Raymond I, vicomte de Turenne, veuve d’Adémar IV, vicomte de Limoges, puis d’Ebles III, vicomte de Ventadour, dont il eut, entr’autres enfants, Wulgrin, qui suit ; Guillaume et Adémar, qui lui succédèrent ; Hélie, qui fut un guerrier fameux ; et Almodis, femme, 1°. d’Amanieu IV, sire d’Albret ; 2°. de Bernard, vicomte de Brosse.

 WULGRIN III TAILLEFER

1179. Wulgrin III, successeur de Guillaume, son père, ne lui survécut pas deux ans entiers, suivant Geoffroi du Vigeois, qui met néanmoins, sa mort au 29 juin de l’année 1181, en quoi cet écrivain se contredit. Nous pensons qu’il a voulu dire trois ans au lieu de deux. Il paraît que Wulgrin était associé à son père dès l’an 1176 ; car c’est lui que Raoul de Diceto, qui le nomme Bulgarin, donne pour auteur principal des ravages que firent cette année dans le Poitou, comme nous l’avons déjà dit, les seigneurs d’Aquitaine confédérés contre le duc Richard, qui était pour lors en Angleterre. Mais Jean, évêque de Poitiers, dit cet historien, ayant rassemblé de toutes parts des troupes auxiliaires, et, s’étant joint à Thibaut Chabot qui commandait la milice ducale, marcha contre ces destructeurs de châteaux, ces pillards de campagnes, ces brûleurs d’églises, ces oppresseurs de vierges ; et les ayant rencontrés dans la plaine de Brezé, il partagea son armée en quatre corps qui fondirent en même tems sur eux, en tuèrent un grand nombre, et obligèrent les autres à se sauver dans une forteresse, avec tant de précipitation, qu’ils abandonnèrent tout leur bagage à l’ennemi. Cet avantage ne dissipa point la ligue. Roger d’Hoveden nous apprend qu’elle continua pendant trois ans ses déprédations, sous le même Wulgrin qu’il appelle Bugrius. Mais l’an 1178, le duc Richard, dit-il, vint a bout de la détruire. Après avoir réduit, ajoute-t-il, le comte de Bigorre, il prit Gençai, Martillac, Granville, Taillebourg, Pons, toutes places fortes qu’il fit raser ; força ensuite le comte d’Angoulême de lui remettre cette ville avec le château de Montignac, et en fit abattre les murs. Raoul de Diceto met ceci en 1177, et dit que Richard obligea de plus le comte avec ses complices de passer la mer pour aller demander grâce au roi son père ; ce qu’ils obtinrent à Winchester, le 21 septembre. Wulgrin ne laissa qu’une fille, nommée Mathilde, à qui ses oncles, Guillaume et Adémar, disputèrent la succession de son père. Le duc Richard, depuis roi d’Angleterre, avant pris sa défense, les chassa du pays ; mais bientôt ils y rentrèrent à la faveur de la division qui s’éleva entre Richard et ses frères.

 MATHILDE, GUILLAUME et ADÉMAR, ou AIMAR.

1181. Mathilde, fille de Wulgrin III, se maintint, avec la protection du duc Richard, dans une partie de l’Angoumois, dont l’autre demeura entre les-mains de ses oncles, Guillaume V et Aimar. Mathilde avait aussi des prétentions bien, fondées sur le .comté de la Marche, dont Hugues IX, sire de Lusignan, s’était mis en possession. Pour terminer leur différent, elle consentit à la demande qu’il lui fit de sa main, et l’épousa. (Voy. les comtes de la Marche.) Guillaume V, oncle de Mathilde, mourut vers le même tems ; et, comme il ne laissa point de postérité, sa succession fut recueillie par son frère. L’an 1188, Aimar étant entré dans la confédération de plusieurs seigneurs poitevins et du vicomte de Limoges, contre le duc Richard, dévaste avec eux les terres de ce prince, qui ne tarde-pas à leur rendre la pareille. (Bened. Petroburg.). L’an 1192, tandis que Richard, devenu roi d’Angleterre, était à la croisade, Aimar profita de son absence pour achever de dépouiller sa nièce. La nouvelle de la captivité de ce prince l’enhardit ensuite à se jeter sur ses terres, qui souffrirent beaucoup des excursions d’Aimar et de ses confédérés. Ils commirent ces hostilités d’autant plus librement que le sénéchal de Gascogne, seul capable de leur résister, était malade pour lors. Mais étant revenu en santé, il monta aussitôt à cheval et prit sa revanche. Le prince de Navarre, Sanche le Fort, beau-frère de Richard, vint se joindre au sénéchal, suivant Guillaume de Newbrige, et contribua beaucoup aux succès de ses armes, qui furent néanmoins balancés par des revers. Geoffroi de Rançon, sire de Taillebourg, l’un des plus formidables alliés d’Aimar, mourut dans ces entrefaites, et laissa un vide considérable dans le parti du comte. Mais sa mort ne termina point la guerre. L’an 1194, Richard, de retour dans ses états, vient en personne dans l’Aquitaine, avec une puissante armée, assiège Taillebourg, qu’il prend par composition, et se rend maître de toutes les autres places qui dépendaient de ce château ; de là, étant passé dans l’Angoumois, il soumet tout ce pays avec une telle rapidité, qu’en six heures de tems, il emporta la capitale après un assaut des plus sanglants. C’est ce qu’il marque dans une lettre du 22 juillet de cette année (1194), à Hubert, archevêque de Cantorberi, ajoutant qu’il avait fait prisonniers, dans cette guerre, près de trois cents chevaliers et environ quarante mille soldats : Philippe Auguste, qui avait excité la révolte de ces vassaux, demeura, pendant cette scène, dans l’inaction, pour ne point mettre obstacle à une trêve qui se ménageait entre les deux couronnes. Elle fut, en effet, conclue par leurs plénipotentiaires, le 23 juillet, entre Verneuil et Tillières, suivant Roger d’Hoveden. Aimar n’eut plus alors de ressource que dans la générosité de Richard. Il vint à bout de le fléchir et de rentrer dans ses terres par un accommodement, au moyen duquel il fiança sa fille unique, Isabelle, avec le fils de Hugues et de Mathilde, nommé comme son père. Isabelle, n’étant point encore nubile, fut remise entre les mains de sa belle-mère future, pour assurer l’effet de la promesse, mais, l’an 1200, comme on était près de célébrer le mariage, le roi Jean, successeur de Richard, engagea le père d’Isabelle à lui remettre sa fille, puis l’épousa ; d’autres disent qu’il l’enleva de force. Le jeune Hugues ressentit vivement cet affront. Résolu d’en tirer vengeance, il fit une ligue avec plusieurs de ses parents et amis, qui, s’étant réunis, portèrent le fer et le feu jusque sur les frontières de Normandie. Le roi Jean, pour les punir, confisqua leurs terres à son profit. Mais Philippe Auguste, à qui ces vassaux dépouillés eurent recours, prit chaudement leurs intérêts, et telle fut la première étincelle qui alluma cette longue et fameuse guerre des deux monarques, dont l’issue fut si funeste a l’Angleterre. Isabelle, après la mort du roi Jean, passa entre les bras de ce même Hugues, à qui elle avait d’abord été promise. Le père de cette princesse survécut à sa femme Alix, qui lui avait donné sa main après avoir été séparée de Guillaume I, comte de Joigni, son premier époux. Elle était petite-fille de Pierre de Courtenai, fils du roi Louis le Gros, et mourut en 1218, peu de tems avant son époux.

 HUGUES X DE LUSIGNAN

1208. Hugues X, fils de Hugues IX, succéda à Mathilde, sa mère, dans le comté de la Marche. L’an 1213 , il se déclare pour Jean , roi d’Angleterre, contre le roi de France, et va le recevoir à sa descente , au port de la Rochelle, avec des troupes. L’an 1217, il épouse ISABELLE, fille d’Aimar, comte d’Angoulême, et veuve du roi d’Angleterre, la même que ce prince lui avait enlevée en 1200. Hugues, en vertu de ce mariage, hérita, l’année suivante, du comté d’Angoulême, par la mort de son beau-père. Il partit pour la croisade, l’an 1218, avec le comte de Bar-sur-Seine, et se trouva au siège de Damiette, qui fut pris le 5 novembre, (et non le 9 mars) 1219. Hugues, l’an 1226, entra dans le parti des seigneurs ligués contre la reine Blanche, régente du royaume : mais l’an 1227, il fut obligé, avec le duc de Bretagne, de venir faire satisfaction au roi saint Louis, le 16 mars, dans le château de Vendôme. Ce monarque ayant investi, l’an 1241, son frère Alfonse, du comté de Poitiers, Hugues va, comme les autres vassaux du Poitou, rendre hommage à son nouveau suzerain. Mais les reproches de la comtesse reine, sa femme (car c’est ainsi qu’Isabelle se qualifiait), l’ayant fait repentir de cette démarche trop humiliante au gré de cette princesse, il ose insulter publiquement le comte de Poitiers. Saint Louis ne laissa pas impuni l’outrage fait à son frère. L’an 1242, il arrive dans le Poitou, ravage les terres du comte de la Marche, prend ses meilleures places, bat le roi d’Angleterre, qu’il avait appelé à son secours, et le force enfin à venir demander pardon, avec sa femme, et à se soumettre, haut et bas, à toutes les conditions qu’il plut au monarque de lui imposer. Le traité d’accommodement fait entre le roi et le comte, est daté du 3 août 1242, au camp près de Pons. On conserve encore (1785), au trésor des chartes, ce traité, signé de la main du comte de la Marche, et du Cange le rapporte tout au long dans ses observations sur la vie de saint Louis. L’an 1243, Hugues est accusé de haute trahison par un gentilhomme qui s’offre d’en fournir la preuve par le duel. Hugues accepte le défi. Le jeune Lusignan demande de combattre pour son père : le comte de Poitiers s’y oppose, disant que l’innocent ne doit pas périr pour le coupable. Saint Louis tranche la difficulté en déclarant qu’il veut bien tenir l’accusé pour innocent. L’an 1248, le comte de la Marche donne son fils à ce monarque pour l’accompagner à la croisade. Il meurt lui-même l’année suivante, et son corps est porté à l’abbaye de Valence, près de Couhé. Il laissa neuf enfants, dont les principaux sont : Hugues, qui suit ; Gui, sire de Cognac et d’Archiac ; Guillaume, dit de Valence, tige des comtes de Pembrock, en Angleterre ; Geoffroi, sire de Jarnac ; Adémar, évêque de Winchester ; Marguerite, femme de Raymond VII, comte de Toulouse ; Alfaïs, femme de Jean I , comte de Varennes. La comtesse-reine Isabelle mourut en 1243, et fut enterrée à l’abbaye de la Couronne : l’ambition démesurée de cette femme, la noirceur de son caractère, et ses emportements, qui allaient jusqu’à la fureur, lui firent donner le nom de Jézabel au lieu de celui d’Isabelle, par une anagramme qui lui convenait fort. Lorsqu’après avoir soulevé le comte, son époux, contre le frère de saint Louis, elle vit arriver le monarque pour punir celte révolte, elle prépara de ses mains un poison dont elle avait le secret, et chargea des scélérats d’en faire glisser dans la coupe où le roi buvait. Dieu permit que le complot fût découvert. On arrêta ces émissaires, et, sur leur déclaration, ils furent pendus. Quand la comtesse, disent les Annales de France, sut que sa mauvaisetié estoit découverte, de deuil elle se cuida précipiter et frapper d’un coustel en sa poitrine, qui ne lui eust osté de la main ; et quand elle vit qu’elle ne pouvoit faire sa volonté, elle desrompit sa guimpe et ses cheveux, et ainsy fut longuement malade de dépit et de déplaisance.

 HUGUES XI LE BRUN

1249. Hugues XI, comte de Penthièvre par sa femme, fils aîné de Hugues X, lui succéda aux comtés de la Marche et d’Angoulême. Il était entré, l’an 1247, dans l’association, des seigneurs, formée pour restreindre la juridiction des ecclésiastiques, qui ruinait la justice séculière. On prétend que cette association fut autorisée par saint Louis ; mais on n’a aucun détail sur les suites qu’elle eut, ni sur la manière dont la dispute se termina. Ce que nous savons, c’est que vers l’an 1253, le comte Hugues excita la plus violente persécution contre son évêque, Robert de Montberon, jusqu’à le chasser avec son clergé, après s’être emparé des revenus de l’évêché. L’infortuné prélat implora la justice de saint Louis, qui soumit cette affaire à l’examen et au jugement des évêques de Limoges et de Cahors. Le comte fut condamné à assister, couvert d’un sac, ayant la tête et les pieds nus, à une procession indiquée pour ce sujet, à confesser publiquement son crime et à en demander pardon à l’évêque. On l’obligea de plus à payer une amende de cinq cents livres, et à l’entretien de trois cierges qui brûleraient à perpétuité au grand autel, pendant la célébration des Saints-Mystères. (Les rois de France, comme représentant les comtes d’Angoulême, doivent payer ces trois cierges.) Le comte Hugues mourut âgé de quarante ans, suivant le P. Anselme, en 1260. Yolande de Dreux, son épouse, fille de Pierre Mauclerc, duc de Bretagne, lui donna cinq enfants, dont l’aîné, nommé comme son père, lui succéda. (Voy. les comtes de Penthièvre.)

 HUGUES XII LE BRUN

1260. Hugues XII le Brun, XIIe. du nom de Lusignan, succéda aux comtés de la Marche et d’Angoulême à Hugues XI, son père. L’an 1262, Gui, son frère, seigneur de Cognac, à son retour d’Angleterre, et sa sœur Yolande, lui suscitèrent un procès pour avoir leur part dans la succession paternelle. Par arrêt du parlement, de la Saint-Martin d’hiver 1268, il fut dit que le seigneur Gui, frère du comte, recevra de lui, six cents livres tournois, et que lorsqu’il viendra chez son frère avec sept chevaliers à sa suite , il y sera défrayé avec sa compagnie, qu’il recevra des robes avec deux palefrois, un pour lui et l’autre pour son écuyer, et cela jusqu’à ce qu’il ait obtenu la part qu’il doit avoir dans l ’héritage de son père ; que pareillement sa sœur recevra deux cents livres tournois, jusqu’à ce qu’elle soit mise en jouissance de sa part de la succession paternelle. (Pet. a S. Romual. contin. Chron. Ademari, pag. 161.) L’an 1265, Hugues fit expédier à Dorat une charte portant ordre à ses vassaux de la Marche, de se conformer aux coutumes de Montferrand, et non à celles de Limoges, qui étaient prises du droit romain. Les Haut-Marchais, ainsi que la ville de Guéret et ses environs, déférèrent à cette ordonnance ; et telle est l’origine de la coutume qui les gouverne encore de nos jours (1785). Mais Bellac et la Basse-Marche refusèrent de s’y soumettre, et continuèrent de suivre les lois romaines, comme ils font encore à présent. L’an 1267, Aliénor, comtesse de Leycester, femme de Simon de Montfort, suscita un nouveau procès à Hugues, prétendant qu’elle devait avoir sa part dans le comté d’Angoulême, comme fille de Mathilde, bisaïeule de ce comte. L’affaire fut portée à la cour du parlement. Le comte dans ses défenses, prétendit que la comtesse n’était pas recevable dans sa demande, attendu que le comté d’Angoulême était impartable. Il fut prouvé néanmoins par enquête, qu’il s’en était fait autrefois des démembrements en faveur des puînés, et Geoffroi, oncle paternel du comte, en était lui-même un exemple. Mais on convint que ces démembrements n’étaient que des apanages réversibles à l’aîné au défaut des apanages. En conséquence, le comte fut condamné par arrêt de l’an 1269, à payer à la comtesse de Leycester annuellement, par forme d’apanage, quatre cents livrées de terre, monnaie courante dans le comté d’Angoulême : Appanamentum quadragentarum libratarum terrae monetatae currentis in comitatu Engolismensi, et huit cents livrées pour les arrérages. (Du Cange, Gloss. verbo, appanamentum.) Hugues XII épousa, en 1253, Jeanne de Fougères, fille unique et présomptive héritière de Raoul III, baron de Fougères, et d’Isabelle de Craon. Raoul III étant mort en 1256, Hugues XII hérita du comté de Porhoet du chef de sa femme. Hugues, suivant Corlieu et Pierre de Saint-Romuald, mourut l’an 1282, et fut enterré à l’abbaye de la Couronne. Il laissa deux fils, Hugues, qui suit ; et Gui, avec quatre filles, dont la seconde, Marie, épousa, l’an 1288, Etienne II, comte de Sancerre.

 HUGUES XIII

Hugues XIII, du nom de Lusignan, né le 26 juin 1259, fils et successeur de Hugues XII aux comtés de la Marche et d’Angoulême, engagea, l’an 1301, le premier de ces deux comtés au roi Philippe le Bel, pour une grosse somme d’argent. Il servit, l’année suivante, dans la guerre de Flandre, et mourut au mois de novembre de l’an 1303, sans laisser d’enfants de sa femme Beatrix, fille de Hugues IV, duc de Bourgogne, qu’il avait épousée en 1276 à Paris. L’an 1283, il avait fait un testament, par lequel il instituait son héritier Gui, ou Guyart, son frère ; mais Gui lui ayant fait depuis la guerre, Hugues fit, l’an 1297, un nouveau testament en faveur de Geoffroi, son cousin. Néanmoins, Hugues étant mort, Gui prit le titre de comte de la Marche et d’Angoulême, après avoir brûlé le dernier testament de son frère. Mais le roi Philippe le Bel, instruit de cette supercherie, qui le privait lui-même de plusieurs avantages que le comte Hugues lui avait faits par ses dernières dispositions, et d’ailleurs indisposé contre Gui, pour s’être joint aux Anglais, et leur avoir livré Cognac et Merpins, prétendit que les comtés de la Marche et d’Angoulême, devaient lui revenir par droit de confiscation. En conséquence, il fit condamner Gui en douze mille livres d’amende, ce qui l’obligea de renoncer à la succession. Ce prince transigea ensuite, l’an 1308, avec Marie de la Marche, comtesse de Sancerre, et Isabelle, femme d’Hélie Rudel, sire de Pons, sœurs de Hugues XIII, pour les prétentions qu’elles avaient auxdits comtés, dont il demeura par-là seul propriétaire. Telle fut la fin des anciens comtes de la Marche et d’Angoulême.

 LOUIS D’ORLÉANS.

Louis, second fils du roi Charles V nommé à sa naissance, comte de Valois, créé duc d’Orléans en 1392 , joignit ensuite à cet apanage les comtés d’Angoulême, de Périgord et de Dreux. Il était né le 13 mars, un samedi de l’an 1372 (n. st.), à l’hôtel de Saint-Paul, et fut baptisé le lundi suivant dans l’église de Saint-Paul, par Jean de Craon, archevêque de Reims, assisté de douze évêques en habits pontificaux. Le parrain, nommé par le roi, fut Louis, duc d’Anjou. Mais comme il était absent, Louis, comte d’Etampes, tint sa place au baptême, avec Bertrand du Guesclin, connétable de France. A cette cérémonie, le connétable tira son épée, et, l’ayant mise dans la main de l’enfant pendant qu’on le tenait nu sur les fonts, suivant la coutume de ces tems-là, il lui dit d’une voix haute : Monseigneur, je vous donne cette épée et la mets en votre main, et prie Dieu qu’il vous doint autel et si bon cœur que vous soyez aussi bon chevalier comme fut oncques roy de France qui portast épée. Amen, amen, amen. (Dormai, Hist. de Soissons, tom. Il, p. 356.) L’état de démence où tomba le roi Charles VI, son frère, occasionna une vive querelle entre lui et Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, touchant la régence. Philippe, ayant été tuteur du roi son neveu, prétendait que le gouvernement de l’état lui était en conséquence dévolu par l’empêchement de ce monarque. Louis l’emporta par le crédit de la reine lsabeau, sa belle-sœur, avec laquelle il vivait dans un commerce fort équivoque. Mais l’abus qu’il fit de son pouvoir, irrita la jalousie des grands et lui attira la haine du peuple. Il donna cependant des preuves de son amour patriotique dans la guerre qui se faisait alors contre les Anglais. L’an 1402 , il envoya de Couci, le 7 août, au roi d’Angleterre, Henri IV, un cartel de défi, dans lequel il le traitait d’usurpateur de la couronne. Henri lui ayant répondu le 5 décembre suivant, le duc répliqua sans ménagement, le 26 mars 1403 (n. st.), reprochant à Henri d’avoir fait mourir le roi Richard II, son prédécesseur, et dépouillé la reine Isabelle de France, sa veuve. Mais les choses en demeurèrent là. Le duc Philippe étant mort l’an 1404, fut remplacé par Jean, son fils, dont le caractère impétueux ranima la querelle de sa maison avec celle d’Orléans. Pour prévenir les suites funestes que leurs débats donnaient lieu de craindre, on prit le parti d’envoyer les deux princes faire la guerre aux Anglais. Le duc d’Orléans partit pour la Guienne où il prit Blaye, mais il échoua devant Bourg. De retour à Paris, il donna les mains à la réconciliation qui fut ménagée entre lui et le duc de Bourgogne, par Jean, duc de Berri, leur oncle. Il la croyait sincère ; mais elle ne l’était que de son côté, quoique cimentée de part et d’autre parce qu’il y avait de plus sacré. Il ne tarda pas à devenir la victime de sa crédulité. Le 26 novembre de l’an 1407, un mercredi, vers neuf heures du soir, comme il revenait de l’hôtel de la reine, logée à la rue Barbette, monté sur sa mule, et chantant, il fut assassiné par Raoul d’Auquetonville, écuyer d’écurie du roi, et autres gens apostés par le duc de Bourgogne. Son corps fut inhumé dans l’église des Célestins de Paris, ou l’on voyait son tombeau de marbre, que son petit-fils, le roi Louis XII, fit construire en 1504. (Voyez Charles VI, roi de France, et Jean, duc de Bourgogne.). De Valentine, son épouse, fille de Jean Galeas Visconti, premier duc de Milan, qu’il avait épousée au mois de septembre 1389, morte le 4 décembre 1408, il laissa Charles, duc d’Orléans ; Philippe, comte de Vertus ; Jean, qui suit ; et Marguerite, femme de Richard de Bretagne, comte d’Etampes. Il eut de plus un fils naturel ; Jean, comte de Dunois, célèbre par sa valeur, et tige, des ducs de Longueville.

 JEAN D’ORLÉANS

1407. Jean, troisième fils de Louis, duc d’Orléans, et de Valentine de Milan, né le 26 juin 1404, succéda à son père dans le comté d’Angoulême. Sa maison n’ayant pu acquitter la somme de cent quarante-cinq mille livres sur celle de deux cent quarante mille, selon Papire Masson, ou de trois cent mille, suivant le P. Anselme, qu’elle s’était engagée à payer aux Anglais, pour les secours qu’ils lui avaient fournis contre la maison de Bourgogne, il fut donné en otage pour assurance du surplus de la première semaine de novembre de l’an 1412, et emmené en Angleterre, où il resta jusqu’en 1444. De retour en France, il se retira dans son comté d’Angoulême, d’où il alla joindre, en 1451, le comte de Dunois qui faisait la guerre en Guienne aux Anglais. Cette expédition finie, il revint dans ses terres où il passa le reste de ses jours dans l’étude et les exercices de piété. La mort l’enleva dans son château de Cognac, le 30 avril 1467. Son corps, inhumé dans la cathédrale d’Angoulême, s’était conservé tout entier, à l’exception du cœur qui est aux Célestins de Paris, lorsque les Calvinistes, l’ayant découvert en 1562, le mirent en pièces. Il avait épousé, par contrat du 31 août 1449, Marguerite, fille d’Alain IX, vicomte de Rohan, dont il laissa Charles, qui suit ; et Jeanne, femme de Charles de Coëtivi, comte de Taillebourg. Il eut aussi un bâtard nommé Jean, qui fut légitimé par le roi Charles VII.

 CHARLES D’ORLÉANS.

1467. Charles, né l’an 1459, successeur de Jean, son père, au comté d’Angoulême, assista, l’an 1484, aux états-généraux de Tours, où, quoique plus proche de la couronne que le duc d’Alençon, il n’eut rang qu’après lui. C’est que dans ces grandes assemblées les princes du sang n’avaient point encore d’autre rang entre eux que celui de leur pairie [2]. Charles épousa, par contrat passé à Paris le 16 février 1487 (v. st.) Louise, fille aînée de Philippe, dit Sans-Terre, comte de Bresse, puis duc de Savoie, née le 11 septembre 1476. Il mourut le 1er janvier de l’an 1496 (n. st.), laissant de son mariage un fils qui fut notre roi François et une fille, Marguerite, alliée 1° à Charles, duc d’Alençon ; 2°. à Henri d’Albret, roi de Navarre. (Voyez les rois de Navarre) Il laissa de plus trois filles naturelles, savoir, Jeanne, qui fut mariée à Jean de Longwi, seigneur de Givri, issu des anciens comtes de Châlons, seigneur très-opulent ; Madeleine, abbesse de Saint-Auzony, et Souveraine, qui épousa Michel Gaillard, chevalier, seigneur de Chilli et de Longjumeau. La duchesse Louise survécut long-tems à son époux. Ce fut elle qui forma la jeunesse de son fils. Ce prince marqua presque toujours pour les volontés de sa mère une déférence dont il eut plus d’une fois : à se repentir. Le caractère de Louise était un mélange de bonnes et de mauvaises qualités. Fourbe, vindicative, avare, voluptueuse, elle ne le cédait pour les talents et les connaissances à aucune personne de son sexe. Il y eut toujours entre elle et la reine Anne de Bretagne, femme du roi Louis XII, une antipathie qui empêcha, tant que celle-ci vécut, le mariage arrêté de Claude, sa fille, avec le fils de Louise. François étant monté sur le trône, le 1er janvier 1515 (n. st.), érigea l’année suivante en faveur de sa mère, par lettres du mois de février, le comté d’Angoulême en duché ; et dans le même mois, il fit don à cette princesse des seigneuries d’Epernai, Saint-Maixant, etc. Louise obtint encore dans la suite, en divers tems, les duchés d’Anjou et de Touraine avec les comtés du Maine et de Beaufort. Deux fois le roi son fils l’honora du titre de régente, 1°. l’an 1515, lorsqu’il partit pour l’Italie ; 2°. l’an 1525, pendant sa prison de Madrid. Ce fut elle qui conclut, en 1520, la paix avec l’Espagne par le traité de Cambrai. Elle rendit à l’état d’autres services qui ne feront pas néanmoins oublier les injustices criantes que l’avarice et l’esprit de vengeance lui firent ; commettre. On lui reprochera éternellement la mort de Samblançai, surintendant des finances, qu’elle rendit victime de la première de ces deux passions, et la funeste désertion du connétable de Bourbon, qu’elle occasionna en voulant se venger du refus qu’il avait fait de l’offre de sa main, (Voyez le règne de François 1er.)Cette princesse craignait tellement la mort, qu’elle ne souffrait point qu’on la nommât devant elle, même dans les sermons. Trois jours avant que ce moment terrible arrivât pour elle, étant dans son lit, malade, elle aperçut de la clarté pendant la nuit à travers ses rideaux. Elle demanda ce que c’était : on lui répondit que c’était une comète. Ah ! dit-elle, ce signe n’est pas pour une personne de bonne condition. C’est pour nous autres grands et grandes que Dieu l’envoie. Refermez la fenêtre. C’est ma mort que cette comète annonce. C’était le 19 septembre 1531 qu’elle fit cette prédiction. Elle mourut le 22 suivant à Gretz en Gâtinais, à l’âge de cinquante-cinq ans et onze jours. Son corps fut transporté en grande pompe à Saint-Denis et son cœur à Notre-Dame de Paris.

 DIANE

Le duché d’Angoulême ayant été réuni à la couronne, l’an 1531, après la mort de la duchesse Louise de Savoie, mère du roi François 1er, fut donné, l’an 1582, par Henri IIl à Diane, fille naturelle et légitimée de Henri II, qui l’avait eue de Philippète Duc, piémontaise, sœur d’Antoine Duc, écuyer de sa grande écurie. Diane mourut sans postérité, le 11 janvier 1619, après avoir été mariée deux fois. Son premier époux fut Horace Farnèse, duc de Castro, tué, l’an 1554, à la défense de Hesdin, deux ans après son mariage ; le second, auquel elle donna sa main, au mois de mai 1557, fut François, duc de Montmorenci, pair et maréchal de France, mort le 6 mai 1579. Ce qu’on sait de plus mémorable de Diane, c’est que ce fut elle qui réconcilia Henri III avec le roi de Navarre, qui fut depuis notre roi Henri IV.

Après la mort de Diane, le duché d’Angoulême fut donné à Charles de Valois, qui suit.

 CHARLES DE VALOIS.

Charles de Valois, fils naturel du roi Charles IX et de Marie Toucbet,.né le 28 avril 1573, vécut sous quatre rois, et se rendit célèbre par sa valeur. Sa mère (vraisemblablement après la mort de Charles IX) épousa François de Balzac d’Entragues, lieutenant, puis gouverneur d’Orléans, dont elle eut la fameuse marquise de Verneuil, maîtresse de Henri IV, et une-autre fille. Marie Touchet, femme d’un esprit aussi incomparable que sa beauté dit le Laboureur, était fille, non d’un apothicaire, comme quelques-uns l’ont avancé, mais de Jean Touchet, lieutenant-particulier au baillage et présidial d’Orléans. Charles de Valois, son fils, destiné dès sa jeunesse à l’ordre de Malte, fut pourvu, l’an 1587, de l’abbaye de la Chaise-Dieu, et devint, en 1589, grand-prieur de France. La reine Catherine de Médicis, morte le 5 janvier 1589, lui ayant légué par son testament les comtés d’Auvergne et de Lauraguais, il quitta l’ordre de Malte avec dispense pour se marier, et eut pour première épouse, le 6 mai 1591, Charlotte, fille aînée du connétable Henri de Montmorenci. Mais la reine Marguerite de Valois fit casser la donation de Marie de Médicis par arrêt du parlement en 1606, et bientôt après elle fit donation des comtés qui en étaient l’objet, ainsi que de la baronnie de la Tour, au dauphin Louis, depuis roi, Louis XIII, qui les réunit en 1615 à la couronne. Charles de Valois continua toutefois de porter le titre de comte d’Auvergne jusqu’en 1619, qu’il obtint du roi le duché d’Angoulême. Il fut un des premiers seigneurs qui reconnurent à Saint-Cloud le roi Henri IV, et combattit avec gloire pour son service aux journées d’Arques en 1589, d’Ivri en 1590, et de Fontaine-Française en 1595. Sa fidélité envers Henri IV se démentit par la suite. Impliqué, l’an 1602, dans la conspiration du maréchal de Biron, il fut arrêté et mis a la Bastille par ordre du roi, qui eut ensuite la bonté de lui pardonner. Cette grâce ne fit qu’un ingrat. Convaincu de nouvelles pratiques concertées avec la marquise de Verneuil, sa sœur utérine, contre le roi, il fut arrêté une seconde fois, le 9 novembre 1604, et condamné, l’année suivante, à perdre la tête ; mais la bonté-du roi commua cette peine en une prison perpétuelle. Il en sortit néanmoins en 1616, et l’année suivante, il eut le commandement de l’armée et alla faire le siège de Soissons. Le roi Louis XIII lui ayant donné, comme on l’a dit, en 1619, le duché d’Angoulême auquel il joignit le comté de Ponthieu, le fit de plus chevalier de ses ordres la même année, et colonel-général de la cavalerie légère de France. Ce monarque, dont il avait captivé la bienveillance et l’estime, le mit à la tête d’une célèbre ambassade qu’il envoya, l’an 1620, à l’empereur Ferdinand II.

Ce fut le duc d’Angoulême qui ouvrit, le 10 août 1628, le fameux siège de la Rochelle, où il commanda en chef jusqu’au 22 octobre suivant, époque de l’arrivée du roi et du cardinal de Richelieu. Il donna, dans la suite, de nouvelles preuves de sa valeur et de son habileté dans les guerres de Languedoc, d’Allemagne et de Flandre. Il mourut à Paris, le 24 septembre 1650, à l’âge de soixante-dix-sept ans et demi, et fut inhumé aux Minimes de la Place-Royale. De son premier mariage, il eut trois fils, Henri de Valois, comte de Lauraguais, mort sans alliance, le 8 janvier 1668, à Montigni-Lancoup, où il était enfermé depuis cinquante ans pour cause de démence ; Louis-Emmanuel, qui suit, et François, comte d’Alais, seigneur de Moptigni-Laucoup et de Sézanne, mort, sans lignée le 13 septembre 1622. Françoise de Nargonne, que Charles de Valois épousa le 25 février 1644, en secondes noces, ne lui donna point d’enfants, et, par un exemple assez rare, mourut cent quarante ans après son beau-père, le roi Charles IX, le 10 août 1715, à l’âge de quatre-vingt-douze ans.

 LOUIS-EMMANUEL

1650. Louis-Emmanuel de Valois, second fils de Charles de Valois et de Charlotte de Montmorenci, né à Clermont en Auvergne en 1596, ayant été destiné d’abord à l’église, fut pourvu des abbayes de Saint-André de CÏermont et de la Chaise-Dieu, puis ; en 1612, de l’évêché d’Agde. Après le malheur de son frère aîné et la mort de son cadet, il changea d’état, l’an 1622, et embrassa le parti des armes. Il signala sa valeur aux sièges de Montauban et de la Rochelle, et dans les guerres d’Italie et de Lorraine. Ses services lui méritèrent la charge de colonel-général de la cavalerie légère de France avec le gouvernement de Provence et le collier des ordres du roi, toutes récompenses que Louis XIII lui conféra en 1637. Il succéda, l’an 1650, au duché d’Angoulême et aux titres de son père, auquel il ne survécut que trois ans, étant mort à Paris le 13 novembre 1653. De Henriette de la Guiche qu’il avait épousée le 8 février 1629 (morte le 22 mai 1682), il eut trois fils qui le précédèrent au tombeau, et une fille, qui suit. Il laissa de plus un fils naturel, Charles-Louis de Valois, qui accompagna, l’an 1685, le prince de Conti en Hongrie, et se distingua ensuite dans les guerres des Pays-Bas ; mort sans alliance le 25 septembre 1701.

 MARIE-FRANÇOISE.

1653. Marie-Françoise, née le 27 mars 1631 et mariée le 4 novembre 1649, avec Louis de Lorraine, duc de Joyeuse, obtint, après la mort de Louis-Emmanuel, son père, pour elle et son époux, leur vie durant, par lettres du 19 juillet 1653, la jouissance du duché d’Angoulême et du comté de Ponthjeu. Mais étant demeurée veuve, le 27 septembre de l’année suivante, elle tomba en démence, et fut enfermée dans l’abbaye d’Essay près d’Alençon, où elle mourut, le 4 mai 1696, sans laisser de postérité.


[1Matha, Charente-Maritime

[2Le vidame de Chartres y fut aussi précédé par plusieurs seigneurs qui n’étaient point princes du sang. Mais cela ne conclut rien contre la préséance due à ces princes sur tous les autres seigneurs, parce que le vidame était de l’ancienne maison des comtes de Vendome, différente de celle, des Bourbons. (Voyez Pierre de Montoire, comte de Vendôme)

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