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1627 - 1628 - Lettres du Cardinal de Richelieu pendant le siège de La Rochelle - 1

1ère partie : Janvier - Juillet 1627

mercredi 24 février 2016, par Pierre, 1097 visites.

Le Cardinal de Richelieu concentre en lui des qualités indéniables : Homme d’église (un peu), serviteur dévoué à son roi (passionnément), homme de guerre (fin stratège), habile négociateur (beaucoup). Il utilise avec talent tous les ressorts de l’esprit humain.
Son rôle pendant le grand siège de la Rochelle, en 1627-1628, est déterminant
Il écrit abondamment, et ses écrits, heureusement pour nous, ont survécu.

Nous présentons ici une large sélection de ses lettres, écrites pendant le grand siège de la Rochelle, en 1627-1628.

En raison de l’abondance de la matière, cette publication sera étalée dans le temps.

Source : Lettres, instructions diplomatiques et papiers d’état du cardinal de Richelieu - M. Avenel - 1853-1877 - BNF Gallica

Voir aussi :
- 1627 - 1628 - Le siège de La Rochelle d’après les Mémoires du cardinal de Richelieu
- 1627 - Les Anglais débarquent en l’île de Ré pour secourir la Rochelle assiégée

Les lettres suivantes
Richelieu au siège de la Rochelle
Peinture d’Henri Motte (1881)

CXLIV.

Bibl, imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. IV, nos 2 et 3, fol. 9, 5 1. - Minute.

8 janvier 1627

 A M. DE NAVAILLES [1].

Monsieur, J’ay receu beaucoup de contentement de voir par vostre lettre que l’appréhension que Mrs de la Rochelle avoient sans subjet [2] commence à diminuer. Je ne doute point que vous ne continuiez à les asseurer des bonnes intentions de Sa Majesté en leur endroit, estant certain qu’elles n’aboutissent à autre fin, sinon qu’à désirer d’entretenir exactement la paix qu’elle a eu agréable de leur accorder, et ce tant qu’ils se tiendront dans le respect et l’obéissance qu’ils luy doivent. Quant à la charge de séneschal [3] dont vous m’escrivez, je vous y assisteray en tout ce qui me sera possible, sachant la passion que vous avez au service de Sa Majesté. Ce pendant, je vous conjure de croire que je suis, etc.


CLXXII.

Imprimée. — Armorial général de d’Hozier, 48 registre : Rechignevoisin de Guron, p. 3o’\

 A MONSIEUR MONSIEUR DE GURON [4], GOUVERNEUR POUR LE ROI A MARAN.

12 février 1627..
Monsieur, A peine estiés-vous party de ceste ville, que le roy a esté adverty que les Anglois menaçoient de venir descendre sur l’isle de Ré, ou en celle d’Olleron, et parce que Sa Majesté sçait qu’ils ne peuvent rien faire en la première [5], estant garnie comme il faut, et par conséquent qu’ils pourroient tourner leurs efforts sur la seconde, elle escrit à M. du Rivau3 qu’il s’y rende en diligence avec la compagnie de gendarmes de la reyne sa mère, et en mesme temps y fait acheminer les huit compagnies du régiment du Plessis-Praslin, et les trois de la garnison d’Angers. J’ay creu vous devoir donner advis de ce que dessus, afin que, ceste lettre vous trouvant sur les lieux, vous confériez avec ledit sieur du Rivau de ce que vous jugerez important pour le service de Sa Majesté, en ceste occasion, et au surplus y contribuiez tout ce qui deppendra de vous ; vous asseurant sur cela que je suis, Monsieur, Vostre plus affectionné à vous servir, Le Card. DE RICHELIEU.
De Paris, ce 12 febvrier 1627.


CLXXIII.

Imprimée. -Armorial général de d’Hozier, 48 registre : Rechignevoisin de Guron, p. 301.

 A MONSIEUR MONSIEUR DE GURON.

12 février 1627.
Monsieur, Vous pouvez juger combien il importe au service du roy et à la réputation de la reyne sa mère, que les premières troupes qu’on envoyé en Brouage et en l’isle d’Olleron vivent avec ordre, et en sorte que le peuple ne s’en puisse plaindre, et que l’isle recognoisse que c’est pour la garantir, et sans qu’ils en puissent recevoir aucune oppression.
Pour cet effet, je vous envoye un ordre que M. de Marillac a dressé pour faire vivre la compagnie de la reyne [6], à laquelle j’auray soin de faire envoyer un quartier.
Je mande à Gohier3 qu’il aille avec les compagnies d’Angers pour le payer par prest à trois sols par jour et le pain, qu’il fault avoir soin de faire faire de peur que le peuple soit foulé.
Vous ferez payer les compagnies du Plessis-Praslin tout de mesme de l’argent que je vous ay baillé, dont on se remboursera sur la monstre.
Il sera besoin d’armer les habitans catholiques qu’on recognoistra affectionnez, et les faire enroller pour sçavoir le secours qu’on peult à coup près recevoir de l’isle.
J’ay ouy dire qu’il y a force huguenots dans l’isle ; vous nous manderez l’ordre qu’il faudra tenir sur ce subjet.
Il sera à propos, à mon advis, de loger les trois compagnies d’Angers en un lieu séparé du régiment du Plessis-Praslin ; cependant s’il est question de faire effet, elles se joindront toutes ensemble.
Si les compagnies du Plessis-Praslin ne sont complettes, vous ferez que les capitaines les rempliront promptement, sur peine d’estre cassez honteusement.
Enfin faites parroistre que vous estes Guron1. Si vous aviez besoin de davantage de gens que tout ce que dessus, M. de Toiras envoira volontiers deux compagnies du régiment de Champagne, lesquelles il ne fault demander qu’en cas de besoin et de nécessité.
Tous ces ordres que nous vous envoyons sont pour estre exécutez par M. de Saint-Luc, ainsy qu’il l’estimera plus à propos, non-seulement tandis qu’il aura encore son gouvernement 2, mais mesme quand il vous l’aura remis entre les mains ; l’intention du roy estant que tant qu’il sera en ces quartiers de delà, il commande en tout ce qu’il y faudra faire. Lareyne l’en prie, n’estimant pas pouvoir avoir un meilleur lieutenant.
Voylà tout ce que je vous puis dire pour cette fois. Bon pied, bon œil, s’il vous plaist, ne veniant non Romani sed Britanni, dit M. le président de Chevry, à qui vous devez quatre mil escus sans intérests, quod notandum hac tempestate.
Ne faites pas cognoistre que nous ayons grande alarme des menaces des Anglois ; mais serves-vous - en pour faire cognoistre à MM. de la Rochelle, que, sans ces rodomontades inutiles, ils ne souffriroient point d’incommodité et ne parleroit-on point de gens de guerre en leurs quartiers. Je suis Vostre affectionné à vous servir,
Le Card. DE RICHELIEU.
Le 12 febvrier 1627.
Nous vous envoyons la dépesche du roy à M. de la Rochefoucault et au régiment du Plessis-Praslin, pour faire passer huit compagnies des Sables et autres lieux où ils seront, en Olleron, affin que vous ayez le soin de faire exécuter cet ordre diligemment. Je suis d’advis qu’incontinent l’avoir receue, vous envoyiez le sieur de Samasan, qui est au roy, passer à Poitiers pour recevoir les ordres nécessaires de M. de la Rochefoucault sur ce subjet, et que de là il aille droit aux Sables pour faire embarquer lesdites compagnies, qui en dix heures peuvent estre par mer en Olleron.


CLXXXIII.

Bibl. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, nos 2 et 3, fol. 206. — Minute de la main de Charpentier.

 A M. DE SAINT-LUC [7].

[17 février 1627.] Lettre à M. de Saint-Luc. Que je suis cause de la mesprise qui est arrivée [8], parce que j’estimois que tant qu’il auroit le gouvernement2 en ses mains on luy devoit faire adresse de tous les ordres que le roy a à donner ; joint aussy que quand il eust esté remis entre les mains de la reyne, elle sera tousjours très aise qu’il commande aux lieux qui deppendront d’elle. Que je le prie, de sa part, de donner si bon ordre à toutes choses qu’il n’y puisse arriver inconvénient [9].


CLXXXIV.

Imprimée dans d’Hozier, Armorial général, registre iv : Rechignevoisin de Guron, p. 311.
— La matière de cette lettre se trouve à la Bibl. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, n" 2 et 3, f° 206. — De la main de Charpentier.

 A MONSIEUR MQNSIEUR DE GURON, GOUVERNEUR POVR LE ROY À MARAN.

17 février 1627.
Monsieur, On renvoye à M. de Saint-Luc le courrier qu’il avoit dépesché, par lequel on luy donne l’esclaircissement qu’il peut désirer de la volonté du roy.
On a eu advis certain que le dessein des Anglois est de venir descendre en l’isle de Ré, Oleron ou Maran. C’est pourquoy, craignant que vous ne peussiés pas vacquer à tout, on envoye le sieur de La Fitte pour vous ayder et demeurer particulièrement en l’isle d’Oleron, avec pouvoir d’ayde de camp et de pourvoir aux fortifications et magasins qui y sont nécessaires. Je vous prie tous ensemble de n’oublier rien de ce qui sera en vous pour mettre un si bon ordre à tout qu’il n’en puisse arriver d’inconvénient.
Vous mettrés, s’il vous plaist, celuy qui sera requis à Maran ; regarderez soigneusement à ce qu’il y faut faire, et ferez travailler promptement à ce qui sera plus pressé.
Je vous prie de prier M. de Saint-Luc de ma part de me donner la commission de commissaire des guerres, et de croire en vostre particulier que je suis, Monsieur, Vostre plus affectionné à vous servir, Le Card. DE RICHELIEU.
De Paris, ce 17 febvrier 1627.
« Original. » D’Hozier.


CXCV.

Bibl. imp. Fonds Letellier Louvois, 9334 l, fol. 10. — Original.

 A MONSIEUR L’ÉVESQUE DE MAILLEZAIS [10], A BORDEAUX.

24 février [1627].
Monsieur, Aiant veu par vostre lettre le nombre de vaisseaux que vous me mandez avoir arrestés au lieu où vous estes, j’avois résolu de les faire venir tous pour la digue ; mais le sieur Duplessis m’aiant tesmoigné que l’on incommoderoit grandement le traffic, si on les faisoit descharger, je prends la plume pour vous dire que je me contenteray d’avoir maintenant dix flustes, pourveu que j’en aie vingt autres de celles que le dit sieur Duplessis m’a asseuré devoir venir à la foire de mars. J’escrits sur ce suj et à M. d’Espernon, qui, sans doute, tiendra la main à ce que le roy soit servy en ceste occasion [11]. C’est pourquoy j’ay estimé que les quatre vaisseaux de guerre qui sont en la rivière de Bordeaux sont suffisans pour escorter les dix flustes que vous m’envoierez pour le présent. Il faudra, s’il vous plaist, que vou les envoyiez en la rivière de Charente, et donniez charge aux dits vaisseaux de guerre de les, faire charger de pierres pour amener à la digue [12]. Je me sens obligé de la bonne volonté que vous me mande que Messieurs du parlement vous ont tesmoigné avoir pour ce qu concerne le service du roy en ceste occasion, et en mon particulie vous les asseurerez, s’il vous plaist, qu’il n’y aura point d’occasion d les servir que je n’embrasse, et que je m’asseure qu’ils sentiront le fruit de mon entremise en toutes leurs affaires que j’embrasseray es temps et lieu. La maladie de M. d’Effiat a empesché qu’on n’y ayt pe travailler quand j’estois sain, mais je prendrai si bien le temps qu tout s’accommodera. Je vous prie faire souvenir M. de La Lanne de m’envoyer le compte de la despense des vaisseaux bien au net, afi que je l’envoie à M. d’Effiat pour luy faire voir que l’argent a est bien despensé. J’ay escrit aujourd’huy à MM. le garde des sceaux ( d’Herbault pour vos affaires, vous asseurant sur cela que je suis, Vostre très affectionné confrère à vous rendre service, - Le Card. DE RICHELIEU.
Encore que je vous aye escrit que je me contenteray de dix flustes maintenant néantmoins, s’il s’en peut trouver jusqu’à vingt de vuides je seray très aise de les avoir, parce qu’il est du tout nécessaire pot le service du roy d’en avoir le plus grand nombre qu’il sera possible.
Ce 24 février.


CXCVI.

Bibl. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, nos 2 et 3, fol. 145. — Original

 AU SIEUR CHEMIN [13].

26 febvrier 1627.
Monsieur Chemin, Le roy ayant eu advis qu’un vaisseau de guerre, dans lequel il y avoit seize canons de fonte verte, a fait naufrage en la coste du Marencin [14], Sa Majesté m’a commandé de vous escrire que vous faciez charger le sieur de La Barre4, ou en son absence ses officiers, desdites pièces de canon, et de plus que vous faciez retirer, par les habitans dudit Marencin, ce qui pourroit estre ensablé ; leur enjoignant d’en faire seure garde, sous peine d’en respondre en leurs propres et privez noms. Vous apporterez tout le soing qu’il vous sera possible à l’exécution de ce que dessus, et me manderez particulièrement ce que vous aurez fait sur ce subjet. Ce pendant, je demeure vostre atfectionné amy, Le Card. DE RICHELIEU.


CCI.

Bibl. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, nos 2 et 3, fol. 44 et 45.
— Minute de la main de Charpentier.
Imprimée. — Armorial genéral de d’Hozier (de Rechignevoisin de Guron, p. 33), 4e registre.

 A MONSIEUR MONSIEUR DE GURON, GOUVERNEUR POUR LE ROI À MARAN.

3 mars 1627.
Monsieur, L’allarme n’est plus si chaude qu’elle a esté il y a 8 jours.
Nous avons eu advis d’Angleterre que la délibération en laquelle ils savent qu’on est de s’oposer à leurs entreprises les attiédit. Cependant il n’y faut pas moins prendre garde et se préparer.
Ils ne préparent pas, en Angleterre, grand armement nouveau ; mais ils ont 20 voiles dans la Manche, qui ravagent et pillent nos vaisseaux et nos marchans.
La reyne est fort ayse de ce que vous avez prié M. de Toiras d’aller en Brouage et à Olleron, pour voir tous ensemble ce qu’il faut faire. Il est personne affectionée à leurs Majestés, très courageux et ardent au bien [15]. Sa Majesté se promet qu’il aura autant de soins à contribuer ce qu’il pourra à la conservation d’Olleron comme de Ré : aussy fait-elle estat de faire solliciter les paiemens de Ré, comme d’Olleron et de Brouage.
Je vous prie que la correspondance soit entière pour la mer et pour la terre ; vous en advertirez, s’il vous plaist, les sieurs de la Fitte et de Launay-Razilly.
Pour respondre aux articles de vostre lettre qui requièrent résolution, je vous diray que je suis d’advis qu’on prenne l’une des deux propositions de M. de Toiras, sçavoir est que les principaux de l’isle d’Olleron pourveussent à l’abondance des choses nécessaires, et à l’ordre de la despense pour la vie des hommes et des chevaux, en leur donnant d’entrée de l’argent d’avance qui leur seroit continué.
Ou qu’on fist un magasin de foin et d’avoine qui se distribueroit à chaque chef pour ceux de sa brigade, et deux boisseaux d’avoine par sepmaine, outre la paille qui leur seroit donnée gratis [16], et qu’on leur fist un prest d’un quart d’escu par jour.
Si le premier expédient se peut garder, je le préférerois au dernier, pourveu que l’on fist une taxe de ce que chaque gendarme ou cheveau léger devroit payer ; sinon il faut prendre le dernier en faisant le magasin. En tout cas, il faut garentir l’isle d’opression et de charge, et accoustumer les gens de guerre, de pied et de cheval, d’y vivre sans foule du peuple, d’autant qu’il faudra tousjours y en garder plus ou moins selon les occasions, ayant descouvert que ce à quoy travaillent maintenant les Anglois est à faire une association si estroitte entre nos huguenots et eux, qu’ils puissent, quand ils voudront, nous faire quelque foucade, et nous tenir perpétuellement en allarme en attendant leur beau jeu.
Quant à Maran, il est sans doute qu’il y faut fortifier cet esté. Voyez avec M. de Toiras ce qu’il y faut faire et m’en envoyez un plan et un dessein.
Si l’advis que vous me mandez de mettre les postes à la polette [17] pouvoit réussir, il nous seroit aysé d’avoir ce fonds pour Ré, Olleron et Maran ; mandez-moy si vous avez gens en main qui veulent faire ceste entre prise, et nous tascherons d’en venir à bout.
Nous avons pris de deçà le mesme advis que donne le sieur de Launay-Razilly [18], de faire un amas de vaisseaux à Blavet ; pour cest effet on a mandé à M. de Manty qu’il s’y rende, et de plus nous faisons armer 12 vaisseaux à St-Mallo, estans résolus de prendre revanche, si on nous attaque, par toutes voyes possibles.
On a donné 2 montres à M. de Toiras, et messieurs ses frères [19] sont demeurez contens.
Je trouve vostre advis fort bon pour le retranchement à faire autour du fort et fortification du dit fort ; c’est pourquoy je vous prie y faire incessamment travailler par le plus grand nombre de gens qu’il se pourra. Voicy le beau temps des maçons et des remueurs de terre ; en peu de temps on pourra mettre la forteresse en estat de ne rien craindre à l’advenir, et faire de si bonnes tranchées autour qu’on y puisse mettre4 cavalerie et infanterie. L’argent ne manquera pas, s’il plaist à Dieu ; car nous en emprunterons de tous costez, en une affaire de si grande importance au bien du service du roy et à la conservation de la paix. Vous le cognoistrez bien en ce qu’outre les deux mil pistoles que vous emportastes, j’en ay encore envoyé mil par le sieur de la Fitte, et trois mil par le sieur de la Rocheallard.
Vous ferez, s’il vous plaist, que Goyer tire toutes ces sommes en recepte pour en faire la despence en un compte général en bon ordre ; et je m’asseure qu’on verra ce qu’a gaigné le roy en mettant ceste place entre les mains de la reyne.
J’approuve fort que vous vous serviez de Bigoteau [20] ; asseurez-ie qu’il sera tousjours bien payé de ce qu’il fournira.
Je suis d’advis qu’on face faire deux galiotes de vingt bancs ; vous direz, s’il vous plaist, au sieur de Launay-Razilly qu’il y face travailler, et soyent faites avec toute sorte d’avantages pour la guerre.
Je vous prie de faire tout ce qui sera nécessaire pour que Mrs de la Rochelle cognoissent que tous les préparatifs qui se font ne sont point pour leur faire mal [21], mais seulement pour les empescher qu’on ne les embarque à faire une folie.
On fait descendre 200 milliers de poudre à Tours, dont on envoiera 20 milliers à M. de Toiras, 20 en Brouage et Olleron et 10 milliers à Maran.
Ce pendant je demeure, Monsieur,
Vostre plus affectionné à vous servir.
Le Card. DE RICHELIEU.

Je vous prie d’envoyer un plan et un dessein de l’isle d’Olleron, de la fortification du fort, des retranchemens qui y sont nécessaires, des lieux par où l’on peut faire des descentes en l’isle, les moyens qu’il y a de les fortifier, et généralement tout ce que vous penserés estre utile sur ce sujet, afin que le roy voye ce qui se peut faire. M. de Saint-Luc verra, s’il luy plaist, en cet endroit, les asseurances que je vous prie de luy donner de mon affection et de mon service, dont il recevra des preuves en toutes les occasions que j’auray de luy en rendre. Vous ferez part de ces nouvelles incontinent à M. de Toiras, afin qu’il soit instruit de tout ce qui se passe.
A Paris, ce 3 mars 1627.


CCXXVII.

Imprimée.-Armorialgénéral de d’Hozier : Rechignevoisin de Guron, registre iv, p 3g

 A MONSIEUR MONSIEUR DE GURON, GOUVERNEUR POUR LE ROY À MARAN.

28 mars 1627.
Monsieur, Pour response à vostre lettre du 20 de ce mois, je ne vous mande rien pour les fortifications particulières d’Olleron, parce que le sieur de Mortières, qui y est allé, verra avec vous ce qu’il y faut faire.
La fortification du bourg avec six bastions me semble grande et difficile, requérir grand temps et grand argent, ce qui n’est pas ce qu’il faut. Au reste je ne sçay s’il est bon de former en ceste isle de grandes villes fortes, d’autant qu’elles ne pourroient pas estre à l’advenir en mains si seures que celles de la reyne.
Ma pensée est qu’il faut fortifier le fort. Pour cet effet, le dernier dessein qu’en a envoyé du Carlot de trois bastions et deux demy me sembleroit bon. Que si auprez de ce fort-là on retranchoit quelque petite partie du bourg ou lieu à faire des écuries, magasins de foin et d’avoine, enfin quelques logemens légers pour les gens de guerre en cas de nécessité, cela suffiroit pour garder l’isle, estant certain qu’y ayant un bon fort pour estre secouru de gens de guerre pour la deffendre, il n’y a personne qui ose attaquer des pièces où l’on prévoit trouver tant de deffense.
Je suis bien aise que vous et ces messieurs qui sont de delà ayent réglé l’ordre qui doit estre gardé en Oleron. Quant au mot, comme aussy pour le vivre des soldats, je vous prie d’y faire tenir la main en sorte qu’il n’y ayt point de désordre.
Je ne juge pas qu’on puisse faire sortir sitost les gens de guerre de l’isle, parce que tous les jours nous avons nouveaux advis de la mauvaise volonté des Anglois ; mais bien suis-je d’ad vis qu’on ne fasse pas entrer la compagnie de gendarmes de la reyne dans l’isle qu’à un besoin, et qu’il la faut loger en quelque lieu si proche qu’elle y puisse passer à coup près s’il en est besoin. C’est à vous autres, messieurs, qui estes sur les lieux, à nous mander où ce logement pourra estre fait, pour qu’on y envoye un département d’icy qui deschargera d’envie.
Le roy est résolu de faire travailler à Maran ; mais on ne déterminera rien que vous ne soyez icy, où il vault mieux que vous faciez un voyage que d’aller en Guyenne.
Je seray bien ayse que vous gaigniez les capitaines que vous me
nommez ; pourveu qu’il y ayt seureté à s’en servir.
La reyne accorde volontiers l’exemption des corvées à M. de Comminges, et au pilote dont vous m’avés escrit.
Pour les ministres dont vous parlés par vostre lettre, vous ferez ce que vous et ces messieurs de delà estimerés à propos.
Il sera bon de former les compagnies des habitans de l’isle de catholiques et huguenots come vous me mandez.
On m’a escrit qu’il demeure force gens de la garnison de M. de Saint-Luc en Brouage : vous prendrés garde, s’il vous plaist, que cela ne préjudicie.
M. de La Rocheallart me mande qu’il faudra bien garnir les magazins. Je croy que vous y aurez pourveu selon les marchés passés avec Bigoteau.
On envoye pour armer deux mil cinq cens hommes ; je vous prie de faire mettre les armes en un magazin, les faire tenir nettement, et les conserver en sorte qu’il n’y soit point touché.
Si le frère de la Vienne est chirurgien, et qu’il veuille aller demeurer en Brouage, je seray bien aise qu’il soit gratifié de la place.
Peneau s’y en va incontinent pour remplir celle que vous luy avés destinée.
Si on peut gaigner seurement les capitaines de mer qui ont servy M. de Soubize, comme m’escrit M. de La Rocheallart, il sera bon de les emploier.
Je trouve bon, suivant aussy ce qu’il me mande, que l’on donne la moitié des gages de l’aumosnier de la garnison aux pères récolets.
M. de Mande m’a dit que le sieur de Hodancourt s’estoit remis entièrement à ce que vous avez désiré touchant l’ordre de l’isle.
Vous ferez, s’il vous plaist, fournir le surplus de ce qui est deub à M. du Plessys-Praslin pour la recreue de son régiment, selon le mémoire que je vous envoye.
Depuis ce que dessus escrit, on a eu advis que les Anglois font estat de venir avec des vaisseaux d’environ deux cents tonneaux, et arriver en Brouage avec une grande marée qui les puisse porter à la muraille des bastions et courtines du costé de la mer ; font estat de joindre à l’arbre du beaupré un autre arbre pour faire dans les deux une échelle ou pont par laquelle ils prétendent pouvoir monter jusqu’à la courtine, qui est fort basse et mauvaise, et ainsy surprendre la place. On tient cet advis difficile ; mais cependant on en advertit pour qu’on y prenne garde : car il est certain que les Anglois ont quelque dessein sur Brouage. Cela me fait suspendre vostre retour jusqu’à tant que j’aye receu de vos nouvelles.
S’il est besoin de fortifier la garnison comme vous me mandés, vous taillerez et roignerez comme il vous plaira. Ce pendant je demeure, Monsieur, Vostre plus affectionné à vous servir, Le Gard. DE RICHELIEU.
De Paris, ce 28 mars 1627.


CCXXXII.

Imprimée. -Armorial général de d’Hozier : Rechignevoisin de Guron, registre IV, p. 41

 A MONSIEUR MONSIEUR DE GURON, GOUVERNEUR DE MARAN, ESTANT DE PRÉSENT EN BROUAGE.

16 avril 1627.
Monsieur, Je vous fais ce mot pour vous dire que les advis de la descente des Anglois continuent [22], et que nous en avons de tous frais qui nous avertissent qu’ils doivent partir le 20 de ce mois de Porsemus [Portsmouth]. Ils portent toutes sortes de bannières pour entrer dans les ports comme amis, et faire leur descente par surprise ; ce sont gens qui veulent faire une boutade comme ils firent à Calis. Il est question de faire en sorte quelle leur réussisse aussy mal.
Quelques-uns croyent qu’ils iront droit en vos costes ; c’est pourquoy je vous en avertis, et je m’asseure qu’ils vous trouveront bien préparez à les recevoir.
Je suis en peine de savoir si la compagnie de ta reyne et celle de Mr de la Flocellière sont arrivées, si elles sont dans l’isle ou en lieu proche pour s’en servir à coup près.
J’attends des nouvelles de ce qu’aura fait le sieur de Mortières.
Quoy qu’on résolve, il le faut faire promptement.
Le capitaine Richardière estime qu’il vaudroit mieux faire un port en Olleron, dans la rivière de la Perroquine, que vis-à-vis de la pointe du Chaput, là où on le comence. Je vous donne cet advis pour que vous en fassiez tel estât que vous verrez bon estre. La raison est que la Perroquine est plus au milieu de l’isle pour soustenir toutes sortes de descentes.
Il dit aussy que la galliotte de M. de Thoiras est trop grande, et par conséquent qu’il seroit inutile d’en faire de semblables, particulièrement pour Olleron, où la mer est plus basse et les descentes plus difficiles ; que le corps de tels vaisseaux est trop pesant, difficile à manier, et qu’il suffiroit d’en faire faire de quatorze bans, plus longs que celle de M. de Saint-Luc et plus rases. Je suis bien de son advis, veu qu’on espargnera beaucoup de dépense, et deux petites galiottes de quatorze bans rendront plus de service et seront de bien moindre entretien ; je vous prie donc n’en point faire faire d’autre, et croire que je suis, Monsieur,
Vostre plus affectionné à vous servir, Le Card. DE RICHELIEU.
A Paris, ce 16 avril 1627.


CCLIV.

Imprimee. - Armoriai général de d’Hozier : Hechignevoisin de Guron, registre iv, p. 44*.

 LETTRE DU ROI A MONSIEUR DE GURON, GOUVERNEUR DE MA VILLE DE MARAN

2 mai 1627

M. de Guron, Les advis qui m’ont cy-devant esté donnez que les Anglois avoient desseing d’exécuter quelque entreprise aux costes de ma province de Poictou et autres lieux circonvoisins m’ayant esté de nouveau confirmez3, j’escris présentement au sieur de Toiras, gouverneur et mon lieutenant général en mes pays d’Aulnis, ville et gouvernement de La Rochelle, qu’il ayt à faire promptement préparer sept ou huit vaisseaux à feu pour servir à la mer contre lesdits Anglois ou autres qui se mettront en debvoir de tenter quelque entreprise sur lesdites costes, et qu’il se serve à cet effet des plus petits vaisseaux qui ont esté pris sur lesdits Anglois ; sur quoy je vous ay voulu faire ceste-cy pour vous dire que vous ayez à suivre l’ordre qui vous sera donné par ledit sieur de Thoiras sur ce subjet, et adviser avec luy ce qu’il conviendra faire pour préparer avec diligence lesdits vaisseaux à feu, luy despartant toute l’assistance qu’il aura à désirer de vous pour l’exécution de ma volonté ; et vous exhorte aussi de prendre si bien garde aux lieux où vous estes que les ennemis de mon estat ne s’y puissent prévaloir d’aucun advantage : de quoy me reposant sur vous, je prieray Dieu, M. de Guron, vous avoir en sa sainte garde.
Escrit à Paris, le 2e jour de may 1627.
LOUIS.
PHELYPEAUX.


CCLXII.

Archives de la famille de Razilly. Communiquée par M. Margry. — Original.

 A MONSIEUR MONSIEUR DE LAUNAY RAZILLY, COMMANDANT EN L’ISLE D’OLLERON.

16 mai 1627.
Monsieur, Sur les bruits qui continuent de la descente des Anglois, je vous fais ce mot pour vous prier de faire faire des vaisseaux à feu en Brouage le plus promptement qu’il vous sera possible, afin que, s’ils vouloient exécuter leur dessein, on soit préparé à tout ce qui sera nécessaire pour les empescher. Richardelle [23] et Gentiliot ont dit qu’ils cousteroient deux cens escus la pièce. Pour cet effet, on vous envoyé douze cens escus pour en faire faire quatre, et autres douze cens escus qu’on envoyé à M. Toiras pour en faire faire autant dans Ré. Vous envoierez aussy, incontinant la présente receue, deux barques vers Surlingues et Oixant [24], pour vous rapporter des nouvelles à coup près lorsque les Anglois paroistront à la mer. Vous pouvez tenir la galiote qu’on a acheptée de M. de Saint-Luc armée, car je l’ay fait mettre sur l’estat des vaisseaux qu’on va armer présentement. Je suis, , Monsieur, Vostre bien affectionné à vous servir, Le Card. DE RICHELIEU.

Le trésorier des fortifications, qui va porter une rescription de vingt-cinq mil livres pour les fortifications de Brouage et Olleron, portera quant et quant l’argent pour les vaisseaux à feu, et ce qu’il faudra pour envoyer battre les costes de Surlingues et d’Oixant, pour apprendre des nouvelles. Cependant je vous prie, sur vostre crédit, ne laisser de faire faire les vaisseaux à feu et envoyer les dites barques.
Toutes les affaires de vostre frère sont faites et passées en la chambre des comptes.
M. de Toiras vous fera bailler le plus grand des cinq vaisseaux anglois qui ont esté pris, lequel le roy désire que vous faciez armer, s’il en vaut la peine.
De Paris, ce 16 may 1627.


CCLXIX.

Imprimée. -Armorial général de d’ Hozier : Rechignevoisin de Guron, registre îv, p. 46l.

 A MONSIEUR MONSIEUR DE GURON, GOUVERNEUR POUR LE ROY À MARAN.

20 mai 1627.
Monsieur, J’escrits à Mr de Toiras que tant s’en faut que vous m’ayés mandé qu’il eust quelque deffiance de moy, qu’au contraire vous ne m’avez jamais escrit que pour m’asseurer de la passion qu’il tesmoignoit avoir au service de Leurs Majestés et [de] son affection en mon endroit. De sorte que je n’estime pas qu’il reste en son esprit aucune créance contraire, à cette vérité.
On envoyera un commandement du roy à Surlaube [25] pour le faire sortir du chasteau d’Olleron, et le mettre dans un bourg à part de l’isle, et taschera-on par mesme moyen de luy faire toucher quelques monstres sur les quatorze que vous me mandez luy estre deues ; ce que j’ay appris en escrivant ces lignes qu’il fera bientost, veu que l’on a délivré une rescription de trente-trois mil tant de livres au trésorier, que je fais solliciter de faire ses diligences à ceste fin.
Quant à ce que vous m’escrivez qu’il faut six cents hommes pour garder le fort et le retranchement d’Olleron, le roy fait expédier une commission au sieur de Launay-Razilly pour lever une compagnie de cent hommes pour tenir garnison dans le fort ; et les trois compagnies d’Angers seront dans le bourg. Et en cas de besoin pourra-on se servir de celle de M. du Plessis-Praslin. Cependant, ayant jugé à propos que vous faciez un voïage icy, je vous prie de donner ordre à tout ce que vous jugerez nécessaire en Brouage. Recommandez au sieur de la Rocheallart d’en avoir un soin particulier et aux capitaines de Brouage de luy obéir, ainsy que je leur escrits, et partir le plus promptement que vous pourrez, vous asseurant que vous me trouverés désireux de vous tesmoigner que je suis, Monsieur, Vostre plus affectionné à vous servir, Le Card. DE RICHELIEU.
De Paris, ce 20 may 1627.
CCLXX.
Bibl. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, n°’ 2 et 3, fol. 119. - Minute de la main de Charpentier.
A MM. LES CAPITAINES DE BROUAGE.
[20] mai 1627
M. de Guron étant appelé par le cardinal, et M. de la Rocheallart ayant ordre de prendre garde à toutes choses, la reine désire que MM. les capitaines de Brouage obéissent à ce dernier.


CCLXXII.

Imprimée. — Armoriai général ded’Hozier : Rechignevoisin de Guron, registre iv, p. 471.

 A MONSIEUR DE GURON, GOUVERNEUR DES VILLE ET CHASTEAU DE MARAN.

26 mai 1627.
Monsieur, Vous ayant escrit qu’il estoit nécessaire que vous vinssiez faire un tour icy, je vous prie, avant que partir, donner bon ordre à Brouage [26].
On m’a dit que les compagnies ne sont point complettes, que les soldats, faute d’estre couchés, y demeurent fort peu. Je ne sçay que s’en est ; je vous en advertis cependant, afin que vous y pourvoyiez.
Quant au reste, il y a beaucoup de choses auxquelles on ne sçauroit prendre de résolution que vous ne soyez icy, où3 vous recevrés la réprimande des grandes concussions et du peu de despense que l’on dit que vous avez faite.
J’ay escrit à M. de la Rocheallard et à messieurs les capitaines de Brouage pour qu’ils luy obéissent, et ainsy lever toute difficulté en vostre absence.
M. de Bullion se recommande à vous. La goutte luy fait porter une partie de la peine deue à ses fautes passées. Si vous aviés tous deux ce que vous avez bien mérité, La Rochelle ne seroit pas en peine de chercher les moyens de se délivrer de vous. Je suis, Monsieur, Vostre plus affectionné à vous servir, Le Card. DE RICHELIEU.
Vous nous envoyez un peu souvent des courriers quand les choses ne sont pas pressées.
Le 26 may 1627.


CCLXXIII.

Imprimée. -Armorial général de d’Hozier : Rechignevoisin de Guron, registre IV, p. 47 1.

 A MONSIEUR DE GURON, GOUVERNEUR DES VILLE ET CIIASTEAU DE MARAN.

28 mai 1627.
Monsieur, On a de nouveaux advis que la flotte d’Angleterre se grossit tous les jours et attend le temps de partir. On est adverty qu’outre les vaisseaux de guerre, ils chargent de petits vaisseaux de bled qui est infailliblement pour jetter dans La Rochelle. Je vous prie, devant que partir pour venir faire icy un tour, faire si bien réparer ce qui est arrivé en Brouage qu’il n’en puisse arriver d’inconvénient. Goyer s’en ira bientost, qui portera par bonnes lettres de change force argent pour les travail d’Olleron, Brouage et le payement des garnisons. Je vous prie de mettre bon ordre en Brouage avant que partir, et vous en venez par après icy promptement ; peutestre 2 que vous serés de retour à temps pour montrer que M. de Guron , qui se rend père en temps de paix pour prescher la foy, se rend Mars en temps de guerre pour desfaire les ennemis d’icelle. Sur cela, je demeure, Monsieur, Vostre plus affectionné A vous servir, Le Card. DE RICHELIEU.
A Paris, ce 28 may 1627.


CCLXXIV.

Bibi. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, nO" 2 et 3, fol. 257. - Original de la main de Charpentier ; quelques passages de la main de Richelieu [27].

 A M. DE NAVAILLES.

31 mai 1627
Monsieur, Messieurs de la Rochelle ne pouvoient mieux tesmoigner le désir qu’ils ont de vouloir se contenir dans l’obéissance qu’ils doivent au roy, qu’en se saisissant de ceux qui avoient commission de prattiquer [28] des gens contre son service et le repos de son estât, et les remettre entre les mains des juges ordinaires pour leur ordonner la punition qui est deue à leur crime. Sa Majesté leur sçait tout le gré qu’ils sçauroient désirer de ceste action, et continuans à suivre ceste voye, ils en recevront, je m’asseure, tous les tesmoignages de recognoissance et de satisfaction qu’ils en peuvent attendre de sa bonté. Je vous prie les en asseurer, comme aussy [29] à tenir la main à ce que le chastiment mérité par telles gens soit exemplaire. Ils gaigneront autant par ce procédé comme ils perdroient par la voye que le sieur de Soubise voudroit bien qu’ils embrassassent. Pour mon particulier, je contribueray tousjours à leur avantage [30] tout ce qui me sera possible, et en outre à vous faire paroistre, en ce qui vous concernera, que je suis véritablement, Monsieur, Vostre très affectionné à vous rendre service.


CCLXXXIV.

Arch. de la famille de Razilly ; communiquée par M. Margry. — Original.

 A MONSIEUR MONSIEUR DE LAUNAY RAZILLY.

18 juin 1627.
Monsieur, Pour response à vostre despesche, je vous diray que l’on a envoyé des armes en Brouage pour deux mil hommes, que je croy estre arrivées, dont il en faudra prendre pour vostre compagnie.
Pour ce qui est de ce que vous me mandez des pouldres, si vous n’en avez assez en Oleron, vous en prendrez en Brouage en remplaçant.
Nous attendons dans trois jours Mr de Guron, qui nous dira en quel estat est l’isle ; cependant, sur le bruit qui court des Anglois, je vous prie de faire travailler diligemment à faire eslargir le retranchement du bourg. Il fault aussy faire entrer dans l’isle la compagnie de chevaux-légers de Mr de la Flocelière.
On envoie ordre pour mettre les compagnies du régiment du sr Duplessis-Praslin à cent hommes.
Mr de Guron m’a mandé qu’il avoit emprunté xx mil #, que j’ay faict rendre au sr Rambouillet.
Oultre, j’envoye par ce courrier deux mil pistolles, sur quoy il fauldra prendre deux cens escus pour la levée de voz cent hommes, deux mil livres pour la recrue de chaque compagnie du sr Duplessis-Praslin, et du reste on baillera à Bigoteau ce qu’on estimera nécessaire d’advance pour promptement faire apporter des vivres dans l’isle, principalement bledz, vins et avoyne pour deux mois. Je suis, Monsieur, Vostre bien affectionné à vous servir, Le Card. DE RICHELIEU.
A Chaliot, ce XVIII juing 1627.
Nous venons tout présentement d’estre advertis que les Anglois sont partis ; c’est pourquoy je vous prie de vous tenir plus que jamais sur vos gardes.


CCXCI.

Bibl. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, nos 2 et 3, fol. i54. — Mise au net de la main de Charpentier.

 A M. DE MONTMORENCY [31].

Du 24 juin 1627.
Monsieur, L’accident qui est arrivé à monsieur de Bouteville me fait prendre la plume pour vous tesmoigner qu’il n’y a aucun qui compatisse davantage que moy au desplaisir que vous aurez de la perte d’une personne qui vous estoit si proche. Le roy a esté plus fasché que je ne vous puis dire d’en venir en ceste extrémité en son endroit ; mais les recheutes si fréquentes auxquelles il s’estoit porté volontairement, en une chose qui combattoit directement son autorité, a fait que, pour couper la racine de ce mal si invétéré en son royaume, il a creu estre obligé, en conscience et devant Dieu et devant les hommes, de laisser le cours libre à la justice en ceste occasion. En toute autre, où il n’yra point de l’intérest de son estât, vous recevrez sans doute des preuves de sa bonne volonté. Pour moy, monsieur, je vous conjure de croire que toutes celles que vous désirerez de mon affection vous feront voir, plus clairement que mes paroles, que je suis autant qu’on le peut estre, Monsieur, Vostre très affectionné serviteur.


CCXCIV.

Arch. de la famille de Razilly ; communiquée par M. Margry. — Original.
Bibl. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, n05 2 et 3, fol. 59. - Minute de la main de Charpentier.

 A MONSIEUR MONSIEUR DE LAUNAY RAZILLY, COMMANDANT À OLERON.

1er juillet 1627.
Monsieur, J’ay receu la vostre, et pour response je vous diray que les Suisses ne sortiront point de l’isle sans paye, aussy qu’il est impossible pour ceste heure de mettre plus de cent hommes au chasteau, mais qu’on augmentera le nombre des compagnies, le roy envoyant dès à présent le sieur Mazon, qui estoit lieutenant de sa compagnie de mousquetaires, pour en lever une.
Pour ce qui est du payement des cappitaines, je feray en sorte qu’on y pourveoira.
J’ay envoyé de l’argent par la Courneufve pour continuer le travail ; je désire surtout qu’il ne cesse poinct.
On donne icy argent à Bigoteau pour qu’il fournisse de vivres.
Cependant, sy vous avés besoing de bled, j’escrips un mot à M. de Maillesais [32], qui est en son évesché, qu’il vous en fournisse 25 tonneaux pour mettre dans le chasteau à coup près [33]
Au surplus, je vous prie de faire razer les maisons des soldats qui sont allés trouver monsieur de Rohan et de traitter ceux de l’isle qui demeureront dans l’obéissance le plus doucement que vous pourrez, pour faire veoir la différence qu’il y a. Je vous conjure de vous tenir plus que jamais sur vos gardes et me croire , Monsieur, Vostre plus affectionné à vous servir, Le Card. DE RICHELIEU.
A Villeroy, ce 1er juillet 1627.
CCXCV.
Bibl. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, n" 2 et 3, fol. 59. —Minute de la main de Charpentier1.
A M. DE LA ROCHEALLART [34].
1" juillet 1627.
Qu’il prenne garde aux advis qu’on luy donne. Que je ne puis croire que les gens de M. de Saint-Luc [35] voulussent faire aucune entreprise.
Au moins sçay-je bien qu’ils ne le feroient pas du consentement de leur maistre.
Qu’il m’advertisse de ce qu’il descouvrira du sieur de la Cerde et du contrôleur du Hamel.
Qu’il a bien fait de faire sortir le sergent de M. de Saint-Luc, et que s’il y avoit preuve de ce qu’il me mande qu’il a dit, il le pouvoit faire mettre prisonnier et chastier exemplairement.
Quant au matelot prisonnier, j’estime qu’il mérite bien les galères comme il mande, et qu’il importe de faire voir un exemple de justidfc.
Quant à l’advis de la damoiselle huguenotte qu’il me mande, le roy est trop asseuré de ses vrais serviteurs pour en recevoir de mauvais advis, et que je m’asseure aussy qu’il est trop advisé pour ne faire parler du nom du roy en toutes choses comme il est à désirer, m’asseurant bien que si quelqu’un s’oublioit en ce point, on en sçauroit plus tost le chastiment qu’on en auroit fait que l’advis.
Qu’on suivra l’advis qu’il donne pour le domaine. Je désire que Treillebois [36] soit content ; mais que, s’il venoit à manquer à sa parole, il n’y a nulle difficulté qu’on en feroit raser la maison.


CCC.

Bibl. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, n0’ 2 et 3, fol. 220 verso. —
Minute de la main de Charpentier.

 A M. DE TOIRAS.

2 juillet 1627.
Le roy estant tombé malade d’une légère fièvre tierce qui l’arreste à Villeroy [37] ; sur le bruit que les Anglois veulent venir attaquer le port de la Rochelle, elle y envoye M. d’Angoulesme [38], pour amasser la cavalerie légère et la noblesse, afin de s’opposer à leur dessein. Je ne puis croire qu’ils viennent ny en Ré, ny en Olleron [39] ; mais que toutes fois luy et ceux qui sont en Olleron ont bien besoin d’estre sur leurs gardes. Il se peut asseurer que, s’il est attaqué, il sera bientost secouru. Pour mon particulier, bien que je ne sois plus homme de guerre, il peut faire estat que je n’ay rien au monde que je ne voulusse mettre en une telle occasion.


CCCXIX.

Bibl. imp. Fonds LetelIier-Louvois, 93341, fol. 21. — Copie.

 A M. DE MAILLEZAIS [40]

[ Vers le milieu de juillet] 1627.

Monsieur de Maillezais finira avec le Plessis [41] d’Espernon le traitté de sa charge moyennant une assignation de nouveau convoy ou3 En passant à Brouage , passera le marché des magasins, mettant du foin et de l’avoine dans celui d’Oleron et quantité de charbon en tous les deux.
Arrestera en passant qu’on ne coupe plus de bois à la Roche.
Arrestera, avec M. d’Argencourt, en passant le marché des travaux d’Oleron, s’il se peut, avec le maçon, à 24, 25 ou 25 livres et demie la toise.
Arrestera le marché des dehors de la Sortière, et obligera à les rendre faits en mars.
Arrestera, s’il se peut, [avec] un autre entrepreneur, les dehors du costé des bastions de la Gresne, selon que M. d’Argencourt voudra.
Fera charger, s’il veut, quelques vaisseaux de sel en Oleron, pour les mener à Bordeaux et Bayonne, et les changer contre des ancres, piques et autres marchandises.
Fera charger du vin pour la Bretaigne, pour eschanger contre des bleds.
Fera charger à Bordeaux un vaisseau hollandois pour aller en Moscovie, ou Amsterdam, quérir des câbles aux risques des Hollandois.
Fera charger d’autres vaisseaux pour rapporter d’Hollande, à leurs risques, deux mille mousquets, deux mille corcellets blancs [42] sans tassette [43], mais prolongés avec les courroies couvertes d’écaillés et les bourguignottes [44] pareilles.
Plus cent ou deux cens pièces de canon de fer, de 8 et 12 livres de balles.
Plus de la rosette ; plus des mas.
Fera marché pour porter avec des Hollandois, douze mille muids de sel au Hâvre, Calais et Dieppe.
Verra, avec M. Martin, à qui on doibt confier mes congez, et luy dira qu’absolument on n’en parle point au Parlement.
Fera partir les vaisseaux au premier beau temps, non de tempeste, avec escorte des deux vaisseaux de Blaye, de la patache de Royan, du vaisseau de l’Espagnol armé, et autre, si besoin est.
Fera partir les deux pataches de Brouage.
Verra si les vaisseaux anglois de Brouage pourroient aller au-devant, prenant des ancres ou amarres, ou du petit Saint-Luc, ou d’autres vaisseaux qui sont au port.
Fera conclure le marché de sel en Brouage et Oleron.
M. de Maillezais, en passant, priera le lieutenant général de Xaintes, de ma part, faire informer contre Desouches [45].
Il me mandera de Brouage combien il aura de vaisseaux maçonnez quand on les aura.
Envoyera un procès-verbal du vaisseau que prétend le comte de Maure, afin de le juger.
Fera venir cinq-cents louchets [46] ou pales ferrées de Bordeaux en Brouage.
Fera venir un commissaire pour raser Soubise [47].
Fera response sur les 30 muids pour les greniers, du roy. 500 qu’il faut retirer de Chappe.
Retirera du régiment de Brezé les armes des prests et la monstre des soldats due.
Parlera à la Tache pour les deux couleuvrines qu’a prises M. de Toiras.
Licentiera la garnison du fort d’Oleron, y laissant seulement un sergent et dix hommes, après avoir fait les descontes ; et le Plessis de Juigny [48]fera entrer tous les jours une compagnie de son régiment dans ledit fort. La garnison de Soubise sera ostée ; ordonnant aux habitans de faire garde.


CCCXX

Bibl. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, n" 2 et 3, fol. 65. - Minute de la main de Charpentier.

 A M. DE RUFFEC.

17 juillet 1627.
Fait sçavoir au roy comme il s’est voulu jetter en Oleron, qui luy sçait gré de l’affection qu’il tesmoigne avoir à son service.
Que M. de Brezé lui mandera quand il sera temps qu’il y aille. Cependant il n’y a pas d’inconvénient qu’il s’asseure des gentilshommes huguenots qu’il cognoistra avoir bonne volonté de servir Sa Majesté [49].


CCCXXII.

Bibi. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, n" 2 et 3, fol. 65. - Minute de la main de Charpentier.

 A M. DE BREZÉ

17 juillet 1627.
Commencer par la santé du roy [50].
M. de Maillezais m’escrit que ceux de la Rochelle sont après à faire marché avec des marchands devers Maillezais, pour munir leur ville de quantité de bled, ce qu’il peut empescher insensiblement sans tesmoigner que cela vienne de luy, ny par ordre qu’il ayt eu du roy. Vous luy direz que le soubçon qu’il a, qu’ils s’entendent avec les Anglois, fait qu’il fera fort bien de faire exécuter discrètement ce qu’il propose en cela.
On m’a dit qu’on avoit fait quelques propositions en Brouage, d’enfoncer des vaisseaux dans l’entrée du port, pour empescher que les Anglois y pussent entrer. Peut-estre n’est-il pas vray ; mais s’il estoit, il se faudroit bien donner garde de penser à telle chose, veu que les ennemis ne nous pourroient faire jamais un plus grand mal que celuy-là. On a bien pense de mettre trois petits vaisseaux entre les bastions de Brouage, pour empescher que si les Anglois entroient dans le port, ils ne pussent monter sur les courtines avec le beaupré de leurs vaisseaux. Mais il y a bien de la différence de mettre en cet endroit des vaisseaux en cas de nécessité, où on les peut mettre en sorte qu’on les en pourra tirer quand on voudra, ou les enfoncer dans l’emboucheure du port, d’où on ne les retireroit jamais. Quoy que vous faciez, vous ne le ferez que par bon conseil.
Mandez-moy comme tout passe là où vous estes. Je m’asseure que vous n’oublierez pas de faire caresses au bonhomme Rocheallart.
Vous advertirez M. de Ruffec quand il sera temps qu’il aille en Oleron avec ses amis.


CCCXXIII.

Bibl. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, n05 2 et 3, fol. 128. — Minute de la main de Charpentier.

 A M. LE COMMANDEUR.

17 juillet 1627.
Santé du roy....
Cependant vous ferez faire prières pour qu’il plaise à Dieu luy rendre promptement la santé, qui nous est si nécessaire.
Je suis bien aise de la diligence dont on use en la citadelle 3. Vous m’obligerez d’y faire travailler le plus de maçons qu’il se pourra, afin que cet esté non seulement soit-elle parachevée de terre, mais, qui plus est, bien avancée quant au revestement.
Votre Excellence sçaura, s’il luy plaist, que je soubmetz toutes les pensées à vos volontez. Il est vray que le chevalier de Cangé ne m’a sollicité d’aucune chose au préjudice de personne ; vray aussy que je n’ay point pensé que son voyage deust empescher celuy de M. de Razilly. Vous l’aurez cogneu par une deuxiesme dépesche que je vous ay envoyée. J’ai bien pensé qu’on pourroit envoyer Razilly d’un costé, Cangé de l’autre, parce que, s’ils estoient tous ensemble, quoyque plus forts, ils seroient moins en estat de surprendre des vaisseaux, parce qu’on s’en garderoit davantage. Vous pouvez croire que je n’ay pas ignoré, s’ils alloient ensemble, que Razilly sera celuy qui commandera, puisqu’il est chef d’esquadre, et qu’il a la barbe et l’expérience par dessus l’autre.
Quant aux vaisseaux d’Holande, vous aurez sceu, par Larbrisse [51], la volonté du roy, laquelle vous exécuterez, s’il vous plaist, les quatre vaisseaux hollandois pouvans venir plus seurement seuls, pour les raisons que nous vous avons mandées, qu’avec tous les vaisseaux du Havre qui feroient grand bruit et feroient mettre toute l’armée angloise en mer pour les combattre.
Nous croyons que l’armée angloise n’est pas partie et ne sera pas preste si tost à partir [52], parce que leurs biscuits se sont gastez et une autre fois leurs poudres bruslées.
Nous espérons que les Anglois feront plus de bruit que de mal.
Cinq cents chevaux et quatre mil hommes de pied sont arrivez à Niort avec M. d’Angoulesme, quatre mil hommes y arriveront encore dans six jours. Ces quartiers là-bas ne sont plus en estat de recevoir des effets de leur mauvaise volonté.
Puisque vous estimez la Rochéte capable de commander un des dragons, j’en seray fort aise, tant à cause de feu son frère, dont la mémoire me sera tousjours chère, que de luy.
J’aprouve aussy fort l’employ que vous faites du sieur Trévet.
Le chevalier de Mailly emporte le fonds pour les vaisseaux à feu ; je poursuivray celuy qu’il faudra pour les pataches.
Je vous prie haster l’envoy des deux pataches qui doivent porter les gens en Holande pour servir les vaisseaux du roy [53], afin que nous ne perdions pas la saison.
Si l’argent se pouvoit forger, il yroit aussy viste que les lettres ; j’en ay tant emprumpté que je ne sçay plus que faire. Cependant je vous envoyé de quoy faire les descomptes des capitaines, officiers et soldats pour cinq mois de ceste année. Si vous trouvez aucune garnison qui soit payée aprochant de la vostre, je l’iray dire à Rome. Je n’ay pas encore eu une seule assignation pour ceste année, et vous jure en ma foy que si l’affaire du Hâvre estoit à recommancer, je ne la ferois pas. Je vous envoyé de plus deux mil cinq cens escus pour avancer 500# pour chascun des nouveaux dragons, que je vous prie de faire faire, et que le roy veut qui soient faits en janvier. Je vous prie que cet argent soit employé à ce pour quoy je vous l’envoye, et ne soit point diverty. Je ne manqueray pas d’envoyer les autres payemens selon que vous les adjusterez ; mais pour ceste heure je ne puis fournir davantage aux marchands, n’ayant peu trouver d’argent.
Je vous envoye le sieur Pompée Targon [54] pour faire préparer certaines barques, propres à faire grand effet contre nos ennemis ; s’il vous plaist, vous ne parlerez de son dessein à qui que ce soit au monde, et ferez travailler cependant à la construction des petites barques, dont il en fera faire une pour montre. Vous m’envoierez un estat de ce que pourra couster les dits ouvrages.


CCCXXIV.

Bibl. imp. Fonds Le Tellier-Louvois, 93342, fol. 14. — Original.

 A M. L’ÉVESQUE DE MAILLEZAIS.

18 juillet 1627.
Monsieur, Sçachant qu’un homme adverty en vaut deux, quoyque je vous aye escrit ce matin, par vostre gentilhomme, que les Anglois estoient partis le 8e de ce mois, à dessein d’aller descendre en Oleron, et prié de presser la noblesse dont vous vous estes asseuré de s’y rendre


le plus tost qu’elle pourra, je ne laisse de reprendre la plume à la mesme fin. Je me promets qu’elle sera bien ayse de faire paroistre en cette occasion et son courage et l’affection qu’elle a au service du roy ; et qu’en vostre particulier vous y contribuerez tout le soin et la vigilance que l’on peut attendre de vous, pour faire que Sa Majesté en puisse recevoir l’effet qu’elle a lieu d’espérer. En un mot, je vous recommande toutes choses autant qu’il m’est possible, vous conjurant de croire que je suis véritablement, Monsieur, Vostre très affectionné confrère à vous rendre service, Le Card. DE RICHELIEtJ. A Villeroy, ce 18 juillet 1627.

CCCXXV

Arch. de la famille de Razilly ; communiquée par M. Margry. — Original.,.

 A MONSIEUR MONSIEUR DE LAUNAY-RAZILLY ; EN OLERON.

18 juillet 1627.
Monsieur, Je n’ay pas voulu différer à vous donner advis comme le roy a eu nouvelles asseurées que les Anglois sont partis le 8 de ce mois pour venir descendre, à ce qu’ils disoient, en Olleron. C’est à vous maintenant à disposer tellement toutes choses en ce qui deppendra de vous, qu’ils vous trouvent préparés à vous deffendre en sorte qu’ils ne puissent exécuter leur dessein. Pour cet effet, on a donné ordre de vous assister non seulement de bon nombre de noblesse, mais aussy de ce qu’il y aura de bon de la milice du pays de Brouage, en cas que vous manquiez de soldats. Cependant il sera à propos, pour vous fortifier et lever tout ce qui vous pourroit causer du soubçon, d’armer les catholiques d’Oleron et désarmer les huguenots1, si l’occasion le requiert, selon que j’en escris à M. de Brezé. Si l’armée angloise vient vous attaquer, il sera nécessaire que vous voyiez avec des vaisseaux à feu à faire tout ce qu’il vous sera possible pour l’endommager. Je suis, Monsieur, Vostre bien affectionné à vous servir, Le Card. DE RICHELIEU.
De Villeroy, ce XVIII juillet 1627.


CCCXXXI.

Bibi. imp. Fonds Le Tellier-Louvois, 9334 fol. 11. — Original.

 A M. L’ÉVESQUE DE MAILLEZAIS.

25 juillet 1627.
Monsieur, Cognoissant de plus en plus, par vos lettres, le soin que vous avez pour ce qui concerne le Brouage et Oleron, je ne puis que je ne vous en remercie de nouveau par celle-cy, et vous conjure de ne laisser en arrière aucune chose de ce que vous jugerez nécessaire en ceste occasion. Surtout je vous prie, autant qu’il m’est possible, de faire en sorte que les vivres ne manquent point en Oleron, parce que de là deppend une partie de sa conservation. Je me promets que vous y tiendrez soigneusement la main, comme aussy à y faire entrer la noblesse que vous me mandez estre preste. Cependant, parce que si les Anglois donnoient en quelque autre lieu qu’Oleron, je ne doubte point que la noblesse n’en voulust sortir pour aller où l’occasion les convieroit, il est important de faire qu’outre les compagnies de la reyne et de M. de la Fosse il y demeure deux cens maistres, afin de la deffendre au cas que les ennemis la vinssent attaquer. Je suis, Monsieur,
Vostre affectionné confrère à vous rendre service.
Le Card. DE RICHELIEU.

Si Oleron a besoin de vivres, je vous prie d’employer vostre crédit pour en faire fournir. Au reste, la meilleure nouvelle que je vous puisse mander est que les deux derniers accez de la fièvre du roy n’ont esté que de cinq heures, ce qui fait juger à ses médecins qu’il n’en aura plus que deux autres.
De Villeroy, ce 25 juillet 1627.


CCCXXXlI.

Arch. des Affaires étr. France, 1627, tom. 3o, fol. 198. — Minute de la main de Charpentier, avec quelques mots de la main du cardinal [55].

 A M. DE TOIRAS, GOUVERNEUR POUR LE ROY AU PAYS D’AUNIS.

27 juillet 1627.
Monsieur, Je ne puis assez vous tesmoigner la réputation que [56] le courage avec lequel vous vous estes porté en l’occasion dernière [57] a adjoustée à celle que vous avez acquise, ny la part que je prends à la perte que vous avez faite de ce qui vous estoit le plus cher [58]. Seulement vous diray-je que le roy est si jaloux de vostre conservation qu’il n’y a rien qu’il ne hasarde à ceste fin, et qu’en mon particulier je tiendray[ « De tout mon pouvoir, » de la main de Richelieu.]] de tout mon pouvoir la main, qu’il ne vous manque ni vivres, ni chose quelconque dont vous puissiez avoir besoin. On n’oubliera rien de ce qui se pourra [59]. Vous vivrez, s’il vous plaist, en ceste créance, puisque les preuves que vous en recevrez tous les jours vous confirmeront la vérité de mes paroles, et celle avec laquelle je me dis, Monsieur, Vostre très affectionné à vous rendre service.
De Villeroy, ce XXVII juillet 1627.


CCCXXXIII.

Bibl. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, n05 2 et 3, fol. 221. — Minute de la main de Charpentier.

 A M. DE MANTY.

30 juillet 1627.
Monsieur, Vous sçaurez comme les Anglois sont entrés dans Ré, qu’ils sont résolus d’assiéger le fort Saint-Martin, et affamer les gens de guerre qui sont dedans. Cela fait que je vous dépesche par commandement du roy, pour qu’incontinent vous et Monsieur de Rodes [60] vous assembliez avec ceux des capitaines qui sont à Blavet que vous estimerez à propos, pour voir si vous ne sçauriez sans péril évident de vous perdre, faire quelque entreprise pour, y arrivant inopinément, y jetter des vivres par un temps favorable. Monsieur de Toiras mande que les lieux plus propres pour luy faire donner des vivres sont par le fort de la Prée, la citadelle Saint-Martin, ou que du costé de la mer Sauvage [61] on pourroit descendre jusques auprez d’Ars [62] à la faveur de la nuict, et de la cavalerie qu’il a. Le capitaine Richardelle cognoist parfaitement l’isle de Ré.
Je vous envoyé un mémoire que le sieur de Launay Razilly a envoyé sur ce subjet. Vous considérerez ce que vous pourrez faire, soit en gros, estant tous ensemble, soit le sieur de la Richardelle seul emmenant des barques chargées de biscuits, farines et plomb. Vous pourrez par après vous retirer au Morbien, où M. de Thémines se doit rendre promptement pour donner ordre à faire travailler en un lieu nécessaire pour mettre les vaisseaux à couvert [63].
Je vous conjure, par toutes sortes de considérations, de faire en sorte que dans le quinziesme du mois d’aoust vous puissiez faire entrer des vivres dans Ré.
Vous aurez bientost douze vaisseaux, qui partent du Havre pour vous aller trouver à Blavet ou à Morbien.
Les huict vaisseaux de Bordeaux sont aussy armez. On en arme vingt à Olonne. La question est de se joindre promptement, mais, sans attendre cela, voyez tous ensemble ce que vous pouvez faire, et vous asseurez que vous ne sçauriez jamais faire action plus agréable au roy, et plus utile à l’estat, que celle que je vous propose, qui m’obligera en mon particulier à vous faire cognoistre de plus en plus que je suis, etc.


CCCXXXVI.

Arch. de la famille de Razilly ; communiquée par M. Margry. — Original.
Bibl. imp. Fonds Baluze, Pap. des arm. lett. paq. iv, nos 2 et 3, fol. 60. — Minute de la main de Charpentier.

 A MONSIEUR MONSIEUR DE LAUNAY, COMMANDANT AU CHASTEAU D’OLERON.

31 juillet 1627.
Monsieur, J’escrits à M. le marquis de Brezé pour qu’il donne ordre à vous faire fournir quoy que ce soit qui vous puisse estre nécessaire.
Au nom de Dieu, hasardez force matelots pour faire entrer des chaloupes chargées de farines et de biscuits en Ré.
Je vous envoyé 200 pistoles pour qu’en leur donnant de l’argent comptant ils se hasardent plus volontiers. J’ay donné ordre à tout ce que nous pouvons faire de deçà. Faites retirer le plus des bleds que vous pourrez d’Oleron dans vostre bourg et dans le fort, et, tandis que vous avez loisir, faites continuellement moudre vos moulins pour faire des farines.
J’ay donné de l’argent à Goyer pour vous faire fournir de vivres.
Je me promets que nous ne recevrons plus de courriers de vous que nous n’ayons nouvelles que vous ayez fait entrer des chaloupes dans Ré [64].
Je m’asseure que vous en aurez fait bonne provision, et que vous aurez retenu toutes celles qui estoient dans Oleron et lieux voisins.
Je vous prie faire faire des vaisseaux à feu, prenant des barques à qui elles pourront appartenir, que l’on fera payer par après.
C’est, Monsieur, Vostre bien affectionné à vous servir, Le Card. DE RICHELIEU.
De Villeroy, ce 3i juillet 1627.


[1On voit par cette lettre, ainsi que par deux autres du 16 février et du. 3 l mai, que la personne à laquelle ces trois lettres s’adressent devait être employée à la Rochelle, mais rien n’indique quelle fonction elle y pouvait avoir. Il ne nous serait donc pas facile de dire avec une pleine certitude quel est, parmi les membres assez nombreux, de la famille de Navailles, celui qui correspondait avec Richelieu. Il en est deux pourtant sur qui les conjectures peuvent s’arrêter : Blaise de Montault, mestre de camp du régiment de Champagne, qui se trouva à la défaite des Anglais, en l’île de Ré, et mourut, dit le P. Anselme (Histoire généalogique, t VII, p, 606), des incommodités qu’il souffrit au siège de la Rochelle ; et N. de Montault, seigneur de la Roque-Navailles, qui mourut, dit encore le P. Anselme, en l’île de Ré, commandant la cavalerie. Nous croyons que c’est ce dernier à qui Richelieu adresse cette lettre, et qu’il nomme, dans ses Mémoires (liv. XVIII, p. 320), parmi les officiers de marque tués le 22 juillet 1627, lors de la descente des Anglais. Tous deux étaient fils de Bernard de Montault, baron de Benac, qui fut sénéchal de Bigorre, et dont la mère, Madelène d’Andouins, avait apporté dans cette famille la baronnie de Navailles. Ce Bernard avait été marié en 1578 à Tabitha de Gabaston, fille du gouverneur de Navarrens. Un de ses petits-fils, entré dans la maison de Richelieu en qualité de- page, en 1633, devint plus tard maréchal de France. (Voyez, à la date de 1634, une lettre du 30 novembre.)

[2L’appréhension des Rochelais était très-bien fondée ; Richelieu avait formé depuis longtemps le dessein de soumettre la Rochelle, et n’attendait que le moment favorable. Mais plus son dessein était irrévocablement arrêté, plus il jugeait nécessaire de donner à la ville qu’il voulait réduire une profonde sécurité ; et l’on verra bientôt avec quelles instances il écrit encore à M. de Navailles (16 février, 31 mai) et à d’autres sur ce même sujet, lorsque les préparatifs de défense contre la descente des Anglais en Poitou vinrent jeter la Rochelle dans de nouvelles alarmes.

[3S’agit-il de la survivance de la charge de sénéchal de Bigorre qui était dans la famille de Navailles ?

[4C’était un officier de confiance dont Richelieu s’est servi dans diverses circonstances. Il ne tarda pas, sans doute, à arriver à l’île d’Oléron. On verra bientôt deux lettres à lui adressées par Richelieu, le 17 mai et le à juillet, ou différents ordres lui sont donnés. Nous avons trouvé, parmi des papiers provenant des archives de la famille de Brezé, une lettre datée d’Oléron le 14 juillet, que le sieur du Rivau écrivait au marquis de Brezé, gouverneur de Brouage ; il demande diverses choses afin de pourvoir à la sûreté de l’île, « et surtout « affin que les prêtz qui se font aux gens « de guerre ne demeurent pas, d’où le sa« lut des pauvres liabitans dépend absolu« ment. » On sait que, dans ce temps, les soldats dont la paye était en retard vivaient à discrétion chez les gens du peuple. Richelieu donne, à ce sujet, dans la lettre suivante, des ordres prévoyants ; mais, à cinq mois de là, il n’avait pas encore été obéi, ainsi qu’on le voit par la phrase que nous citons de la lettre de du Rivau.

[5Richelieu se trompait : ce fut l’île de Ré que les Anglais attaquèrent, à la vérité sans succès.

[6Cette compagnie ne se distinguait pas par le zèle. (Voy. ci-après une lettre du 4 juillet à M. du Rivau.)

[7Ni date ni suscription ; on lit au dos le nom de Saint-Luc. — Timoléon d’Espinay de Saint-Luc, né en 1580, de François de Saint-Luc, qui avait été ami de Henri III et ensuite de Henri IV. — Timoléon obtint le gouvernement de Brouage, dont son père avait jadis été gratifié par Henri III. On lui donna la lieutenance générale de Guyenne vers la fin de janvier 1627, lorsque Louis XIII conféra ce gouvernement à la reine mère, qui nomma Richelieu, le 4 février, à la capitainerie et au gouvernement de la place et de la forteresse dudit Brouage. Le souvenir de ces circonstances est nécessaire pour l’intelligence de cette lettre. A l’époque où elle fut écrite, Saint-Luc, qui n’avait pas encore remis le gouvernement de Brouage, commandait, en qualité de vice-amiral, la flotte qui devait protéger Ré et Oléron contre l’attaque des Anglais, et ensuite prendre part au siège de la Rochelle. Il fut créé maréchal de France en 1628, et depuis, jusqu’à sa mort, arrivée en 1644, on le voit peu figurer dans les affaires publiques. — Dans les circonstances difficiles que créait la menace d’une attaque prochaine de la part des Anglais, Richelieu voulut avoir la garde du poste important de Brouage ; et, pour l’ôter à Saint-Luc, il en fit donner le titre à la reine mère, qui lui en laissa la charge. (V. ci-dessus une lettre à Guron, du 12 février.) Ajoutons qu’en diverses circonstances Richelieu a marqué que Saint-Luc ne lui inspirait pas une grande confiance. (Voyez Mémoires, liv. X, p. 548, et plusieurs passages de ses lettres.)

[8Voici ce que signifie cette « méprise » : Saint-Luc avait reçu du roi l’ordre de remettre à Guron les places de Brouage et d’Oléron ; une autre dépêche lui ayant porté le commandement de prendre garde à ces deux places menacées par les Anglais récemment partis de Plymouth, Saint-Luc écrivit au cardinal pour avoir l’explication de cette espèce de contradiction. Sa lettre autographe se trouve aux archives des Affaires étrangères, France, 1627, n° 42.

[9Sur le même feuillet, Charpentier avait écrit la minute de la lettre qui suit (à Guron), ainsi que les trois notes qu’on va lire (p. 378) et qui ont dû servir de matières à autant de lettres. Ces minutes ou notes ne sont point datées ; mais la lettre à Guron étant du 17, les autres doivent porter la même date ; le sujet d’ailleurs l’indique suffisamment, et il n’est pas douteux qu’elles n’aient précédé de quelques jours la lettre du 3 mars, où le cardinal dit à Guron : u L’alarme n’est plus si chaude 8 qu’elle a esté il y a huit jours »

[10Henri d’Escoubleau de Sourdis, frère du cardinal, auquel il succéda sur le siège archiépiscopal de Bordeaux, en 1628. Il était, depuis 1623, évêque de Maillezais. Il s’attacha de bonne heure au cardinal de Richelieu, qui, durant plus de vingt ans, l’employa dans les affaires de la marine et le commandement des escadres. Le cardinal lui témoigna longtemps une grande confiance ; il avait adopté pour lui, en lui écrivant, cette formule finale, un peu singulière, et qui annonçait une amitié fort intime : « Votre très-affectionné comme frère. # Richelieu le chargeait même, dans l’occasion, de quelques-unes de ses affaires particulières ; ce qui a fait dire faussement à un des historiens du cardinal (Le Clerc) que ce prélat avait été intendant de Richelieu. Quoi qu’il en soit, l’archevêque de Bordeaux fut disgracié et relégué à Carpentras en 1641, à la suite du mauvais succès de l’affaire de Tarragone. Il ne sortit de son exil qu’après la mort du cardinal, et pour mourir bientôt lui-même (1645).
Si l’amitié qu’avait pour lui Richelieu faisait illusion à celui-ci sur la capacité militaire de l’archevêque de Bordeaux, elle ne l’aveuglait pas sur l’humeur difficile de ce prélat ; il la lui reproche plus d’une fois assez vertement. — On aura occasion plus tard de rappeler la conduite turbulente de l’archevêque de Bordeaux et ses querelles violentes avec le duc d’Épernon, lieutenant général au gouvernement de Guyenne.

[11Le cardinal comptait peu sur le duc d’Épernon, à qui le souvenir de son ancienne faveur et la jalousie de la faveur de Richelieu firent jouer le rôle de mécontent durant presque tout le règne de Louis XIII.
La charge de la mer, qu’avait récemment obtenue le cardinal, augmentait encore la mauvaise humeur de d’Epernon. Il y a aux Archives des affaires étrangères (France, x 6 2 7, t. XLII, f° 4o verso) une lettre de lui, non datée, mais qu’on a classée en février, par laquelle il demande qu’on conserve à ceux de Bordeaux le droit d’élire leurs jurats. Je ne sais si, dans cette proteclion que d’Epernon accorde à l’une des franchises de Bordeaux, il n’y a pas quelque secrète intention de contrarier Richelieu.
Au moins voyons-nous qu’alors les agen du cardinal, en Guyenne, accusaient 1 jurats d’usurpation sur la juridiction < l’amirauté. (Lett. du sieur La Lanne. Arc des aff. étr. t. XLIII, f" 2 5. )

[12A défaut d’autres circonstances, ceci déterminerait l’année où cette lettre fut écrite. La digue de la Rochelle, commencée en décembre 1626, ne fut achevée qu’en mai 1627.

[13Ce sieur Chemin était alors employé aux affaires de la marine et à la défense des côtes des environs de la Rochelle. ( Voy. ci-après, lettres du 6 mars et du 20 juin.)

[14On appelait Maransin le territoire marécageux qui environne la petite ville de Marans.

[15Quatre mois s’étaient à peine écoulés que cette bonne opinion du cardinal sur Toiras s’était singulièrement modifiée. On le voit, à la date du mois de juillet, se plaindre vivement de son imprévoyance et de son manque de zèle dans les préparatifs de la défense de l’île de Ré. On peut lire à ce sujet les Mém. du cardinal, liv. XVIII, p. 323. — On a accusé Richelieu d’avoir poursuivi Toiras d’une injuste antipathie : on voit pourtant ici qu’il ne semble animé contre lui d’aucune prévention ; et, puisqu’il le loue aujourd’hui sans restriction, il est vraisemblable que les reproches qu’il lui adressera bientôt seront jusqu’à un certain point mérités ; à moins que, dans l’intervalle, quelque tort particulier de Toiras envers le cardinal n’ait excité la passion de celui-ci, ce que nous ne savons pas ; au reste, ce que nous savons, c’est que le caractère noble et ferme de Toiras dédaignait cette souplesse sans laquelle il n’était pas facile de plaire à Richelieu.

[16Il y a dans la minute : « . Donnée gratis, avec un prest. »

[17La paulette était un droit annuel que payaient les personnes revêtues de charges judiciaires, et qui était la condition de l’hérédité de ces charges. Cet impôt avait été établi pour neuf ans par Henri IV, en i6o5. Les états généraux de 1614, année où il devait finir, en demandèrent en vain l’abolition ; la paulette ne fut supprimée que par un édit du 15 janvier 1618, en suite de l’avis de l’assemblée des notables tenue à Rouen en 1617 ; mais l’édit de suppression fut révoqué, et la paulette fut rétablie trois ans après. On voit qu’en 1627 il était question d’appliquer cet impôt aux offices de la poste.

[18Dans la minute, il y a "que donne Launay. »

[19L’un de ces frères, Rostinclair, fut tué le 22 juillet suivant, dans un combat contre les Anglais.

[20« Munitionnaire, passionné pour Toiras, homme entendu en la connoissance de toutes les côtes proches des îles de Ré « et [d’Oleron (Nous substituons ce nom à celui « d’Olonne," que les Mémoires de Richelieu imprimés ont donné après les Mémoires manuscrits, où ce mot est évidemment une faute de copiste.)], homme de crédit parmi tous les matelots de ces quartiers-là. » (Mém.de Richelieu, liv. XVIII, 326.) Dans plusieurs des lettres suivantes, Richelieu se plaint du mauvais service de Bigoteau, notamment dans une dépêche adressée le 12 novembre à l’évêque de Maillezais, où il dit que Bigoteau est sur le point d’être cassé.

[21Ce n’était là qu’une précaution diplomatique ; le dessein de réduire la Rochelle par la force était alors parfaitement arrêté dans la pensée du cardinal, ainsi que nous l’avons déjà remarqué.

[22Ces avis étaient prématurés ; ce fut trois mois plus tard, le 21 juillet, qu’eut lieu le débarquement des Anglais à l’île de Ré. Toutefois, une flotte anglaise s’était montrée au Conquet vers la fin de mai.
Le sieur de La Landelle donne, à ce sujet, des détails dans une lettre du 22 dudit mois, laquelle se trouve aux Archives des affaires étrangères. (France, tom. XLII, f 41.) — On voit que « Porsemus » est Portsmouth

[23On le nommait aussi Richardière.

[24Les îles Sorlingues et d’Ouessant.

[25C’est le nom suisse Zurlauben, francisé.

[26Le manuscrit des Aflaires étrangères, France, XLII, fa 117 verso, fait mention d’une lettre de Guron au cardinal, du 16mai, relative à l’état de Brouage et d’Olèron ; mais la lettre, ainsi que celles de plusieurs autres officiers, écrites vers cette époque, ne se trouve pas dans le manuscrit.

[27Cet original est devenu minute, le cardinal ayant ajouté quelques mots et biffé sa signature.

[28« Commission de prattiquer, » de la main de Richelieu.

[29« Je vous prie les en asseurer, comme aussy, » de la main de Richelieu.

[30« Leur avantage, » de la main de Richelieu.

[31Henri II, duc de Montmorency, né en 1595, était fils de Henri Ier, connétable.
C’était un des seigneurs de France les plus accomplis et les plus aimés du peuple. Il avait été fait amiral lorsqu’il n’avait encore que dix-sept ans et devait bientôt être créé maréchal, après le brillant combat de Veillane. Il était cousin germain de Boulteville. Qui ne se sent ému à la lecture de cette lettre de condoléance, en songeant que, cinq ans plus tard, Richelieu devait écrire d’autres lettres de condoléance aux parents de ce même Montmorency, dont la tête aussi était destinée à tomber sur un échafaud !—Au reste, l’exécution de Boutteville et de son cousin Des Chapelles, s’il faut en croire le cardinal de Richelieu, fut pour lui le sujet de considérations qui le tinrent longtemps en suspens. « Jamais, dit-il, mon esprit ne fut plus combattu qu’en cette occasion. » On peut lire ce qu’il a écrit à ce sujet, dans son Testament politique, 1" part. chap. xi ; et, dans ses Mémoires, liv. XVIII, p. 295 et suiv. Dans l’avis qu’il donna au roi, et qu’il nous a conservé, il expose avec une apparente impartialité les raisons de faire grâce et celles de punir ; mais on voit que, dans cette balance , le plateau de la sévérité est toujours prêt à l’emporter sur l’autre. « Il est question, dit-il au roi, de couper la gorge aux « duels ou aux édits de Votre Majesté. »
Qui ne comprend qu’une pareille phrase rendait, auprès de Louis XIII, tout autre argument superflu ? — Le duc de Montmorency avait écrit au roi, dès le 19 mai, pour implorer sa clémence en faveur de Boutteville ; mention de cette lettre est faite dans le manuscrit des Aff. étr. France, t. XLII, fol. 117 verso ; mais la lettre, non plus que d’autres écrites par diverses personnes pour obtenir la grâce des coupables , ne se trouve plus dans le manuscrit. Il en reste une de M. de Molac, frère de Des Chapelles, qui ne manque pas d’intérêt (f 158).

[32Henri d’Escoubleau de Sourdis. (Voy. ci-dessus)

[33Ces deux derniers mots nous sont donnés par la minute ; une déchirure les rend illisibles dans l’original.

[34Le nom de la Rocheallart se trouve au dos avec celui de Launay, et avec la date.
 : C’était un officier fort employé par Richelieu dans cette campagne. On lui avait consigné la place de Brouage en l’absence de M. de Pontchasteau. (Voy. Lett. du 26 mars, à Guron, et, ci-après, mémoire du 12 novembre. )

[35M. de Saint-Luc avait quitté récemment le gouvernement de Brouage. (Lett du 25 février.)

[36C’était, à ce qu’il paraît, un munitionnaire. (Voy. Mém. du card. de Rich. liv. XVIII, p. 327.)

[37A 24 kilomètres de Paris, dans la Brie ; aujourd’hui département de Seine-et-Marne.

[38Le choix du duc d’Angoulême fut l’objet de vives réclamations de la part des maréchaux de Schomberg et de Bassompierre. Celui-ci raconte cette querelle fort en détail dans ses Mémoires, III, p. 87 et suiv.

[39Ils y vinrent pourtant. Le duc d’Angoulême n’était pas encore arrivé en Poitou que la flotte anglaise était sortie des ports d’Angleterre. Le duc de Buckingham, qui commandait l’expédition, publia son manifeste, daté de son bord, le 21 juillet, et le lendemain les Anglais débarquèrent dans l’île de Ré.

[40On lit au dos, et de la main de l’évêque de Maillezais, « Mémoire de M. le cardinal de Richelieu ; » point de suscription, mais la première ligne nomme celui auquel le mémoire est adressé. En tête, il n’y a pour toute date que 1627, mais il est probable que cette commission fut donnée à l’évêque de Maillezais lorsque le roi se disposait à partir pour la Rochelle, vers le milieu de juillet

[41Ce nom de Plessis étant commun à plusieurs familles, Richelieu désigne comme on voit celui-ci qui était attaché au duc d’Epernon. (Voy. ci-dessus, p. 436.

[42Le corselet était une petite cuirasse que portaient les piquiers. (Furetière.)

[43Plaque creuse de fer, à guise d’escaille ou coquille. Tassettes de corselet, dès la ceinture en bas pour couvrir le ventre. Il (Dict. de Monet. 1636.)

[44Le pannache ou bourguignote sur le chanfrain. Il (Dict. de Nicot, édit. de 1628.) Mais, malgré cette autorité contemporaine, ce mot doit signifier ici une sorte de casque ou bonnet dont se servaient spécialement les piquiers. (Voy. Furetière et Trévoux.)

[45Desouches est nommé plusieurs fois par le cardinal parmi ceux qui, dans ces tempslà (1626-1628), donnaient de mauvais conseils à Monsieur. (Mém. de Rich. liv. XVII, p. 56, et liv. XIX, p. 181, éd. Petitot.)

[46« Espèce de hoyau plat en forme de pelle. Il (Dict. de Furetière.) - a Pales, espèces d’avirons. » (Dict. de marine de M. Jal.)

[47La demeure seigneuriale du duc de Soubise, sur la Charente, non loin de Marennes. On sait que Soubise et son frère aîné, le duc de Rohan, étaient alors en pleine révolte contre le roi, et qu’ils étaient alliés avec les Anglais, ennemis déclarés de la France ; Soubise, en particulier, s’empara de vaisseaux français.
Richelieu avait chargé, depuis quelques mois, plusieurs personnes de confiance de surveiller les menées de cette famille. Nous trouvons, dans nos manuscrits, diverses lettres de M. de Saint-Gery, envoyé en
Languedoc et spécialement à Nîmes ; il écrit au cardinal une lettre du 10 juillet à laquelle était jointe la. liste des princes et seigneurs qui embrassaient ouvertement, ou en secret, le parti du duc de Rohan.
Un sieur -de Roques écrit aussi de Lyon, le 29. juin, pour annoncer le passage par cette ville du train de la duchesse de Rohan , qui se rend à Grenoble et de là en Piémont, peut-être à Venise. (Arch. des Aff. étr. France,, 1627, t. XLII, ro 174, 187 et passim.)

[48Il se nommait : « Le Plessis de Juigné. » Nous voyons à tout moment combien était variable alors l’orthographe des noms propres.

[49On voit qu’une partie de la noblesse protestante ne resta pas étrangère à l’émotion patriotique que soulevait alors, parmi les populations de l’ouest de la France, l’annonce d’une expédition des Anglais.
Nous avons trouvé à cette même époque plusieurs autres offres de secours faites par des gentilshommes qui avaient du crédit dans leurs provinces.

[50Ici est la répétition de ce que le cardinal écrit le même jour sur ce sujet à l’évêque de Maillezais. — A l’époque ou cette lettre fut écrite, M. de Brézé servait dans l’armée qui défendait les cotes de France contre les Anglais.

[51Larbrisses, ainsi que Manuel, fut envoyé en Hollande chargé de conduire six cents hommes pour mettre sur les vaisseaux du roi, qui y étaient alors, sous le commandement de des Gouttes.

[52Dès le soir même, le cardinal, mieux informé, savait le contraire. (P. S. de la lettre écrite aussi le 17 juillet à l’évêque de Maillezais.) Les Anglais parurent, en effet, sur les côtes de Poitou le 21 et firent.le 22, leur débarquement en Ré.

[53Sans doute les six cents hommes qui furent conduits en Hollande, par Manuel et Larbrisses.

[54Pompeo Targone était un ingénieur italien qui avait déjà été employé en France, en 1622, devant la Rochelle. Peu de jours après avoir écrit ceci (le ier août) , le cardinal proposa au conseil du roi de le faire venir pour contribuer aux travaux- de la défense de l’île de Ré. Bientôt il voulut le faire travailler à la fameuse digue au moyen de laquelle on imagina de fermer le port de la Rochelle ; mais l’ingénieur italien ne put venir à bout d’exécuter ce dessein.

[55Cette lettre avait été préparée pour la signature ; des changements ayant été faits, elle est restée comme minute.

[56« Le courage avec lequel vous vous « estes porté en, » de la main de Richelieu.

[57Il s’agit du combat livré le 2 juillet pour repousser les Anglais descendus dans l’île de Ré ; combat malheureux ou périrent grand nombre d’officiers et de gentilshommes venus à la défense de l’île. Parmi les morts étaient un frère de Toiras et le baron de Chantal, père de madame de Sévigné, et fils de la célèbre dame de Chantal, amie de saint François de Sales et fondatrice de la Visitation.

[58Le frère de Toiras qui fut tué dans ce combat se nommait Restinciers. Toiras perdit encore un autre de ses frères deux mois après. Un troisième frère, évêque de Nîmes, était aussi employé par Richelieu à la défense de Ré. Il écrivait au cardinal le 1er octobre : 1 J’accompagne M. de Mandes à visiter le reste de ceste coste, avec le marquis de Grimaut et le s1 de Manty, pour assembler les barques et les raffraichissemens. » Dans cette même lettre, M. de Nîmes demande, pour sa famille, la conservation des charges de ses deux frères défunts. (Arch. des Affaires étrangères, France, 1627, tome XLIII, f3 244.)

[59Cette petite phrase est ajoutée de la main de Richelieu.

[60Le commandeur de Rodes, qui mourut en 1637, étant chef de l’escadre de Normandie. — Deux jours avant la date de cette lettre, lui-même écrivait à Richelieu (« du Port-Loys, ce 28 juillet Il) pour lui exposer l’avis unanime des capitaines réunis à Blavet et pour lui faire connaître l’état de dénûment où étaient les vaisseaux. « M. de Manty est très mal armé de canon, dit-il ; il a trop peu de monde ; nous n’avons ny pouldre, balles, mesches, ny mousquets ; il y a un an que nous le crions. » (Arch. des Aff. étr. France, 1627,1. XLII, fo 228.)

[61On nomme ainsi la portion de mer qui baigne le rivage occidental de l’île de Ré.

[62Ars-en-Ré, bourg au nord-ouest de l’île, aujourd’hui chef-lieu de canton.

[63Le 14 et le 18 d’août le maréchal de Thémines écrit, en effet, au cardinal, pour l’informer des travaux qu’il fait en Morbihan, afin que les vaisseaux du roi y soient en sûreté, et au sujet « d’un réduit qu’il prépare à Auray. » (Coll. des Aff. Étrang. t. XLIII, fo. 21 et 62.)

[64A vingt-cinq jours de là, Ré manquait encore de vivres, et Richelieu publiait (le 24 août) une « promesse de dix mille escus à qui rendroit le premier cinquante tonneaux de farine ou biscuit à l’isle de Ré. » Voy. ci-après ; et le28 août, Toiras en écrivant à Beaumont, « Les ennemis n’auront jamais cette place par force, » laissait entendre qu’on pourrait la prendre par famine ; et il indiquait divers moyens de lui faire passer des vivres. (Arch. des Aff. étr. France, 1627, t. XLIII, P 98.)

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