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1811 - Combat naval franco-anglais dans la Rade des Basques, au large de Châtelaillon (17)

mardi 27 avril 2010, par Pierre, 2422 visites.

Le secteur compris entre l’île de Ré, l’île d’Oléron et la côte est un des points-clés du dispositif anglais du Blocus Continental. La Rade des Basques, qui commande l’entrée maritime vers La Rochelle et Rochefort, est sous très haute surveillance. Les escadres anglaises épient tout mouvement de navire. Récit d’un de ces épisodes, le 27 décembre 1811.

Source : La France Maritime - Dir. Amédée Gréhan - Paris - 1837

1811 - Combat naval dans la Rade des Basques

Voir aussi : 1809 - Fouras (17) - La "bataille des brûlots" :
- à bord du vaisseau "le Régulus"
- à bord du vaisseau "le Patriote"
- l’amiral fait son rapport à l’Empereur

Combat naval dans la Rade des Basques (1811)

La rade des Basques

Si dans les guerres navales de l’empire, la fortune n’a pas toujours été fidèle à notre pavillon, le courage de nos marins, on peut le dire, ne s’est jamais démenti. Dans les grands et désastreux combats, comme dans les simples engagements d’embarcations, — ces tirailleurs de l’armée navale,—l’audace et le talent de nos braves ont souvent triomphé d’un ennemi supérieur en nombre. L’épisode que nous allons esquisser est une des mille preuves qui justifient cette assertion.

Trois vaisseaux, trois frégates et trois canonnières étaient mouillés sur la rade de l’île d’Aix. Un brave et habile officier, devenu depuis, par son épée, l’une des premières illustrations de notre marine militaire, — l’amiral Jacob. — commandait cette escadre. Il montait le Régulus, vaisseau d’une construction médiocre, mais l’un des mieux tenus de l’époque, et qui le serait encore aujourd’hui, malgré les perfectionnements amenés par le progrès. Le second commandant était M. Fargenel, installateur distingué de la marine impériale, et qui fut ensuite capitaine de pavillon du même officier général sur le vaisseau l’Océan.

Le second vaisseau était le Patriote, qui avait vu à son bord deux victimes de l’inconstance populaire : le roi Louis XVI à Cherbourg, l’empereur Napoléon à l’île d’Aix même ; l’un mort sur l’échafaud, l’autre dans l’exil ; celui-là puni par la France exaspérée, ivre de liberté ; celui-ci, par la France indifférente, rassasiée de gloire. Le troisième vaisseau était le Triomphant.

Les frégates étaient la Pallas, l’Elbe et la Saalt, à qui la restauration imposa le nom de l’Amphitrite, tant elle redoutait jusqu’aux mots qui pouvaient tinter un souvenir importun de nos glorieuses conquêtes. Enfin, les canonnières portaient les n°s 186, 191 et 184.

Une escadre anglaise était stationnée dans la rade des Basques.

1811 - Combat naval dans la Rade des Basques

C’était le 27 décembre 1811, à neuf heures du matin. Par un vent du nord-ouest, bon frais, un petit convoi parti de la Rochelle fuyait devant cinq péniches de l’escadre ennemie, et se voyait forcé de chercher un refuge, tout près de la côte, dans le fond de la baie comprise entre la Rochelle et l’île d’Aix, et qui se nomme Châtelaillon. Le commandant Jacob laissa les péniches s’enfoncer fort avant dans la baie, avant d’ordonner aucun mouvement à la flottille qu’il voulait envoyer pour les envelopper et leur couper la retraite. Lorsque le moment lui parut favorable, il fit appareiller les trois canonnières, sous le commandement du lieutenant de vaisseau Duré, et quatre canots des vaisseaux, sous les ordres de l’enseigne du Régulus, Constantin (J.-D.). Le chef de notre division dirigeait la marche de cette petite flottille de manière à rendre impossible la fuite de l’ennemi.

Aussitôt que l’escadre anglaise aperçut ce mouvement, un vaisseau, deux frégates et un brig appareillèrent pour venir dégager leurs embarcations compromises. Celles-ci, ayant vu également notre flottille, forcèrent de voiles et de rames pour rallier leurs protecteurs.

L’enseigne Constantin montait une péniche armée de vingt-deux hommes ; il en attaqua une montée par trente hommes, qui était au moment de rejoindre la division envoyée à son secours. Cet officier engagea le combat avec ses espingoles et sa mousqueterie ; mais craignant que l’ennemi ne lui échappât, il fit porter dessus et l’aborda. Forts de la supériorité de leur nombre, les Anglais s’élancèrent aussi à l’abordage ; mais l’impétueux Constantin se précipita sur eux et les culbuta sur le bord opposé de leur péniche, que ce mouvement fit remplir. Les Français remontèrent à leur bord et sauvèrent vingt-six hommes, dont un aspirant et un chirurgien.

L’officier commandant la péniche anglaise fut tué et trois hommes dangereusement blessés. Le brave et intrépide Constantin reçut un coup de feu qui lui fracassa le bras gauche et traversa une partie du corps. Cette belle action lui valut le grade de lieutenant de vaisseau et la croix de la Légion-d’Honneur. Voilà des distinctions qu’on doit être fier de montrer, quand on les a si bien méritées.

Pendant ce combat, nos canonnières attaquaient les quatre autres péniches anglaises, toutes armées de caronades, d’espingoles et de mousqueterie. Le lieutenant de vaisseau Duré, tout en contenant le brig ennemi qui voulait protéger ses embarcations, en amarina une de dix-huit hommes, dont deux aspirants. Les trois autres étaient harcelées par le canot du commandant de l’escadre, sous les ordres de l’aspirant de première classe Gorgy. Percées de boulets et coulant bas, elles arrivèrent sur la côte où il les poursuivit et fit prisonniers les équipages, montant à soixante-dix hommes, y compris un officier et cinq aspirants.

Le résultat de cette affaire, qui fait honneur aux talents du commandant qui l’a si bien dirigée, et au courage des marins qui l’ont accomplie, fut la prise de cinq péniches et de cent dix-huit hommes, dont deux officiers, huit aspirants et un chirurgien. Dans ce nombre, un officier et quatre matelots ont été tués, deux sont morts immédiatement après l’action, et cinq ont été blessés.

Ce n’était pas la première fois que la baie de Chalelaillon servait de théâtre à un combat d’embarcations. Le 13 février 1810, dans une circonstance à peu près semblable, treize péniches anglaises furent combattues par sept embarcations des frégates la Pallas et l’Elbe, seuls navires alors mouillés sur la rade de l’île d’Aix. Les péniches françaises forcèrent leurs ennemies à abandonner deux chasse-marées dont elles s’étaient déjà emparées. Malheureusement l’une de nos embarcations fut prise : c’était celle commandée par l’aspirant Potestas, de la frégate la Pallas. Emporté par trop d’ardeur, le jeune marin s’était imprudemment jeté au milieu des embarcations anglaises, et s’en trouva entouré quand le signal de ralliement obligea les autres canots à cesser le combat. Virant de bord lui-même pour obéir au signal qui flottait aux mâts de la Pallas, il se fit abandonner par plusieurs péniches. Combattant toujours, il espérait leur échapper, lorsque, abordé par trois de ces embarcations, il fut atteint par une balle qui lui traversa la poitrine et lui fractura le bras gauche. Couvert de sang et entouré par plusieurs hommes de son équipage blessés comme lui, il n’eut pas au moins la douleur de voir amener le pavillon : un matelot anglais renversa d’un coup de hache le mât auquel il était suspendu. Transporté mourant à bord du vaisseau le Christian VII, Potestas y reçut les plus grands soins. Le commandant de ce bâtiment, touché de la jeunesse et du courage de son prisonnier (il avait à peine dix-sept ans), le renvoya à bord de la Pallas, après lui avoir demandé le nom des hommes de l’équipage de sa péniche qui paraissaient le mieux mériter cette faveur, et l’accompagna lui-môme dans son canot jusqu’à la portée des canons des forts de l’île d’Aix. L’empereur Napoléon, toujours prêt à récompenser les belles actions, accorda pour celle-ci l’étoile de la Légion-d’Honneur au jeune et brave Potestas.

Les deux officiers qui se sont principalement distingués dans ces affaires, et qui seraient heureux d’avoir l’occasion de se signaler encore, sont attachés au port de Rochefort. M. Constantin, capitaine de frégate, est sous-directeur des mouvements, et M. Potestas, capitaine de corvette, préside les commissions de recettes pour les approvisionnements de l’arsenal.

Amédée Gréhan, Directeur-Fondateur de "La France Maritime".

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