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1813 - La pêche dans la Charente et en rade d’Aix

mardi 22 janvier 2008, par Pierre, 2986 visites.

Dans les filets des pêcheurs de cette époque, des variétés de poissons aujourd’hui presque toutes disparues de ces eaux, y compris quelques vaisseaux anglais beaucoup moins comestibles !

Mémoire sur les pêches dans la Charente et sur les côtes qui bordent la rade de l’Ile d’Aix,
fait pour servir à la continuation de l’histoire de Rochefort

lu à la Société de Littérature, Sciences et Arts de cette ville, le 23 avril 1813.

Source : Mémoires pour servir à l’histoire de la ville et du port de Rochefort - Pierre-Philippe-Urbain Thoinar - Rochefort - 1828 - Books Google

La pêche doit être considérée comme une des plus importantes productions d’un pays maritime ; elle est une des plus grandes ressources pour les pauvres, auxquels elle procure des moyens faciles de travail et de gain, une nourriture aussi saine et abondante que variée et peu coûteuse.

Rochefort est heureusement placé pour jouir des produits de la pêche maritime et de celle de la rivière. Nous distinguerons chaque espèce, et nous en ajouterons une troisième, qui participe des deux autres, celle qui a lieu à l’entrée de la Charente.

La pêche maritime ne se fait point à Rochefort. Deux petites bourgades, situées à l’embouchure de la rivière, le Port-des-Barques à gauche, Fourras à droite, s’y livrent avec avantage dans la rade de l’île d’Aix. En temps de paix, leurs barques vont au large, depuis la rade des Basques jusques en dehors de la tour de Chassiron ; mais dans les circonstances de guerre, elles se bornent à naviguer entre les terres. Cette pêche se divise en trois classes : la pêche au traversier, qui se fait avec des bateaux de vingt-huit à trente tonneaux , et des filets de cinquante pieds de long sur vingt-sept de large ; celle de la courtine, qui se fait avec des filets que l’on va tendre à mer basse, par le moyen d’un pousse-pied ou acon, petit bateau composé de cinq planches, et qu’un homme à genoux dedans, pousse avec le pied qu’il tient en dehors, et le fait ainsi glisser sur la vase. Les produits de ces pêches sont, les soles, les taqueaux, les porteaux, les merlues, les grondins, les turbots, les barbues, les plies, les mulets, les barbarins, les loubines, les loches, les chiens de mer ou touils, les rayes, les terres, les perlons, les congres, les vésugnes, les anguilles, les aubussons, les chevrettes, les trembles, les alouzeaux ou goujons. La troisième classe des pêches maritimes est celle de coquillages, qui restent attachés aux roches, que la mer basse laisse découvertes, et que l’on va chercher alors ; ce sont des moules, des huîtres, des lavagnons, des palourdes, des brenicles, des cancres, des badugauds, des sourdons, des guignettes ou burgauds, des jambles, des pétoncles, des couteliers et des culs-de-mulet. Les huîtres sont de plusieurs sortes, celles de banche, qui s’attachent aux rochers, ce sont les moins bonnes ; celles de drague, qui croissent au fond de la mer, et ne sont jamais à découvert, elles sont plus grosses, plus pleines et meilleures ; on ne peut les pêcher qu’à la drague. Enfin, les huîtres vertes, qui sont des huîtres de drague, que l’on a tenues dans des claires ou réservoirs établis auprès des marais salans, et dans lesquels la mer entre à chaque marée. Elles se nourrissent et croissent dans ces réservoirs, mais ne s’y multiplient point, quoiqu’elles y répandent leur frai. Leur chair y prend une teinte verdâtre qu’elle communique légèrement à l’écaille. Mais si l’on peut les citer dans cet article, ce ne peut être que pour la portion qui entre dans le commerce de consommation de Rochefort. Les claires sont établies presque toutes sur les bords de la Seudre. Ce sont les pêcheurs de Marennes et de la Tremblade qui se livrent à ces soins ; aussi, connait-on indifféremment ce coquillage sous le nom d’huîtres vertes et d’huîtres de Marennes.

La seconde espèce de pêche est celle de l’intérieur de la rivière, on n’y prend que des poissons d’eau douce. Jusques à la révolution, la pêche n’a été permise, dans la Charente, qu’à une communauté de neuf pêcheurs, établis à Saintes, par lettres du Roi ; ils se faisaient recevoir à la maîtrise des eaux et forêts de Rochefort, conformément à l’ordonnance de 1669. M. le Prince de Pons, M. le Prince de Talmont, M. le duc de Mortemar, prétendirent avoir droit de pêche dans une assez grande étendue de la rivière, à cause de leurs châteaux de Pons, de Taillebourg et de Tonnay-Charente. Quelques autres seigneurs riverains prétendaient aussi avoir ce droit, également à cause de leurs possessions. La révolution, supprimant tous les privilèges, anéantit toutes ces prétentions, et chaque riverain s’arrogea la faculté de pêcher. La loi du 3 avril 1802, rétablit l’ordre dans cette partie : à compter du 21 septembre suivant, la pêche fut mise en ferme, et assujettie à des règles prises dans l’ancienne ordonnance des eaux et forêts de 1669, auxquelles la nouvelle loi ajouta : « L’usage des seuls filets à grandes mailles est permis : tout filet à petites mailles et les éperviers sont défendus. » Huit pêcheurs seulement se livrent à cette pêche qui, autrefois, produisait quelques individus pour les classes des gens de mer, mais qui n’en donne plus à présent, ce quartier surtout ne fournissant plus à la conscription maritime. La pêche se fait au moyen de petits bateaux plats d’un à deux tonneaux, semblables à tous ceux que l’on emploie sur les rivières. Les poissons que l’on pèche dans la Charente sont la truite, la carpe, le rougeau, la tanche, la chabenne, l’alôse, la lamproie, le goujon, la perche, la brence, le brochet, l’aiguille, l’aubourne, le barbeau ; on y trouve des truites saumonées, et quelquefois des gattes, des mulets, des plies qui remontent de l’eau salée dans l’eau douce.

On recueille, vers Saint-Savinien, une espèce de moules nommées, dans le pays, patagaux ; on ne les mange point, le poisson, en est âcre, d’une couleur désagréable et d’une odeur nauséabonde ; leur coquille, longue de deux à trois pouces, est épaisse, d’une couleur noirâtre à l’extérieur, mais garnie intérieurement d’une belle nacre, couleur gorge de pigeon ; on y a trouvé des perles assez grosses, et quelquefois passablement belles, quoi que, pour l’ordinaire, elles eussent une tache rousse qui les déparait. Nous lisons dans un mémoire de M. de Beauharnais, Intendant de la marine à Rochefort, sous la date du 27 avril 1723 : « J’eus ordre de Monseigneur le Duc d’Orléans, il y a six ans, d’en faire pêcher, et j’eus l’honneur de lui envoyer une petite perle d’une assez belle eau et d’une figure ovale. »

Soit qu’on ait donné peu de suite à des recherches qui ne pouvaient présenter un bénéfice assez lucratif, et n’intéressaient que des curieux, soit qu’en effet il ne se trouve plus de perles dans ces coquillages, les vieillards du pays n’ont à présent qu’une tradition éloignée de ce fait, qu’on serait porté à révoquer en doute, s’il était permis de ne pas ajouter une entière confiance au compte rendu par M. de Beauharnais, dans un mémoire de réponse à des questions qui lui avaient été adressées par la Cour.

La troisième espèce de pêche, avons nous dit, participe des deux autres ; elle a lieu à l’entrée de la rivière ; elle produit les poissons qui fréquentent également les eaux douces et les eaux salées ; elle se fait au moyen de filets avec lesquels on barre certains espaces de la rivière par lesquels le poisson doit passer. On y emploie aussi des bateaux de douze à vingt-cinq tonneaux, pointus par les bouts, mâtés au milieu et portant voile.

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