Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

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1240 - 1243 - Saint Louis et son frère Alphonse guerroient en Poitou et Saintonge

dimanche 22 janvier 2012, par Pierre, 797 visites.

Cette tranche de l’histoire de Louis IX (Saint Louis), écrite dans un style alerte, va de l’installation de son frère Alphonse de Poitiers comme administrateur du Poitou, de la Saintonge et d’une partie de la Guyenne à la reconquête de ce territoire sur les Anglais. La bataille de Taillebourg (21 juillet 1242) en est une des phases décisives.

Source : Les Croniques et Annales de France depuis la destruction de Troye, jusques au Roy Loys unziesme : jadis composées par feu maistre Nicole Gilles, en son vivant Secrétaire, Indiciaire du Roy, & Contrerolleur de son trésor. - Paris – 1566 – Google Livres

Comment S. Loys bailla à son frere Alphons la Comté de Poitou & le maria à la fille du Comte de Thoulouze : & comment le Comte de la Marche refusa à faire hommage audict Alphons, dont s’esmeut grand’guerre.

En l’an mil deux cens quarante, le Roy sainct Loys feit faire à Saumur une moult belle assemblée de Barons & de Prelatz : & en icelle feit Alphons, son frere, nouveau Chevalier :& traicta le mariage de luy & de la fille de Jehan, Comte de Thoulouze : & luy donna la Comté de Poitou, & les païs d’Auvergne & d’Albigeois. Puis somma Hue [1], Comte de la Marche, qu’il feit audict Alphons, son frere, hommage de sa terre, qui estoit tenuë du Comté de Poitou : mais ledict Comte de la Marche, qui se fioit au Roy d’Angleterre,duquel il avoit la mere espousée, luy enflé du vent d’orgueil, fut refusant de ce faire : dont le Roy fut moult courroucé à l’encontre de luy : mais pource qu’il n’avoit pas lors gens pour le contraindre à ce, il s’en retourna à Paris :& là eut la Royne, sa femme, une fille, qui fut nommée Ysabel. Quand le Roy s’en fut retourné, ledict Comte de la Marche se pensa bien qu’il luy feroit guerre : si s’en alla devers ledict Henry Roy d’Angleterre & luy donna à entendre que le Roy le vouloit deshériter. Et pour ceste cause assembla ledict Roy Henry d’Angleterre ses Barons, & par un religieux, frere mineur, leur feit dire, remonstrer & presenter qu’on devoit mieux aller en guerre sur le Roy de France,qui ainsi mauvaisement vouloit tollir la terre au Comte de la Marche, & le deshériter, & que ce seroit plus grand mérite que d’aller sur les Sarrazins : & deit oultre que par telle manière avoit le feu Roy Jehan d’Angleterre perdu la Duché de Normandie, & lesdictz Barons d’Angleterre leurs terres & seigneuries qu’ilz avoient en France : si devoient tous eux employer en ceste matiere, & tous y mettre peine de recouvrer ladicte Duché de Normandie, & les terres que leurs prédécesseurs avoient tenues & possédées audict Duché. Tant persuada lesdictz Barons qu’ilz feirent response qu’ilz estoient prestz de luy ayder contre le Roy de France, & que jamais ilz ne luy fauldroient : lors meirent sus ledict Roy Henry & les Angloys grands navires, & feirent grand’assemblée de gens & de vivres,& vindrent & descendirent en France. Semblablement le Roy S. Loys assembla un Parlement a Paris, ou furent les Pers de France, Barons, Prelatz, & gens des bonnes villes : ausquelz il remonstra comment le Comte de la Marche vouloit tenir terre sans seigneur, & que ladicte Comté de la Marche estoit du fief de France, tenue de la Comté de Poitou, & des le temps du feu Roy Loys [alias Clovis], qui conquist toute Aquitaine, jusques aux montz Pirenez, & que ce neantmoins ledict Comte de la Marche estoit refusant de faire l’hommage audict Alphons, son frère, auquel il avoit baillé la Comté de Poitou, leur demandant sur ce conseil : & ilz respondirent que le seigneur la devoit & povoit assigner à son fief, puisque le vassal estoit refusant. Si feit apprester le Roy son armée pour garder le droict de sondict frère. En lan mil deux cens XLII. le Roy, avec grand’multitude de gensd’armes, entra en la terre dudict Comte Hue de la Marche, & print le Chastel de Monstrueil en Gastine. Apres alla devant la tour de Berrye, & la feit desmolir & abatre. Puis alla & print le Chasteau de Fontenay, que tenoit Geoffroy de Luzignen, qui estoit en l’ayde dudict Conte de la Marche : deuant lequel chastel de Fontenay ledict Alphons, Comte de Poitiers, frère du Roy, fut blecé d’un traict aupres de la cheville du pied : dont le Roy fut bien courroucé. Si feit si fort assaillir ledict chastel, qu’il fut prins dassault : & fut prins dedans le filz dudict Hue, Comte de la Marche, & quarante Chevaliers, & quatre vingtz autres combatans, tous prisonniers. Puis apres le Roy vint devant le chastel de Mervant,qui estoit audict Geoffroy de Luzignen. La Comtesse de la Marche,mere du Roy d’Angleterre,voyant la grand’ puissance du Roy, & que son Seigneur n’estoit pas puissant pour y resister, s’advisa de mal engin, & suborna par belles parolles & grandes promesses de dons deux de ses serviteurs, ausquelz elle bailla venin & poison, pour empoisonner le Roy. Les serviteurs vindrent en l’ost du Roy, & s’approcherent tant de la cuisine de sa bouche,que les officiers les eurent pour suspectz : toutesfois ilz furent sages, & n’en feirent pas le semblants dissimulèrent pour veoir leurs contenances, & tellement les espierent qu’ilz les prindrent sur le faict, ainsi qu’ilz vouloient mettre leurs poisons sur les viandes, que l’on vouloit servir devant le Roy, & les trouverent garnis. II furent prins confessèrent le cas, si furent penduz & estranglez. Quand la Comtesse sçeut que sa mauvaistié estoit descouverte, de dueil elle se cuida précipiter, & frapper dun cousteau en la poitrine, qui ne luy eust osté de la main, & ainsi fut longuement malade de despit & de desplaisance. Le Roy chevaucha tant qu’il print la pluspart des places & chasteaux dudict Comte de la Marche : puis tira vers Xainctes & Taillebourg, esquelz lieux estoient logez les ostz du Roy Henry d’Angleterre, & de Hue, Comte de la Marche, & feit faire un pont sur la riviere de Charante : & combien que ledict Roy d’Angleterre eust en sa compagnie les Comtes de Cornouaille, de Clocestre, le Prince de Galles,& grand’planté de Chevaliers, toutesfois quand il sçeut la force de l’ost dudict Roy de France, qui estoit passé ladicte riviere de Charante, il n’osa marcher vers luy pour le combatre, ains s’en retourna vers Taillebourg : parquoy les avantcoureurs & fourriers du Roy coururent apres : & lors les gens de l’ost dudict Roy d’Angleterre, & du Comte de la Marche qui les apperçeurent venir apres, retournerent sus lesdictz coureurs du Roy de France : lequel quand il le sçeut, se hasta, & s’assemblerent les deux ostz, & y eut moult apre & cruelle bataille : toutesfois les Françoys desconfîrent & meirent les Angloys en fuyte.

Le Roy d’Angleterre & le Comte de la Marche se retirèrent dedans Xainctes. Le Seneschal de Xainctes, qui portoit l’enseigne dudict Conte de la Marche fut tue, & moult de grands Seigneurs & Chevaliers, & furent prins quatorze Chevaliers de leurs gens, & cinq cens autres prisonniers, sans les mors. Apres ceste victoire, le Roy feit amasser & retirer ses gens, qui estoient espanduz : & la nuict ensuyvant, entour l’heure de minuict, lesdictz Roy d’Angleterre & Comte de la Marche sortirent hors de la cité de Xainctes, & feirent entendant aux habitans qu’ilz alloient courre sus l’ost des Françoys : mais ilz se meirent à chemin, & s’en allèrent jusques au chastel de Blaye, sur Gironde, qui est sept lieuës au dessoubz de Bourdeaux. Quand ceux de Xainctes veirent que ceux qui les devoient secourir & deffendre s’en estoient fuyz, ilz eurent conseil, & baillèrent & livrerent la ville es mains & obeyssance du Roy de France. Le lendemain Regnault, seigneur de Pons,vint devers le Roy, & feit hommage de sa terre audict Comte de Poitiers, frere du Roy. Ce mesme jour vint devers le Roy l’aisné filz du Comte de la Marche,& s’agenoilla devant luy, & luy requist paix & pardon pour son pere : laquelle paix le Roy luy accorda, par tel convenant que ladicte cité de Xainctes, & toute la terre que le Roy avoit prinse sur le Comte de la Marche, demoureroit en héritage au Comte de Poitiers, son frère, & que de surplus il se mettoit en la mercy du Roy. Ce que ledict filz promist faire ratifier à son pere, & demoura en ostage pour ceste cause. Le lendemain vint ledict Comte de la Marche, & amena sa femme & ses enfans, qui se jetterent à genoulx au piedz du Roy, & luy crièrent mercy. Le Roy de sa debonnaireté leur pardonna. Si conferma ledict Comte l’appoinctement que son filz avoit fait le jour precedent, & feit hommage audict Alphons, Comte de Poitou : & le Roy retint à luy les homages de Pons, Luzignen,& Mervant. Apres vindrent devers le Roy les Seigneurs de Mirabel & de Mortaigne, lesquelz & tous les autres qui estoient de la riviere de Gironde, feirent hommage audict Comte de Poitou, frere dudict Roy. Le Roy d’Angleterre, qui estoit à Blaye, s’en retira vers Bourdcaux, & envoya devers le Roy S. Loys, lequel, apres plusieurs difficultez, de sa debonnaireté, & par le conseil de ses Barons, luy octroya tresves jusques à un an.

L’an mil deux cens quarante & trois : au mois de Mars, nasquit Loys, premier filz dudict sainct Loys.


[1Hugues de Luzignan, comte de la Marche

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