Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

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1587 - Conférences de Saint-Brice (16) : Henri de Navarre va-t-il craquer ?

jeudi 31 janvier 2008, par Pierre, 1871 visites.

Une lettre du futur Henri IV, aux abois, à son cousin le duc de Saxe. Les conférences de Saint-Brice, près de Cognac, en Charente, ont été un échec. Henri III, son frère, veut l’obliger à abjurer le protestantisme. Il n’en est pas question ...

Un document très éclairant sur la personnalité du futur roi Henri IV, et sur les jeux diplomatiques complexes de cette période.

A noter : pour écrire à son cousin le duc de Saxe, Henri utilise le latin, qui était la langue universellement comprise en Europe au XVIème siècle

Source : Recueil des lettres missives de Henri IV - Jules Berger de Xivrey - Paris - 1843

1586

Château de Saint-Brice, près de Cognac
Photo : Pierre Collenot - 10/2007

Le roi de Navarre part au mois de mai pour le Poitou et la Saintonge. Le maréchal de Biron y commandait une autre armée contre le parti protestant, à qui le récent mariage du prince de Condé avec la sœur du duc de la Trémouille venait d’acquérir dans ces provinces toute la noblesse alliée ou vassale de ce seigneur puissant.

En voyant les dangers dont la Ligue menace la maison de Bourbon, le prince de Conti et le comte de Soissons, jusque là restés avec la cour, se réunissent au roi de Navarre et au prince de Condé. Les progrès du maréchal de Biron sont arrêtés par le roi de Navarre.

A la sollicitation de ses ambassadeurs, les princes protestants d Allemagne envoient une ambassade à Henri III en faveur des Français de leur communion ; le Roi, après les avoir longtemps évités, les reçoit avec hauteur et sans vouloir accéder à leurs remontrances. Cependant il ne tarde pas à faire proposer par sa mère au roi de Navarre une entrevue qui, après beaucoup de difficultés préliminaires, a lieu à Saint-Bris près Cognac, le 9 décembre. Catherine de Médicis s’y fait suivre inutilement des plus belles personnes de la cour.

On y échange beaucoup moins de paroles de paix que de mots piquants et de récriminations. Un premier résultat est seulement une courte trêve jusqu’au 6 janvier de l’année suivante (1587).

La conférence de Saint-Bris traîne encore près de deux mois, bien que le roi de Navarre eût refusé d’y reparaître en personne. Le seul effet qu’eut cette vaine tentative de rapprochement, fut de fournir à Catherine de Médicis un moyen de chercher à compromettre le crédit de son gendre dans le parti protestant.

Il repousse ces insinuations en adressant au prince d’Allemagne l’exposé de ce qui s’était passé à Saint-Bris, et il réclame leur assistance comme plus nécessaire que jamais.

15 janvier 1587

Orig - Archives royales de Saxe. Copie transmise par M. le ministre d’état baron Lindenau.

Des lettres presque semblables et en date du même jour furent adressées au roi de Danemark et au duc de Wurtemberg. La copie de la première a été envoyée par M. le ministre de France à Copenhague ; celle de la seconde nous a été transmise par M. Duvernois, de Besançon. Voici la traduction de la lettre que nous publions

ILLUSTRISSIMO PRINCIPI ETC. CHRISTIANO, DUCI SAXONIAE ETC.


Illustrissime Princeps, Frater et Consanguinee carissime.

Postremis meis litteris cum de colloquio mecurn a regina matre tantopere ex petito Celsitudinem vestram monuissem, factum est ut post disquisita a me per dimidium fere annum hinc inde subterfugia, quod nihil boni exinde nos consecuturos unquam crediderim, tandem variis modis coactus, cum ea me colloqui oportuerit ; atque ut me mea non fefellit opinio, multis subinde fusis verbis et repetitis colloquiis, eo res rediit ut si, deserta religione mea, ad papisticam serio transire cum omnibus Gallis reformatam religionem profitentibus, atque hanc amplecti ingenue statuerem, omnia pro arbitrio meo postulata regem concessurum multis sponsionibus polliceretur. Si secus faxi, non est quod quicquam pacis unquam me expectare oporteat ; at cum Dei Optimi Maximi beneficio, in puriori et orthodoxa religione sim a puero educatus, creveritque et crescat in dies semper uberius domus Domini apud me zelus, extrema quaelibet omnia subire et perpeti mihi satius est, quam ne latum quidem unguem ab obfirmata in me pietate discedere.

Itaque considerata ab inimicis hac, quae mihi per Dei misericordiam adversus tot promissionum illecebras data est, firmissima constantia, dubium non est quin omnibus consiliis et conatibus advocatis, et coactis quaquaversum poterunt copiis, redintegrato et multo acriori quam antea furore, in me undique brevi insiliant 2. Et ni avertat Deus (qui nos a xxv annis tam saepe et novissime jam per biennium, contra omnium expectationem, hactenus servavit) funditus pessundent. Quod quam Reipublicœ Christianœ, vobisque imprimis luctuosum, imo et periculosum foret, vos pro summa vestra prudentia satis perpensuros facile mihi persuadeo. Quare si unquam auxilio fuit locus, urgent nunc Celsitudinis vestrae pietatem nostrae res alias deplorandae. Hinc fit ut confestim, regina recessa, nobilem virum ex familiaribus nostris, cum bis litterulis, propter periculosa itinera ad generosum dominum Segurium ablegarim, quem, auditis ab nuntio fusius omnibus, jubemus ut Celsitudinem vestram summa cum diligentia de his certiorem reddat, ad nosque quam citissime poterit cum responso de Celsitudinis vestrae auxiliis, ita diu expectatis, nobilem illum remittat ; quem quidem non absque ullo profectionis suae fructu a Celsitudine vestra dimissum iri confido. Hujus enim insigni pietate fretus, daturam spero operam, ne regem, Celsitudini vestrae amicissimum, ob periculum quod in tam diuturna mora situm esse omnibus notum est, a puriori religione infestissimis hostibus, in tam justissima causa obrui patiatur. Imo ut illustrissimus princeps parens Celsitudinis vestrae, piae memoriae, non solum auxiliari nobis primus, sed et Celsitudinis suae exemplo, qua poterat erga caeteros principes auctoritate, hos in mutuum auxilium omnes pertrahere decreverat. Sic suae Celsitudinis insistens vestigiis, Celsitudo vestra, qua eminet inter alios principes potentia, iter primus iis, alioquin silentibus, commonstrans, ad nos subito auxiliandos adhortabitur. Quo insigni beneficio quem me Celsitudini vestrae obligatum iri reputem optarim, ut satis sibi persuadeat

Faxit D. O. M. ut Celsitudini vestrae, prout feret semper voluntas nostra, aliquando id pro dignitate rependere possim. Atque ea spe innixus, Majestatem suam ardentissimis votis supplex oro ut Celsitudinem vestram totae Reipublicae Christianae adeo necessariam, quam diutissime servet incolumem.

Datum Rupellis, XV januarii MDXXCVII

Celsitudinis vestrae amicissimus consanguineus,

HENRICUS

AU PRINCE CHRISTIAN, DUC DE SAXE, ETC.



Très illustre Prince et très cher Frère et Cousin.

Depuis ma dernière lettre dans laquelle je faisais part à votre altesse du projet de conférence formé par la reine mère et dont l’exécution était si vivement désirée par elle, il est arrivé qu’après avoir vainement essayé pendant près d’une demi-année d’échapper par mille subterfuges à cette entrevue, prévoyant bien qu’il ne pourrait jamais en résulter aucun bien pour nous, il est arrivé, dis-je, que, forcé par les circonstances, j’ai été obligé de me rencontrer avec la reine. Ainsi que je l’avais prévu, après de longs pourparlers et de nombreux entretiens, abandonnés, puis repris, l’on en vint à me promettre que si je délaissais ma religion pour revenir à celle de Rome, et si j’adoptais franchement celle-ci, ainsi que tous ceux qui suivent le culte réformé en France, le Roi s’engagerait, en me donnant toutes les garanties désirables, à m’accorder tout ce que je demanderais. Si je n’acceptais point cette proposition, je ne devais, ajoutait-on, espérer aucune paix. Élevé comme je l’ai été, par la grâce de Dieu, depuis mon enfance, dans la religion pure et orthodoxe, et ayant senti et sentant tous les jours croître en moi le zèle de la maison de Dieu, j’ai mieux aimé m’exposer à souffrir toutes les extrémités que m’éloigner, même d’un seul pas, du chemin de la piété où Dieu a affermi mes pieds.

Il n’est pas douteux que, voyant la fermeté et la constance avec laquelle j’ai repoussé toutes leurs promesses et leurs séductions, nos ennemis ne fassent maintenant appel à tous les moyens et à tous les efforts, ne réunissent toutes leurs forces et ne nous attaquent incessamment avec une fureur nouvelle et plus grande que jamais. Si Dieu ne nous protège comme il le fait depuis vingt cinq ans, et tout récemment dans ces deux dernières années, contre l’attente générale, nos affaires vont être ruinées de fond en comble. Votre altesse comprendra facilement, dans sa prudence, combien un pareil événement serait déplorable pour toute la république chrétienne, et fatal surtout aux intérêts des églises de sa principauté. Si jamais il y a eu lieu à presser les secours, c’est en ce moment où nos affaires touchent à leur ruine, si la piété de votre altesse n’y pourvoit. Dans ce but, nous envoyons, aussitôt après le départ de la Reine, un des officiers de notre maison vers le noble sieur de Ségur, en le chargeant seulement de ces courtes lettres, à cause du peu de sûreté des chemins. Le sieur de Ségur, après avoir appris de notre envoyé le détail de tout ce qui s’est passé, en informera diligemment votre altesse, et fera repartir, le plus tôt qu’il pourra, l’envoyé avec une réponse de votre altesse sur les secours que nous attendons depuis si longtemps. Nous espérons que notre envoyé ne reviendra point de ce voyage sans en rapporter quelque résultat. Plein de confiance dans l’insigne piété de votre altesse, nous ne doutons point qu’elle ne fasse tout son possible pour empêcher que par suite de longs retards qui, au su de tout le monde, l’exposent aux plus graves dangers, un roi plein de dévouement pour la personne de votre altesse soit complètement écrasé par les ennemis mortels de la religion réformée, et cela en défendant la cause la plus juste. Bien plus, nous espérons que, marchant sur les traces de son très illustre père de pieuse mémoire, qui non seulement s’était décidé le premier à nous porter secours, mais encore avait fait tout son possible, et par son exemple et par la considération dont il jouissait auprès des autres princes, pour les entraîner à réunir leurs forces en notre faveur, nous espérons, dis-je, que votre altesse, en leur montrant l’exemple, et en agissant sur eux par son influence, les décidera, malgré leur torpeur, à nous apporter de prompts secours. Veuille votre altesse être bien convaincue de toute notre reconnaissance pour cet insigne bienfait. Puisse le Tout-Puissant fournir un jour à notre bonne volonté une occasion digne d’elle, pour lui en donner des preuves. Nous reposant sur cet espoir, nous adressons les vœux les plus ardents à la Majesté divine, pour qu’elle daigne conserver le plus longtemps possible dans une santé prospère la personne de votre altesse, si nécessaire au salut de toute la république chrétienne.

Donné à la Rochelle, le 15 janvier 1587.

De votre altesse le très-affectionné cousin

HENRI

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