Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

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1501 - 1502 5 Philippe de Habsbourg et Jeanne d’Aragon voyagent à travers Belgique, France et Espagne - de Guitres à Bayonne

vendredi 13 janvier 2012, par Pierre, 1044 visites.

Jeanne d’Aragon et de Castille, dite Jeanne la Folle
1479-1555
Philippe de Habsbourg, dit Philippe le Beau
1478-1506

Un document exceptionnel ! Du 3 novembre 1501 au 7 mai 1502 (185 jours) l’archiduc Philippe de Habsbourg, dit Philippe le Beau, et sa femme Jeanne d’Aragon, dite Jeanne la Folle, voyagent de Bruxelles à Tolède pour recevoir l’hommage des Cortès. Ils traversent la Belgique, la France et l’Espagne. La relation de ce voyage fourmille de descriptions et de détails sur les villes et villages traversés, l’accueil par la population et les autorités locales.

Cette page raconte le voyage de Philippe le Beau de Guitres (33) à Bayonne (64) via Saint-Emilion (33), Castillon-la-Bataille (33), Cadillac (33), Langon (33), Captieux (33), Roquefort (40), Mont-de-Marsan (40), Tartas (40) et Dax (40).

Des évènements divers vont perturber le voyage : le mauvais temps et les rivières en crue, mais aussi la peste à Bordeaux, qui oblige le cortège à contourner la ville.

Source : Die Handschriften der k. k. Hofbibliothek in Wien, - Joseph Chmel – Wien - 1841 - Google livres
Codex Ms. Nro. 3410, Reise des Erzherzogs Philipp nach Spanien 1501

Les titres donnant les lieux d’étapes ont été ajoutés par Histoire Passion.

Le voyage de Philippe de Habsbourg et Jeanne d’Aragon, de Bruxelles à Tolède
- Introduction, commentaires, bonnes pages
- de Bruxelles (Belgique) à Paris (France)
- de Paris à Tours (France 37)
- de Tours à Guitres (France 33)
- de Guitres à Bayonne (France 64)
- de Bayonne à Burgos (Espagne)
- de Burgos à Tolède (Espagne), fin du voyage.

Autres récits de voyage, sur Histoire Passion
Philippe de Habsbourg, appelé aussi Philippe 1er de Castille, surnommé Philippe le Beau (né le 22 juillet 1478 à Bruges et mort le 25 septembre 1506 à Burgos) fut par sa mère l’héritier de l’État bourguignon et par mariage (avec Jeanne d’Aragon dite Jeanne la Folle, la fille du roi Ferdinand II d’Aragon et de la reine Isabelle Ire de Castille) roi de Castille et de León. Philippe était également l’héritier des possessions des Habsbourg mais il n’en hérita jamais, ayant précédé son père dans la tombe.

Il est le fils de l’empereur du Saint-Empire romain germanique Maximilien Ier de Habsbourg et de la duchesse Marie de Bourgogne (morte à l’âge de 25 ans). Il est le fondateur de la longue dynastie des Habsbourg qui règnera notamment en Autriche et en Espagne.

Jeanne Ière, dite Jeanne la Folle (Juana la Loca), fut reine de Castille (1504–1555), et reine d’Aragon (1516–1555), unissant définitivement sous un même sceptre toutes les Espagnes à partir du 25 janvier 1516. Issue de la dynastie de Trastamare, Jeanne était le 3e enfant des Rois catholiques, Ferdinand II d’Aragon (1452-1516) et Isabelle Ière de Castille (1451-1504). Elle n’a en réalité jamais effectivement régné.

Source : Wikipedia

Pour en savoir plus
- sur Philippe de Habsbourg
- sur Jeanne de Castille, dite Jeanne la Folle

 Saint-Emilion (33), Castillon-la-Bataille (33)

Item le vendredy VIIe jour de Januier monseigneur et madame se partirent du villaige de ghysters [Guitres (Gironde)], vinrent au giste en la ville de chastillon et en my le chemin y auoit vne tresbelle petite villette que se nomme saint milion ou se tenoient les presidens et seigneurs du conseil du Roy, lesquelz estoient venus audit saint milion pour la mortalite Et vinrent les dits president acompaigniez des seigneurs de la ville de saint milion faire la reuerence a monseigneur et a madame, et y eubt vng des presidens que lit a monseigneur vne belle proposition en latin, et puis en francois en eulx demonstrans quilz estoient prestz a faire tous honneurs a monseigneur et seruice comme au premier per de france et de offrir leurs corps et biens, en priant que de sa grace il lui eust pleu demourer a saint milion et quil leur eussent fait toute layde et assistence quilz eussent peu, et que bien estoient mary que monseigneur ne peult passer par la ville de bordeaux a cause de la fortune de mortalite, [cette expression laisse entendre qu’il y aurait à ce moment une épidémie de peste à Bordeaux – voir la peste à Angoulême en 1502 ] monseigneur les fist remercier bien amiablement par monseigneur de besancon present monseigneur et madame et leurs nobles, apres monseigneur et madame passeront par la ville de saint milion, ou les rues estoient tendues de tapisseries et de linges a la maniere du pays, les cloches sonnoient et batelloient pour la venue de monseigneur et de madame et y auoit tant de gens et belles femmes aux foenestres pour veoir passer monseigneur et madame, et aux rues que merueilles (Fol. 20.) Car cestoit vne bonne villette, et monseigneur de Cambray auec les contes dessus nommez y tinrent leur Royme (?) et seiournerent ce jour, Et chanterent les chantres de monseigneur la messe deuant monseigneur de cambray et les contes, dont ceulx de la ville presenterent le vin de present aux seigneurs et aux chantres et furent bien esbahis de oyr si bonne chapelle, apres que monseigneur fut passe ladite ville il vint pour aprochier chastillon, Et vint audeuant de monseigneur et madame aucuns de la ville pour faire leurs deuoirs et sonnoient les cloches et est petite villette appartenante a monseigneur de candalle [Il s’agit probablement de Gaston III de Foix, comte de Candale (mort en 1536)] grant seigneur en france, Et fut logie monseigneur au fourbourg pour ce que le fourbourg et meilleur que la ville mes y au pied de la ville vne bien grosse riuiere, et est la ville sur vne roche aussi vient la dite riuiere batre a la roche Et y fault de grans bacqs pour passer leauvve, car elle est fort rade et niaise a passer, Ainsi se passa ceste journee Lon compte de ghystres a chastillon III ½ lieuvves.

 Cadillac (33)

Item la samedy VIII jour de Januier monseigneur et madame se partirent de chastillon vinrent au giste en la ville de cadilya et falut passer la dite riuiere, apres monseigneur et madame et le tout passe lon chemina oultre, et pour vous dire il y a vng tres mauuais et ort chemin, et plut tout ce jour tellement que madame ne peult venir au giste a cadilya, et cheuauca monseigneur deuant pour lamour du mauuaix temps, et quant monseigneur vint a lieuvve et demye pres de ladite ville vint au deuant de monseigneur le seigneur de candalle acompaignie de nobles hommes et autres bien montez, et y estoit le filz du bastart cardon capitaine de boulloigne Et fit le dit seigneur de candale la reuerence a monseigneur fort bien et honnourablement et est fort josne et en eaige de XVIII ans, fort beau et bien adreschie et auoit robe a cheuauchier dun cramoisy velours fort gaurier belle grosse chayne au col monseigneur le prist par les bras et le recheut bien joyeusement et lui faisoit tout lonneur quil pouoit et cheuauchoit aupres de monseigneur entre les deuises monseigneur de candalle pria a mondit seigneur de se venir logier en son chasteau, ce que monseigneur lui ottroya et faisoit fort lait temps du vent de pluye et de neige aussi lon cheuaucha tant que lon vint en la ville de Candalya, en entrant en la ville lon tira du chasteau et de la ville de gros engiens a pouldre, les rues estoient tendues de tappisseries et de linges, mes ne fut gaires long car la chasteau estoit tout pres de la porte, Quant monseigneur entra audit chasteau il fut moult honnourablement receu de la mere de monseigneur de candalle, laquelle estoit fort bien acompaignie de dames et de damoiselles, fort bien acoustrees a la maniere de France, et croy que beaucop de filles daucuns cheualiers et de femmes mariees car trop grant train y auoit. Monseigneur la print par la main le baisa et toutes les autres lune apres lautre, La mere de monseigneur de candale est fort grasse grande et assez sur eaige, mais est fort joyeuse desperit Apres que monseigneur fut prest le souper fut prest et lon seruy monseigneur et fut acompaignie de monseigneur de candale et des commissaires du Roy de france et dautres grans seigneurs gouuerneurs de mondit seigneur de candale lon fist bonne chiere lon altendoit tousiours madame, et furent enuoyees audeuant delles torsses et gentilzhommes, mais elle demoura logie a deux lieuvves pres de la ville, en vng villaige ou elle fut assez pourement traictie, et nauoit guerres a souper car la pluspart de offices estoient venues en la ville, et ny eubt guerres de nobles que demourerent aupres de madame, si non monseigneur de melun cheualier dhonneur monseigneur de Hallevvin que fist assez bonne prouision pour le souper lequel ala de maison en maison pour auoir des oefz et pour logier les gentilzhommes que monseigneur y auoit enuoye reuinrent dire a monseigneur que madame estoit a vng villaige demouree logie, dont monseigneur commencha a rire, Apres le souper lon dansa presque toute la nuyt et fit lon bonne chiere de bancqueter apres la mynnuyt chacun se retira pour soy reposer, lon fut fort seruy de poisson de lamproyes et dautres choses de pain et de vin et dypocras [hypocras : ancienne boisson à base de vin sucré et aromatisé. C’est une boisson connue dans toute l’Europe médiévale.] car monseigneur de candale qui estoit filz et josne desfroya mondit seigneur de tout et ses gens, madame sa mere estoit vesue [veuve], cestoit vne maison plaine de biens, les torsses que furent enuoyees pour trouuer madame, les mulliers qui venoient a tout les bagues ilz en furent eureux car il faisoit fort brun et plouuoit fort, ainsi se passa ceste journee, en faisant bonne chiere dun coste, et dautre coste a deux lieuvves pres dauoir pacience de trouuer ce que lon pouoit, lun bien logie lautre mal, lun mal argent lautre bien ainsi se partent les biens du monde.

(Fol. 21.) Item le dimence IXe jour de Januier monseigneur seiourna tout ce jour a candillya et vint madame entre huit et IX heures du matin, et faisoit assez beau temps, mais eubt fort mauuaix chemin , madame de candalle fort bien acompaignie se trouva vers madame a la porte du chasteau et recueilla madame et sa compaignie a la porte du chasteau, et y estoit pour receuoir madame, monseigneur de candalle, madame print par la main monseigneur de candalle apres madame sa mere et le baisa et auec de ses dames et damoiselles, lon mena madame en sa chambre, elle se mist enpoint dautres habillemens le disner fut prest, et vint disner madame auec monseigneur et y eubt monseigneur de candale et madame sa mere, et les seigneurs commissaires de france, tout a vne table et fit lon bonne chiere Apres le disner monseigneur sen ala auec monseigneur de candalle au parcq qui estoit assez beau et gentil, ainsi passa monseigneur son temps a tirer des conins, madame se deuisa a madame de candalle et lon dansa de lapres disner pour faire passetemps aux dames apres madame se retira en sa chambre et fut le souper prest et refist on encoire plus grant chiere, et en la grant sale y auoit trois ou quatre tables couuertes et bien seruies par toutes les chambres, et defroya mondit seigneur de candale de tout ce quil falu auoir, monseigneur bauduin le bastart estoit demoure au villaige auec madame, et vous permetz que ce ne sont point les villaiges de nostre quartier ne des pays de monseigneur Larchiduc et y a bien grandement a dire de bien dhonneur et de valeur Apres le souper lon dansa et deuisa, et apres furent apportees les espices et le vin, et cela fait monseigneur se retira, aussi fit madame et chacun les chambres estoient bien parees, et fut on fort seruy de pain et de vin de viandes a tout chemin torsses et chandelles a force, a tout costez du chasteau dehors et dedens y auoient fallotz ardant tellement quilz esclarcissoient partout, ainsi se passa ceste journee, lon compte de chastillon a candilya V lieuvves.

 Langon (33)

Item le lundi Xe jour de Januier se partirent monseigneur et madame de cadillya vindrent au giste en la ville de largion que appartient a monseigneur de candale, mes auant le parlement le disner fut prest, et fut lon fort seruy de viandes de pain et de vin tout estoit ouuert a festoyer monseigneur et madame, lon print le congie apres le disner, et passa monseigneur madame et tout le train vne grosse riuiere forte et rade portans gros bateaux a la mode du pays et a sa nom la dite riuiere la geronde elle va delà a bordeaulx. et de bordeaulx en mer, monseigneur fut acompaignie de monseigneur de candale, et mena monseigneur en sa ville de largion que est assez belle et petite ville, et vint monseigneur assez sur le tart, ceulx de la ville ne firent gaires de triumphes mais sonnerent et batelerent leurs cloches, monseigneur et madame furent logiez en la maison de monseigneur de candale et estoit belle maison de plaisance, car leauvve passoit deuant les foenestres, et les bateaulx journellement, et partout ou monseigneur entrast en ville ou en villaige les trompettes de monseigneur sonnoient et apres celles du Roy despaigne, monseigneur fist bonne chiere a monseigneur de candale, au souper ainsi se passa ceste journee Lon compte de cadilla a largion II lieuvves ½

Item le mardy XIe jour de Januier monseigneur et madame seiournerent tout ce jour en la ville de largion et fut la cause que pour attendre les bagaiges du charroy que encoires estoient demourez derriere a cause du mauuais temps et chemin, et fut monseigneur aux champs pour veoir voler ses oyseaulx, et fut monseigneur acompagnie de monseigneur de candale, ainsi se passa ceste journee.

Le mercredy XIIe jour de Januier monseigneur et madame seiournerent tout ce jour en la ville de largion attendant encoires lesdits baigaiges lesquelz vinrent apres le disner, et fut monseigneur jouer par eauvve en vne autre ville a vng quart de lieuvve, nommee saint macquaire appartenant au Roy de france, et aupres de la dite ville vit voler ses oyseaulx sur vng millan le quel fut prins par lesdits oyseaulx ainsy se passa ceste journee, et estoit monseigneur tousiours acompaignie de monseigneur de candale, et des seigneurs de france commissaires qui aloient au de monseigneur et madame par le chemin.

 Captieux (33)

Item le Jeudy XIIIe jour de Januier monseigneur et madame se partirent de la ville de largion, vinrent au giste en la ville de capsien , qui est bien petite ville, les cloches de leglise sonnerent pour (Fol. 22.) la venue de monseigneur et de madame, les rues estoient tendues de linges et daucuns tapiz et si sont les murailles de la ville faictes et machonnees die pierres que est matiere de quoy lon fait le fer et est ladite ville assez bien muree, ainsi se passa ceste journee Lon compte de langion a capsien V lieuvves.

 Roquefort (40)

Item le vendredi XIIIIe jour de Januier monseigneur se partirent de la ville de capsien vinrent au giste en la ville de Rochefort qui est aussi petite ville, et est assize entre valees et montaignes la pourcession de leglise vint audeuant de monseigneur, et tenoient chacun enffant vne grosse chandeille en maniere de torsse, et auoient les prestres et seigneurs deglise belles chappes vestues, a tout la croix et confanons les cloches sonnoient et les rues estoient tendues de linges et de tapis pour la venue de monseigneur et de madame, lon compte de capsien a Rochefort V lieuvves.

 Mont-de-Marsan (40)

Item le samedy XVe jour de Januier monseigneur et madame se partirent de Rochefort vinrent au giste en la bonne ville de mont a marsant que est assez belle ville et bonne et vinrent les seigneurs de la ville audeuant de monseigneur et de madame a grant compaignie presenter les clefz de la ville corps et biens a faire seruice a mondit seigneur les rues estoient tendues de tapisseries de linges et de tapin, La pourcession des eglises vinrent audeuant de monseigneur hors de la ville, a tout belle croix et confanons et belles chappes, lon tira de gros engiens des murailles de la ville et du chasteau pour la venue de monseigneur, les cloches sonnoient de tous costez les belles damoiselles et autres que estoient aux fienestres et es rues que cestoit plaisir de les veoir a tout leur estraignes habillemens de teste, tous les nobles de monseigneur et de madame et gentilshommes estoient a faire ceste entree, car cest vne bonne ville, et fut le peuple fort joyeulx de la venue de mondit seigneur et de madame et de leur noble compaignie, Lon compte de Rochefort a mont a marsant IIII lieuvves.

Item le dimence XVIe jour dudit mois monseigneur et madame seiournerent ce jour a mont a marsant et oyrent le seruice du jour en son hostel par ses chantres, et apres le disner fut monseigneur aux champs pour veoir voler ses oyseaulx, ainsi se passa ceste journee.

 Tartas (40)

Item le lundi XVIIe jour de januier monseigneur et madame se partirent de mont a marsant vinrent au giste en la ville de tartas, et sont comme deux villes, car il y a grosse riuiere [la Midouze] que passe entre deulx et y a vng tresfort chasteau, Le tout appartient au Roy de nauare [la famille d’Albret] mais la souuerainete appartient au Roy de france, La pourcession vint audeuant de monseigneur hors de la porte, les cloches de leglise sonnoient et batelloient pour la venue de monseigneur et de madame Lon compte de mont a marsant a tartas V lieuvves

Item le XVIIIe jour de januier monseigneur et madame sejournerent toute jour a tartas, et fit ce jour vng tres mauuaix temps de vent de pluye de neige et des eauvves que devinrent si grandes et si haultes que lon cuidoit que tout se deust noyer, Ce jour vint audit tartas vne grande partie des gens du Roy de nauare car lon disoit que le Roy venoit audit tartas pour venir faire la reuerence a monseigneur et madame et les festoyer et vinrent beaucop de muletz tous chargiez des bagues du Roy et ainsi que ledit Roy sestoit mis en chemin force lui fut de seiourner dont il venoit a cause quil ne peult passer pour les grandes eauvves, dont il fut bien mary quil ne se pouoit trouuer vers mondit seigneur. Ainsi se passa ceste journee.

Item le mercredy XIXe jour de Januier, monseigneur et madame seiournerent tout ce jour a tartas et ne pouoient partir dillecq pour les eauvves que de heure en heure se montoient si grande que a merueille, la ville denbas comme maisons et les rues estoient pres que toutes noyees et lon ne pouoit aller dune maison en lautre se nestoit par botkus [?], et estoient bien estranges les botkus comme longues nocqueres ou bacs de pourceaux, leauvve passa par dessus le pont et aloit si rade que a paine le pont fut pres que enporte, Il faillit deslogier les cheuaulx et les mener en autre plache ou ils se fussent noyes, ainsi se passa la journee.

 Dax (40)

Item le jeudi XXe jour de Januier monseigneur et madame se partirent de tartas, et vint au giste en la cite et bonne ville de Dachs et madame alla par vng autre chemin pour aller tout droit a baionne, mais fut logie en vng villaige, monseigneur et madame furent cureulx que les eauvves se escoullerent fort en la (Fol. 23.) nuyt passee, car autrement ils neussent sceu passer, ne leur compaignie, mais dieu y remedia, et quant monseigneur fut ariue deuant laville dachs sur vne montaigne ou il y auoit vng villaige nomme saint pauls monseigneur ne pouoit aller en la ville de dachs que ce ne fut par bateaulx, car le pays estoit illecq tout noye, mais les seigneurs de bayonne auoyent illecq pourueu de quatre belles et grandes barges fort bien acoustres de rasmes et dengiens, et couuertes de tapisseries que lon diroit maisons il les faisoit beau veoir estre dedens leauvve, Et quant monseigneur vint pour entrer dedens vne des bargues, lon tira tous les engiens des dits quatre barges il les faisoit bel oyr, Ainsi ariua monseigneur et sa compaignie, a la ville de dachs, et la estoit aupres de leauvve a la descente monseigneur leuesque dachs et son colliege fort richement acoustree de belles cappes belles croix et reliques a tout torsses et belles chandeilles, et receut monseigneur tres honnestement et estoit le dit euesque acompaignie des seigneurs et chastellain du chasteau, lesquels presenterent a monseigneur seruice de corps et biens et que lui estoit le tresbien venu, de dite la ville, et estoit monseigneur acompaignie des commissaires de france, et appartient la ville au Roy de france les cloches sonnoient et bateloient, les rues estoient tendues de tapisseries et de linge, Et lon tira fort des murailles de gros engiens a pouldre, a la descente de monseigneur et tirerent par deux fois, la premiere a la venue de monseigneur de besancon, car ilz ne sauoient autre chose que ce ne fut la barge ou monseigneur estoit, et quant monseigneur fut descendu de leauvve et que le recueil de chacun fut fait, monseigneur les remerchia, et apres fut mene depuis leauvve jusques a leglise tout a pied, et chantoient les seigneurs deglise en allant te deum laudamus, il y auoit fort grant presse pour veoir monseigneur et alloient les nobles et gentilshommes deuant monseigneur deulx a deux et tout par ordre, Et les archiers aloient a deux costez chacun leurs gouges en leurs mains, les seigneurs de la ville aloient deuant la pourcession pour faire place. Et quant monseigneur fut en leglise que est fort belle, il trouua au ceur son siege fait bien richement, il se mist agenoulx deuant limaige de nostre dame et puis lon chanta vne belle antiesne comme vng motet en discaent, et puis ledit euesque chanta loraison, et fut la benediction, Apres cela fait les orgues commenchercnt a jouer et sonner le possible, Aussi pareillement en venant depuis leauvve en leglise les trompettes de monseigneur ne firent que faire leur deuoirs de faire sonner leurs trompettes que les faisoit bel oyr, les heraulx apres les deux mâches, et toison dor au millieu apres lescuier portant lespee, apres marcha monseigneur et aupres de lui leuesque de corduaen ambassadeur du Roy despaigne et apres les seigneurs de lordre auec monseigneur de besancon monseigneur de cambray les contes palatin et de nassou, et apres autres nobles, Et quant monseigneur eubt fait son oraison, il se leua apres la benediction de leuesque, et vint leuesque deuers monseigneur lui offrir seruice de la puissance de leglise de son corps et de sa puissance, et que lui estoit le tres bien venu, et fut monseigneur logie a lostel de leuesque, ou il fut tresbien logie, apres monseigneur en son logis chacun se retira pour estre en son logis, ainsi se passa ceste journee en faisant bonne chiere, car cestoit vne bonne ville, dedens ladite ville y a des bains comme a aix, mais lon ny pouoit aller pour ce quilz estoient tous noyez a cause des eauvves qui estoient si grandes, et y avoient deux ou trois rues qui estoient toutes noyees deauvve qui estoient a demy chaulde a cause de leauvve des bains, lon compte de tartas a dachs VI lieuvves.

Item monseigneur ne fut point venu deux heures en la ville dachs que le Roy de nauare [Jean III de Navarre, aussi appelé Jean d’Albret 1484-1516. Il est, par son fils Henri II de Navarre, l’arrière-grand père du roi de France Henri IV] ny ariua, et lui incontinent arriue auec ses nobles et gentilzhommes bien gaurriers, sen vint le Roy au logis de monseigneur, et ainsi quil montoit a mont monseigneur vint au deuant sur les degrez et embracherent lun lautre, en faisant vng tresbeau receul tant dun coste que de lautre, Et mena Monseigneur le Roy dedens la chambre, et se deuiserent longuement et joyeusement, et est le Roy vng tres beau josne homme, et a fort bonne grace et bien adreschie dumilite car il fist lonneur aux nobles et gentilzhommes, il fit grant honneur a monseigneur lamiral a monseigneur de berghes aux contes monseigneur de besancon et monseigneur de cambray. et monseigneur tant bien aux nombres du Roy. Apres longuement toutes deuises faictes, le Roy prinst le congie de monseigneur, Ainsi que le Roy se partoit (Fol. 24.) monseigneur le vouloit conuoyer, mais le Roy ne le volut souffrir, dirent le bon nuyt lun a lautre, et les nobles de monseigneur et gentilzhommes, se mirent a conuoyer le Roy, jusques dedens son logis et y eubt beaucop de torsses de la part de monseigneur pour remener le dit Roy, et estoit fort tart.

Item le vendredi XXIe jour de Januier monseigneur sejourna toute le jour en la bonne ville dachs, et fut le Roy vers mondit seigneur et estoit le Roy acompaignie de leuesque de dachs et de ses nobles apres le disner lon ala aux champs veoir voller les oyseaulx de monseigneur et au retour des champs le souper fut prest et fit monseigneur grant chiere au Roy, apres le souper lon se mist a deuiser de plusiers deuises, et dist le Roy daller veoir madame au villaige ou elle estoit pour lui faire la reuerence ainsi apres toutes deuises monseigneur et le Roy prindrent le congie et chacun se retira pour reposer, et par ainsi se passa ceste journee, en faisant bonne chiere.

 Bayonne (64)

Item le samedy XXIIe jour dudit mois monseigneur se parti de dachs vint au giste en la bonne ville de baionne, et se party monseigneur de dachs a tout les quatre barges qui estoient venues dudit baionne pour passer monseigneur sa compaigne de saint pauls a dachs. Et quant monseigneur et ses nobles furent prestz pour aller et monter sur lesdites barges, le Roy de nauare compaigna mondit seigneur jusques a la et de la sen deuoit aller vers madame ce quil fist mais il ne peult passer pour les grandes eauvves, dont lui fut forche de retourner au giste en la dite ville dachs jusques a lendemain comme vous orez. Apres ce que monseigneur fut monte sur lesdites barges pour aller a la bonne ville de baionne, les rimeurs desdites barges crierent comme sont acoustumez les maronniers en tirant de grans engiens de joye, et se mirent a rimer le possible, tant quilz vinrent aupres dung chasteau appartenant a vng grant cheualier du pays, lequel cheualier vint audeuant de monseigneur sur vne petite barge bien acoustree de rimeurs et de gros engiens sur la dite barge, Et vint faire la reuerence a monseigneur lui presenter son chasteau corps et biens a lui faire seruice, dont monseigneur le remerchia, incontinent apres il presenta a mondit seigneur le beau poisson tant brochetz que autres, apres il presenta le vin et pain et vng petit bancquet, dont monseigneur le print bien en gre, et quant monseigneur leust tout rernerehie, lon aprocha ledit chasteau, le quel fit son deuoir de tirer gros engiens, de joye de la venue de monseigneur. Ainsi print le congie le cheualier et entra en sa barge, Et incontinent ledit cheualier rentre en sa dite barge les engiens qui estoient en icelle commencherent a tirer de si bons bastons que a merueilles, et incontinent ceulx du chasteau et des barges de monseigneur tellement que lon ne oyoit goute, et y print monseigneur grant plaisir, ainsi passa monseigneur le temps a passer la grosse riuiere tant quil vint a vne grosse lieuvve pres de la bonne ville de baionne, tantost apres vinrent les seigneurs de la ville audeuant de monseigneur a tout barges et autres basteaulx fort bien acoustrez de tapisseries et dengiens et quant ce vint a laborder, les seigneurs de la ville qui estoient tous habilliez dune parure et couleur de rouge auoient tant fait quilz auoient eu les trompettes de monseigneur et autres instrumens comme cornetz et autres pour estre sur leurs basteaulx qui estoient faits comme chasteaulx, et dessus estoient les trompettes et joueurs de monseigneur qui firent le possible de sonner et juer quant les seigneurs eubtent fait la reuerence que fut fort bonne et honneste, car ilz presenterent a monseigneur leur ville corps et biens a faire seruice, dont monseigneur les remerchia , et incontinent de deschargier engiens et tirer de tous costez les trompettes sonner, les cornetz faire leur deuoirs et les instrumens qui sembloit estre paradis, apres le receuel fait lon risma jusques en la ville, et les seignenrs de la ville sen allerent vers madame qui estoit venu par terre dun villaige dont auoit seiourne par trois ou quatre nuyts, et allerent faire reuerence comme a monseigneur a tout leurs barges apres le receuel tirerent et sonerent comme ilz firent a monseigneur, la quelle dame le print fort bien, et lors vint monseigneur et madame et se bouta a la barge de monseigneur et vinrent pour entrer en la ville, et par le destroit par ou ilz deuoient passer il y auoit plusiers grans basteaux ahunne qui estoient fort bien acoustrez e faloz ardans et dengiens, lesquelz tirerent de beaux cops et largement de joye de la venue de monseigneur et madame, et tiroit on de si bons engiens que les dites barges trambloyent pardessus leauvve et ala descente de la dite eauvve que estoit a faire de dite la ville a cause que la dite ville dun coste estoit toute noyee pour les grandes eauvves que estoit si treshaulte, la aupres de leauvve estoient les autres seigneurs de la ville, a tous torsses et faloz pour receuoir monseigneur et madame a grant joye, Et y estoit la pourcession des eglises que chantoient a haulte voix te deum laudamus ilz firent la reuerence a monseigneur et madame (Fol 25.) et presentoient la dite ville, et quils estoient lui tresbien venus et y auoit de bons et grans personnaiges de la dite ville, et y auoit vng abbe fort bien acompaignie et receurent monseigneur tres joyeusement et de bonne amour, monseigneur estoit acompaignie des commissaires du Roy de france, dont je croy quilz furent cause que monseigneur fut par tout le pays de france si bien receupt, et aussi je croy que le Roy le vouloit que lui fut fait comme a sa personne, et ont iceulx commissaires fait bien et honnourablement garde lonneur du Roy et deux meismes et bien monstrerent quilz estoient bien entenduz de bonne sagesse et de bon lieu. Ainsi apres le recueil fait aupres de leauvve, lon mena monseigneur en son logis, les rues estoient tendues de belles et bonnes tapisseries et dautres choses, et y auoit clarte par chacune maison, sans les torches et chandeilles, les cloches sonnoient que les faisoit bon oyr chacun prisoit monseigneur et madame pour leur bonte et beaulte, et ceulx qui estoient bons franchois deuenoient bons pour monseigneur, et vous dis et bien est vray que monseigneur a gagnie sans cop ferir plus de la moictie des ceurs de france, et ny fut jamais vng tel prince si aime en france que monseigneur est a present tant du Roy que de son peuple, dieu le permette longuement. Ainsi vint monseigneur en son logis a tout ses trompettes et ses nobles et gentilshommes en ordre comme dessus est dit. Lon fit a monseigneur bonne chiere, et lui fit on present et a madame de vin a grant largesse apres chacun se retira en son logis, mais de la chiere que firent ceulx de la ville de faire feux et esbatemens pour la venue de monseigneur et de madame et de danser et deulx resioyr que cestoit chose merueilleuse, dont tous ceulx de la court se resioyssoient auecqs eulx. Ainsi fut lentree de monseigneur et madame en la bonne ville de baionne, et se passa ladicte journee, lon compte de dachs a bayonne par eauvve de huit a dix lieuvves par terre sept.

Item le dimence XXIIIe jour de januier, monseigneur et madame seiournerent tout le jour en la bonne ville de bayonne, et auant que monseigneur et madame furent leuez, et prestz pour aller a la messe, le Roy de nauare ne dormit gaires mais fut diligent bien matin, car il vint de la cite de dachs a baionne, et incontinent lui venu en la ville et quil fut mis a point dautres habillement et riches, il vint vers monseigneur en son logis bien acompaignie des nobles et gentilzhommes de son hostel, et vint donner le bon jour a monseigneur et vint monseigneur au deuant de lui hors de sa chambre faire la reuerence, apres monseigneur se deuisa a luiet le mena vers madame faire la reuerence, laquelle le recueilla bien et honnestement en le baisant et puis se deuiserent ensemble, et monseigneur aux nobles de nauare. Apres le receul et aucunes diuises lon sen ala en leglise pour oyr messe que fut chantee par les chantres de monseigneur Et la messe fut dicte par labbe de la dite eglise et estoit icelle eglise fort bien acoustree de tapisserie et dautres richesses de reliquiaires de draps dor et de soye Le Roy print plaisir a oyr chanter et jouer des orgues de monseigneur, apres le retour de monseigneur et madame de leglise, pour aller deuant monseigneur aloit auec leuesque de corduvvaen, et le roy de nauare ramena madame par le bras, monseigneur et madame estoient fort richement acoustrez dabillemens, et y auoit si grant presse a les regarder que a paine pouoit on passer par les rues, monseigneur et madame furent pres tout ce jour acompaigniez du Roy, et disna et soupa auec monseigneur et madame, et fit on tresbonne chiere cedit jour. Apres le souper furent faictes les danses, pour lamour du Roy et des nobles apres les danses faictes lon apporta le vin de congie, et tantost prinst le Roy le congie de monseigneur et de madame et ainsi sen retourna en son logis, le Roy fut reconuoye par les grans nobles de monseigneur et de madame jusques a son logiz a tout les torsses de monseigneur, sans les siennes, ainsi se passa ceste journee de dimence.

Item le lundi XXIIIIe jour de Januier monseigneur et madame seiournerent tout ce jour a baionne, acompaigniez du Roy de nauare et de lapresdisner monseigneur fut aux champs auec le Roy pour veoir voller les pies et les millans, dont le Roy fut fort esmerueillie, de veoir voller les dits oyseaulx, qui tant estoient bons. Apres le retour des champs et que le Roy remua auec monseigneur jusques en court le Roy print le congie, et sen alla souper en son logis, ou il festoya Roy daucuns bons personnaiges et nobles de monseigneur, apres (Fol. 26.) le souper fait il sen vint a court vers monseigneur et madame et de rechief lon dansa et deuisa, dautre coste le Roy se deuisa longuement a monseigneur, et puis apres le Roy sen ala deuiser a madame, apres que les danses et deuises estoient acheuees le vin de congie fut apporte, et but le Roy a monseigneur et madame en leur priant que a leur retour ilz voulsissent venir par nauare, ce que monseigneur et madame promirent de faire sil leur estoit possible, ainsi print le Roy congie de monseigneur le baisant, et le Roy semblablement a madame, et toutes les dames furent baisies de Roy, ses nobles et gentilzhommes prinrent le congie de monseigneur et de madame, apres cela fait chacun se retira, et sen ala le Roy acompaignie des nobles de monseigneur car il ne volt souffrir que monseigneur descendist de sa chambre et chacun sen ala auec le Roi jusques en sa chambre, ainsi se passa ceste journee.

Item le mardy XXVe jour de Januier, monseigneur et madame seiournerent tout ce jour a bayonne, et ce jour se partyt le Roy de nauare bien matin pour sen retourner a dachs et de la en son pays, monseigneur ne fut ce jour nulle parti, si non quil fut par la ville pour la regarder et pour veoir leauvve que estoit sur les rues et partout ou monseiseigneur aloit il y auoit tant de gens pour le regarder que a paine en aucuns lieux lon pouoit passer ainsi se passa ceste journee.


Le voyage de Philippe de Habsbourg et Jeanne d’Aragon, de Bruxelles à Tolède
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