Histoire Passion - Saintonge Aunis Angoumois

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1611 - Humfrey Bradley se plaint auprès du Roi Louis XIII, qui lui répond

Majesté, pourriez-vous modifier quelques articles des Édits sur le dessèchement des marais ?

jeudi 18 octobre 2018, par Pierre, 207 visites.

La mise en oeuvre du grand projet de dessèchement des marais se heurte à une foule de problèmes pratiques, et à de nombreuses oppositions. Humphrey Bradley demande au Roi Louis XIII (10 ans 1/2), récemment installé sur le trône, après l’assassinat de son père Henri IV, de statuer sur 8 sujets qui sont autant de freins à l’avancement du projet. Le Roi lui répond sous la forme d’un Arrêt et Règlement publié par le Conseil d’Etat.
Les questions d’Humphrey Bradley sont en colonne de gauche, les réponses du Roi en colonne de droite.

Une affaire à suivre sur Histoire Passion, avec d’autres textes réglementaires et des informations spécifiques aux marais de Saintonge et d’Aunis.

Source : Code des desséchemens ou recueil des règlemens rendus sur cette matière depuis le règne d’Henri IV jusqu’à nos jours - Poterlet jeune - Paris - 1817 - BNF Gallica

ARREST ET REGLEMENT
Fait par le Roy en son Conseil, sur le desseichement des marais de France.
Du 22 octobre 1611.

Au roy, et a nosseigneurs de son Conseil.

Louis, enfant roi en costume de deuil, 1611 par Frans Pourbus le Jeune

SIRE,

Humfroy Bradleij, maistre des digues de France, et ses associez pour l’entreprise du desseichement des marais de vostre Royaume, Vous remonstrent très-humblement, qu’il auroit pleu à Votre Majesté, par son Édict en forme de déclaration, du mois de janvier 1607, leur concéder et accorder plusieurs privilèges en faveur de ladite entreprise : et par iceluy déclaré ses intentions et volonté, sur les difficultez proposées pouvoir naistre en l’exécution dudit dessein ; mais comme il estoit mal aisé les prévoir toutes pour les décider par ledit Edit, Vostre Majesté auroit renvoyé lesdits associez à se pourvoir pardevers messieurs les commissaires, par Elle députez sur le fait dudit desseichement, pour leur estre fait droit sur les obstacles qui s’y pouvoient rencontrer : c’est pourquoy lesdits supplians, pour estre résolus de difficultez qu’ils ont trouvées et non prévues, recourent à Vostre Majesté, à ce qu’il lui plaise leur pourvoir, et singulièrement sur les articles qui ensuivent :

I. Que plusieurs villes et communautez estant retenuës de traiter avec les supplians, de leurs marais et terres inondées, crainte qu’après le desseichement quelques autres n’obtiennent de Vostre Majesté la part qu’ils se seroient réservée, sous couleur que la disposition des terres vaines et vagues Vous appartient, ou sous qnelqu’autre prétexte ; ce qui les priveroit non-seulement de la commodité qu’ils en espèrent, mais aussi de celle dont ils jouyssent à présent ; Votre Majesté est très-humblement suppliée ordonner que toutes les parts et portions desdits marais et terres inondées, dont icelles villes et communautez jouyssent à présent, et qui leur sont demeurées et demeureront par les contracts faits avec lesdits supplians, ne leur pourront estre ostées, ains en jouyront pleinement et paisiblement sans pouvoir estre troublez ny inquiétez, sous couleur desdites donations, ou autre prétexte ; en payant toutesfois par lesdites communautez, ou les supplians, s’ils en sont chargez par les contracts, les droits et redevances que le total desdits marais et terres inondées devront à Sadite Majesté, ou autres à qui ils seront deubs. Sa Majesté ordonne que les parts et portions des marais et terres inondées que les villes et communautez se sont réservées, et se réserveront cy-après par les contracts ja faits ou à faire, avec lesdits associez, dont elles jouissent à présent, et ont jouy paisiblement depuis cinquante ans, leur demeureront en pleine propriété, sans qu’ils puissent y estre troublez ny inquiétez, sous prétexte des dons que l’on en pourroit obtenir, ou auroient esté obtenus de Sa Majesté, On continuant de payer à Sadite Majesté, ou autre à qui il seroit deu, pareilles redevances et devoirs qu’ils faisoient auparavant ledit dessèchement d’iceux marais.
II. Qu’encores que par le quatriesme article dudit Edict, il soit ordonné aux propriétaires et autres prétendans droit ès moindres parts et portions des marais par les suppliants entrepris de desseicher du consentement des seigneurs et propriétaires des plus grandes parts, de suivre et observer les conditions des autres voisins , ou de laisser leurs marais pour leur juste valeur, selon l’estimation qui en seroit faite par les juges ou commissaires à ce députez, et que cette Déclaration et Ordonnance se puisse entendre pour toutes sortes de personnes indifféremment, tant pour biens appartenons à Vostre Majesté, mineurs, qu’autres qui seront en saisies et criées. ou autrement contestez ; ils supplient trés-humblement Vôtre Majesté déclarer et ordonner qu’îls pourront travailler esdits mariais et terres inondées, appartenans à Vôtre Majesté, ou ausdits mineurs, ou estans litigieux, par saisie, criées ou autres controverses, aux mesmes charges, clauses et conditions que pour les autres dont ils auroient contracté, ou bien en payant ou consignant la juste valeur suivant l’estimation qui en sera faite par les juges des lieux ou commissaires, comme il est porté par ledit quatriesme article. Pourront Iesdits associez, en travaillant au desseïchement desdits marais et terres inondées, pour lesquelles ils auroient ja contracté, desseicher et disposer des marais contigus, pourveu qu’ils soient en moindre quantité que celle desdits marais, en terres, dont ils auroient ja contracté, soit qu’ils appartiennent à ;Sa Majesté, aux mineurs, ou autres qui n’ont pouvoir ny liberté de contracter, comme aussi de ceux qui sont litigieux, ou qui sont saisis ou mis en criées. Lesquels par le desseichement pour lequel ils auront ja contracté, recevroient commodité ou descharge des eaux qui les rendroient inutiles, ou moins commodes ou profitables ; et ce aux mesmes charges, clauses et conditions que les autres marais, pour lesquels ils auroient contracté en la mesïne continance, ou en payant leur juste prix et valeur, suivant l’estimation qui en sera faite, comme il est porté par le quatriesme article de ladite déclaration, sur lequel prix les créanciers et prétendans droit seront colloquez, ainsi qu’il est ordonné par les vingt-deux et vingt-troisiesme articles de ladite déclaration.
III. Qu’il plaise à Sa Majesté ordonner que les propriétaires ou possesseurs des héritages et terres voisines, qui se ressentiront dudit desseichement et en amenderont ; seront tenus contribuer aux frais qu’il conviendra faire pour l’entretennement desdites chaussées et levées, selon l’amélioration et commodité que ledit desseichement leur aura apporté ; ce qui sera arbitré par les commissaires. Sa Majesté entend que ceux qui se ressenteront du bénéfice et commodité dudit desseichement, contribuent au prorata du bien et amendement qu’ils en recevront ; ce qui : sera jugé et liquidé par lesdits commissaires ou juges des lieux, ausquels en est attribuée la connoissance.
IV. Comme par le septiesme article dudit Edict, que le retrait lignager féodal n’auroit point de lieu pour les acquisitions desdits marais qui se feront par lesdits associez : qu’il plaise aussi à Vostre Majesté ordonner qu’ayant contracté avec qui que ce soit, et après leurs ouvrages faits ou commencez, quelqu’aulre prétendant la propriété, usage, ou autres droits esdits marais, évinceroient ceux avec lesquels ils auroient contracté ; les évicteurs seront tenus à l’observation des clauses et conditions du contract fait avec celuy qui auroit esté évincé, sans pouvoir prétendre aucune chose de nouveau contre lesdits supplians. Sadite Majesté ordonne, que si après le desseichement fait ou commencé à faire, de quelques marais et terres inondées, dont lesdits associez auroient contracté, soit avec elle, les ecclesiastiques, communautez ou particuliers, qui auroient, ou leurs autheurs, jouy paisiblement dix années précédentes, quelqu’autre réclame la propriété, usage ou autre droit esdits marais et terres inondées, et les évincent, que les marchez et conditions convenues et stipulées, tiendront, ou seront observées par les évicteurs, sans y pouvoir prétendre aucune chose de nouveau contre lesdits associez.
V. Et comme par le seiziesme article de ladite déclaration , il leur a esté permis d’establir des péages sur les canaux qu’ils feront navigables par les marais qu’ils desseicheront, ou au long d’iceux, et qu’à ce mot de péage plusieurs s’aheurtent : mesme les Cours de Parlement ont fait difficulté de le vérifier ; ils requièrent, qu’au lieu desdits péages, il leur soit loisible d’entreprendre seuls les navigations sur lesdits canaux, pour y faire porter tout ce qui se présentera, avec pouvoir de bailler ce droit à ferme, à telles personnes qu’ils adviseront, ou autrement en disposer comme de chose propre, sur les terres par eux acquises tant seulement, ainsi qu’il s’observe en Flandres, nommément sur les canaux qui vont de Bruxelles à Anvers, de Gand au Sas, de Bruges à l’Escluse, et autres lieux. Ordonne pareillement Sadite Majesté, qu’au lieu des péages que lesdits supplians peuvent prendre sur les canaux navigables qu’ils ont ja faits, ou pourront faire cy-après, en conséquence des Edicts et déclarations qui leur ont esté accordez, ils pourront seuls entreprendre de faire porter dessus lesdits canaux tout ce qui se présentera volontairement de gré à gré, avec les propriétaires desdites marchandises, desquels droits ils pourront disposer, comme de choses à eux appartenantes, sans préjudice toutesfois des droits de Sa Majesté, ou particuliers, lesquels seront payez sur les marchandises qui seront transportées par lesdits canaux, ainsi et en la mesme forme qu’il est accoustumé d’estre payé aux passages des rivières, et autres endroits, par lesquelles elles sont à présent transportées.
VI. Et d’autant que, pour faire lesdits desseichemens, il est nécessaire de faire de grandes tranchées, et couper beaucoup de terres voisines desdits marais ; ce qui ne peut estre fait sans endommager les propriétaires qui les pourroient empescher, pour n’estre le vingt-uniesme article dudit Edict clairement expliqué ; Votre Majesté est très- humblement suppliée permettre susdits associez de faire lesdites tranchées sur les terres du voisinage, selon qu’elles se trouveront nécessaires pour faire ledit desseichement, et conduits desdits canaux et chemins, en payant par eux aux intéressez le dommage qu’ils en recevront, selon l’arbitrage des juges des lieux où seront assis et situez lesdits héritages, ou des commissaires, qui à ce faire seront députez. Sa Majesté permet ausdits supplians, en faisant ledit desseichement, de prendre ce qui leur sera nécessaire des terres voisines desdits marais, pour faire leurs canaux, chemins et levées, selon les devis et dessins qu’en auront faits ceux qui ont la conduite dudit desseichement : en payant toutesfois et récompensant les propriétaires desdites terres, de gré à gré, ou selon qu’il sera arbitré par le juge des lieux ou commissaires, qui, à ce, seront députez, comme il est porté par les dix-huit et vingt-uniesme articles de ladite déclaration.
VII. Les supplians, ayans besoin d’un grand nombre de personnes, tant pour travailler audit desseichement, que pour habiter lesdits marais quand ils seront en estat d’estre cultivez ; qu’ils sont contraints faire venir avec leur mesnage de divers lieux, et introduire en plusieurs endroits du Royaume, où ils feront ledit desseichement, pour s’en servir lors qu’ils en ont besoin, lesquels comme estrangers pourroient faire difficulté de quitter leur pays, s’il ne leur est permis demeurer ès villes et villages voisins, et y exercer leur mestier et vacations, attendant que lesdits marais soient habitables, avec mesmes privilèges et libertez que les naturels François, comme il leur est accordé après ledit desseichement : supplient Vostre Majesté, qu’il luy plaise permettre à tous estrangers, de quelque nation qu’ils soient, faisans profession du christianisme, de pouvoir demeurer ès villes et villages proches desdits marais, attendant qu’ils soient desseichez et habitables, sans qu’ils puissent estre troublez en la jouyssance des privilèges dont jouyssent les naturels François, et tout ainsi qu’il a pleu à Vostre Majesté leur accorder, par l’article dixiesme dudit Edict, lors qu’ils seront demeurans esdits marais desseichez pour les labourer, cultiver et y faire exercice de leur mestier, traficq et vacation. Permis ausdits estrangers, quels qu’ils soient, pourveu qu’ils fassent profession de la religion catholique, apostolique et romaine, ou prétenduë réformée, qui viendront en France, sous adveu desdits supplians pour s’habiter esdits marais, de séjourner et demeurer ès villes, villages et autres lieux voisins d’iceux marais, en attendant qu’ils soient entièrement desseichez, pour y faire et exercer leurs mestiers et trafic. En quoi faisant, Sadite Majesté veut, ordonne, qu’ils jouyssent du droit de naturalité, accordé par le dixiesme article de ladite déclaration, ensemble des privilèges et immunitez y contenues, se comportans au surplus, suivant les Edicts, Lois et Ordonnances de Sa Majesté.
VIII. Et parce que, par l’arrest du Conseil, sur la rupture des digues ou levées, il est dit seulement, qu’on se pourroit prendre à ceux qui auront fait lesdites ruptures, ce que malaisément se pourra avérer, et partant ledit arrest leur demeure inutile et infructueux : qu’il plaise à Sadite Majesté de déclarer qu’on s’en pourra prendre aux propriétaires ou possesseurs des terres voisines, qui recevront commodité desdites ruptures, comme estant à présumer contre eux plus que contre autres. Permet Sa Majesté ausdits supplians, se pouvoir adresser aux plus proches voisins desdites ruptures, de qui les terres en recevront commodité, conformément à l’arrest de son Conseil du sixiesme jour de mars 1610.

Faict au Conseil d’Estat du Roy, tenu à Fontainebleau le vingt-deuxiesme jour d octobre mil sept cent onze.

Signé de Flecelles

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