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La Banlieue de la Rochelle (17), par Louis-Etienne Arcère (1698-1782)

jeudi 5 février 2009, par Pierre, 1190 visites.

La banlieue, cette zone où s’exerce le Ban, autour d’une ville, n’est pas une notion nouvelle. L-E Arcère explique comment est né cet espace protecteur des libertés publiques, face à l’arbitraire du droit seigneurial. Une notion à redécouvrir, avec celle de commune, car elles ont constitué un cadre favorable au développement des villes, à partir du 13ème siècle. Notre civilisation urbaine d’aujourd’hui leur doit beaucoup.

Voir : Carte satellite des lieux décrits par Louis-Etienne Arcère

Source : Histoire de la ville de la Rochelle et du Pays d’Aulnis - Louis-Etienne Arcère - La Rochelle - 1756 - Books Google

Banlieue de la Rochelle

Un des événemens les plus célèbres de notre Hisloire est celui qui arriva sous les derniers Rois de la seconde race, & sous Hugues Capet auteur de la troisiéme. Les Ducs & les Comtes dont l’ambition fut sans frein, changèrent des commissions passageres en gouvernemens perpétuels ; peu contens d’être les premiers sujets de l’Etat, ils voulurent en devenir les Princes. Les peuples dépouillés de leur liberté furent forcés de subir l’ignominie des loix que ces nouveaux maîtres établirent, & dont le souvenir reste encore pour en retracer des articles aussi odieux que bizarres.

Pour rétablir le Souverain & les sujets dans les droits qu’ils avoient perdus, on ne trouva pas de meilleur moyen que celui d’accorder aux Villes des Chartes d’affranchissement & de commune ; c’est-à-dire, le privilège de former un corps politique, ou assemblée composée des principaux citoyens. Ce corps devoit veiller aux intérêts communs, réunir tous les membres, pour repousser les violences des usurpateurs, rendre la justice aux habitans, & étendre même l’autorité sur le territoire voisin des murs d’une Ville, lequel fut appelle depuis Banlieue, Bannum leugae, Banleuca.

Le droit d’avoir une Banlieue ne fut pas une conséquence nécessaire de l’établissement des communes. Quelquefois le pouvoir des Communiers n’alloit pas au-delà de l’enceinte de la Cite. Il semble que vers la fin du treisiéme siecle les Officiers municipaux de la Rochelle n’avoient pas de territoire hors des murs ; puisqu’en 1278 le Maire [1] & les Prud’hommes furent accusés « d’avoir fait Banlieue, laquelle ils ne pouvoient ni ne devoient faire, & dont le Roi avoit dommage chacun an de 400 livres, & qu’ils n’avoient pouvoir hors les murs de la Ville.

Quoiqu’il en soit, l’an 1302 la Banlieue devoit être établie. En effet audit an, en ladite Mairie de Me. Laurent Poussar, fut dit par jugement [2] que la femme d’un nommé Hardi seroit bannie de la Ville & de la Banlieue, parce qu’il fut trouvé qu’elle avoit été Abroqueresse & Houliere. »

En 1343, le sieur de Chatel-aillon ayant prétendu que le Maire ne pouvoit connoître d’un attentat commis sur le chemin de la Fond, il y eut à ce sujet une enquête juridique, & le Maire qui fut maintenu dans les droits de Banlieue, se transporta sur le chemin & condamna le coupable au gibet. [3]

Il est fait une mention indirecte de la Banlieue dans les lettres pour la délivrance de la Rochelle en 1360, délaissons à notredit frère le Roi d’Angleterre pour lui & pour ses Hoirs ses successeurs, la dite Ville, le Chastel & les Forteresses de la Rochelle, avec les appartenances & appendances d’icelle [4], » ce qui désigne assez clairement la Banlieue.

Charles V. en reconnoissance des grands services que les Rochellois avoient rendus à la Couronne, établit d’une manière solemnelle la Banlieue, & en fixa les limites le 8 Janvier 1372. [5]

Ce district commençoit à la porte de S. Nicolas longeant les côtes de la mer jusqu’à Chatel-aillon, & au premier Pont d’Yves ; de-là tournant à gauche, il coupoit les Marais en droite ligne, & alloit aboutir au Bourg de Thairé inclusivement & à l’Ormeau de Forges, au-delà de Pied-de-Loire. De Forges, dont il renfermoit la Paroisse, aussi-bien que celles d’Aigre-feuille, de Saint-Christophle & de Saint-Medard, il alloit droit au Pairé de Fraise & traversoit des marécages, enveloppant les Paroisses de Verines, d’Angliers & le Village de Fon-patour. De ce côté-là le Pairé de Mille-écus lui servoit de bornes. Il partoit de ce point à gauche pour aller embrasser les Paroisses de Longéve, de S. Ouen & le Breuil-bertin, jusqu’au Pairé de Serigni. Là, cette ligne se coudoit suivant le cours des eaux, & après avoir tourné la Paroisse d’Andilli , elle s’avançoit jusqu’à Esnandes ; de ce Bourg, jusqu’à Chef-de-Baye ; de ce Promontoire enfin, jusqu’à la porte de Saint Nicolas, l’Océan servoit de bornes à la Banlieue. Ce territoire avoit près de 4 lieues de largeur & 5 lieues dans sa plus grande longueur, depuis Serigni jufqu’à Yves. Il comprenoit trente-huit Paroisses. « Celle de Ciré, dit Amos Barbot, n y a été jointe que depuis quelques années par attache & privilège particulier. »

Les habitans de la Banlieue étoient contribuables aux charges de la Ville. Ils étoient encore obligés moyennant certaines prérogatives à garder le Château de la Rochelle. Dans la suite i !s prétendirent qu’ils étoient exempts de garde, le Château ne subsistant plus ; mais ils furent contraints de soulager les Bourgeois & de rouler ensemble pour faire le service dans la Ville.

En 145 5, Charles VII. déclara que la Ville & la Banlieue ne seroient plus taillables, à condition que les Rochellois s’abonneroient à 4500 ivres, dont ils devoient trouver le remboursement dans la levée d’une imposition établie sur le vin. Pour soutenir les charges de la Ville, ce Prince établit encore en leur faveur, un droit sur les marchandises à l’entrée & à la sortie de la Banlieue.

Le Roi accorde une exemption de droits sur le sel aux habitans de la Banlieue. Comme il s’étoit glissé certains abus à ce sujet, M. Barentin, Intendant de la Rochelle, rendit le premier Décembre 1744, une Ordonnance pour fixer la manière dont la distribution devoit se faire.


[1Aug. Galland.

[2Ibid, pag. 37

[3Barbot.

[4Thesau. Anecdotor. Tom I, col. 1443.

[5Ordonn. tom. 2, 497

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